Comment faire une saisie sur un compte bancaire ?

Rédigé par Roxane Hidoux

Le titulaire d'un compte bancaire dispose de 1 mois pour contester la saisie-attribution. Il dispose pour cela de plusieurs motifs de contestation : prescription de la facture, mention manquante dans l'acte de saisie, dépassement du délai de 8 jours...

Sommaire :

A quelles conditions un commissaire de justice peut-il saisir un compte bancaire ?

Une procédure de saisie-attribution n'est valable que si le commissaire de justice respecte une procédure précise.

1. Être muni d'un titre exécutoire

Pour pouvoir faire saisir une somme d'argent sur un compte bancaire, le créancier doit être titulaire d'un titre exécutoire.

Il s'agit généralement d'une décision de justice mais pas obligatoirement. Ainsi, un bailleur disposant d'un loyer impayé ou un créancier qui se retrouve avec une lettre de change ou un chèque revenu impayé dispose automatiquement d'un titre exécutoire.

Une décision de justice n'exige pas forcément que le titulaire du compte ait comparu devant le juge. C'est le cas de l'ordonnance d'injonction de payer qui est rendue sans que créancier ou débiteur n'ait à comparaître devant le juge.

2. Faire rédiger un acte de saisie

Une fois qu'il dispose d'un titre exécutoire, le créancier doit demander à un commissaire de justice du lieu de résidence de son débiteur de rédiger un acte de saisie.

L'acte de saisie n'est valable que s'il comporte plusieurs mentions obligatoires :

  • la date,
  • l’identité de la personne à qui le titulaire du compte doit de l’argent (nom, prénom, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance pour une personne physique (particulier) ; forme, dénomination, siège social et représentant légal pour une personne morale (société)),
  • les nom, prénom, demeure et signature de l’commissaire de justice,
  • les nom et domicile du destinataire ou les dénomination et siège social pour une entreprise,
  • le titre exécutoire permettant la saisie,
  • le décompte des sommes réclamées, les frais et les intérêts,
  • l’indication que la banque est tenue envers le créancier (celui à qui le titulaire du compte doit de l’argent) saisissant et qu’elle ne doit pas disposer des sommes réclamées,
  • la reproduction du premier alinéa de l’article 43 et de l’article 44 de la loi n°91-650 du 9 juillet 1991 et des articles 60 et 66 du décret n°92-755 du 31 juillet 1992.

Lorsque l'acte de saisie ne comporte pas toutes les mentions obligatoires, le titulaire du compte peut demander au juge l'annulation de la procédure.

3. Informer le titulaire du compte dans les 8 jours de la saisie

L'commissaire de justice va commencer par notifier l'acte de saisie à la banque du titulaire du compte.

L'commissaire de justice dispose ensuite d'un délai de 8 jours pour procéder à la dénonciation de la saisie-attribution, c'est-à-dire pour informer le titulaire du blocage de son compte bancaire. La procédure n’est pas valable si ce délai n’est pas respecté.

La banque peut aussi prévenir directement le titulaire du compte de la procédure en cours, mais elle ne peut en aucun cas s’y opposer. Mais à défaut de recevoir la dénonciation sous 8 jours, la procédure est caduque.

L'acte de dénonciation doit comporter :

  • une copie du procès-verbal de saisie et la réplique des renseignements fournis par le tiers saisi au cas où l’acte a été signifié par voie électrique ;
  • la mention que les contestations peuvent être dressées, sous peine d’irrecevabilité, dans un délai de 1 mois après la signification de l’acte par assignation ;
  • le nom de la juridiction devant laquelle les contestations peuvent être portées ;
  • la date d’expiration du délai de 1 mois avec l’indication de la dénonciation de l’assignation par lettre recommandée ;
  • la déclaration du montant de la somme à caractère alimentaire laissée au titulaire du compte.

Une fois qu'il a reçu la dénonciation de saisie-attribution, le titulaire du compte dispose de 1 mois pour contester la saisie.

Si le titulaire du compte signe l'acte d'acquiescement à le commissaire de justice ou ne conteste pas dans le mois qui suit la saisie-attribution, le créancier se verra automatiquement attribuer les sommes saisies à l'expiration de ce délai.

Lorsque le compte bancaire saisi est un compte joint, tous les titulaires du compte doivent être informés de la signification de la saisie bancaire.

Comment contester une saisie-attribution ?

Lors de la notification de l'acte de saisie, le commissaire de justice propose au titulaire du compte de signer un acte d'acquiescement. Celui-ci ne doit être signé que si celui-ci ne souhaite pas contester la saisie. Le paiement est ensuite différé jusqu'à la décision du juge.

A compter de la signification par le commissaire de justice, le titulaire du compte dispose de 1 mois pour contester la saisie-attribution devant le juge de l'exécution.

1ère étape : Vérifier que le délai de 1 mois est respecté

La contestation doit être formée dans un délai de 1 mois à compter de la date figurant en tête de l’acte, c'est-à-dire de la date de passage du commissaire de justice, peu importe que le titulaire du compte n'était pas présent ce jour-là.

Lors du passage de l’commissaire de justice, soit le titulaire du compte était présent et a reçu l’acte de dénonciation, soit il était absent et doit aller chercher l’acte à l’étude de l’commissaire de justice. Dans les 2 cas, le délai de 1 mois a commencé à tourner lors du passage du commissaire de justice.

Cependant, lorsque le délai de 1 mois pour former une contestation relative à une saisie-attribution expire normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant.

Si le délai n'est pas respecté, le débiteur perd son droit à contestation et les sommes bloquées seront versées au créancier.

L'acte de dénonciation de la saisie doit comporter l'indication que les contestations doivent être soulevées, à peine d'irrecevabilité, dans le délai de 1 mois qui suit la signification de l'acte et la date à laquelle expire ce délai. L'absence de cette mention rend inopposable l'irrecevabilité.

2ème étape : Adresser la contestation à un commissaire de justice

Le titulaire du compte dispose d'un délai de 1 mois pour adresser sa contestation au Tribunal judiciaire.

Le titulaire du compte doit commencer par envoyer une lettre recommandée avec accusé de réception de la lettre de contestation à un commissaire de justice de son choix.

Ce dernier délivrera une assignation au créancier (acte juridique devant comporter de nombreuses mentions obligatoires) pour contester la saisie devant le juge de l’exécution.

3ème étape : Informer le commissaire de justice et la banque de la contestation

Le titulaire du compte doit également informer :

  • le commissaire de justice qui a procédé à la saisie, le même jour, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et ce, à peine d'irrecevabilité,
  • la banque, par lettre simple (une copie de ce courrier doit être remise au greffe du tribunal au plus tard le jour de l'audience)

4ème étape : Remettre la contestation au tribunal

Le titulaire du compte doit ensuite remettre une copie de la lettre adressée à la banque au greffe du Tribunal judiciaire du lieu de sa résidence.

Le paiement de la dette est alors différé jusqu'à ce que le juge de l'exécution rende son ordonnance. Il peut refuser ou recevoir totalement ou partiellement la contestation.

5ème étape : Se rendre à l'audience

La saisie est suspendue jusqu’à la décision du juge de l’exécution. Le créancier ne pourra donc pas être payé tant que le juge n’aura pas rendu sa décision.

Le jour de l’audience, le juge de l’exécution entendra les 2 parties, créancier et titulaire du compte saisi, et statuera.

Si le juge de l’exécution donne raison au titulaire du compte et considère sa contestation justifiée, il ordonnera la mainlevée de la saisie.

Au cas où le litige n’est accepté que partiellement, il pourra cantonner le montant de la saisie à une somme moindre.

En cas de rejet de la contestation, la banque paiera le créancier sur présentation de la décision du juge.

Le recours à un avocat est-il obligatoire pour contester la saisie bancaire ?

Le recours à un avocat n'est pas obligatoire pour contester une saisie-attribution, mais reste conseillé car le délai de 1 mois est très bref alors que de nombreuses formalités doivent être réalisées.

L'avocat va pouvoir de charger de rédiger l’assignation, se rapprocher du Tribunal pour faire le nécessaire, faire ensuite délivrer l’assignation par commissaire de justice au créancier ainsi qu’à l’commissaire de justice saisissant, puis faire enregistrer le dossier au Tribunal.

Exemple de lettre de contestation

Objet : Contestation d'une saisie-attribution

Maitre,

Mon compte bancaire numéro __________ (indiquer le numéro du compte en banque) détenu par l'établissement bancaire __________ (coordonnées complètes de la banque) est frappé par une saisie-attribution (date de la saisie du compte).

Je vous demande de contester cette saisie devant le juge de l'exécution, car je n'ai pas été avisé dans les délais de l'acte de saisie et que d'autre part le solde bancaire insaisissable n'a pas été laissé à ma disposition conformément aux dispositions prévues par la loi du 12 mai 2009 et du décret du 30 décembre 2009.

En vous remerciant par avance, recevez, Maître, l'expression de ma considération distinguée.

Quels sont les motifs de contestation d'une saisie-attribution ?

Les motifs de contestation d'une saisie bancaire sont multiples : nullité du jugement, paiement de la dette, prescription de la facture... Mais il en existe de plus spécifiques.

1. L'commissaire de justice n'a pas respecté la procédure

Il est possible que le commissaire de justice n'ait pas respecté les conditions de mise en oeuvre de la procédure de saisie-attribution.

Exemples :

  • le commissaire de justice a engagé la procédure sans être muni d'un titre exécutoire,
  • l'acte de saisie-attribution ne comporte pas toutes les mentions obligatoires,
  • le titulaire du compte n'a pas été informé dans les 8 jours,
  • le commissaire de justice a informé uniquement un seul des titulaires du compte joint qui a été saisie,
  • l'acte de dénonciation ne comporte pas toutes les mentions obligatoires...

2. L'commissaire de justice a saisi un compte qui n'était pas saisissable

Tous les comptes bancaires sont saisissables : comptes de dépôt, comptes courants personnels, comptes joints et comptes d'épargne.

Si le titulaire du compte exercer son activité sous forme d'entreprise individuelle, la banque pourra bloquer ses comptes professionnels et personnels.

De même, si le compte bancaire personnel d'un dirigeant est utilisé, celui-ci pourra être saisissable.

Les coffres sont aussi saisissables, sous réserve que le créancier suive une procédure particulière.

A noter : les comptes titres détenus à titre particulier sont insaisissables (actions, obligations et assurance-vie).

Entrées et sorties d'argent

Le blocage intervient sur une période de 15 jours et touche les sommes créditées antérieurement. Durant ce délai, le montant saisi sera diminué ou augmenté des opérations en cours.

Vont ainsi être pris en compte :

  • au crédit du compte, les remises de chèques faites antérieurement à la saisie ;
  • au débit du compte, les retraits de billets effectués antérieurement, les chèques émis antérieurement et encaissés durant le délai, les chèques portés antérieurement au crédit du compte et revenus ensuite impayés, les paiements par carte dès lors que leurs bénéficiaires ont été crédités antérieurement à la saisie et les effets de commerce impayés.
Le 15e jour, les sommes saisissables présentes sur le compte sont bloquées.

3. L'commissaire de justice a saisi des revenus qui n'étaient pas saisissables

Revenus insaisissables

Certains revenus ne sont pas saisissables, quel que soit leur montant :

  • le revenu de solidarité active (RSA) pour une personne seule,
  • la prime d'activité,
  • l'allocation de solidarité spécifique (ASS),
  • l'allocation personnalisée d'autonomie (APA),
  • les indemnités en capital ou rentes pour accident de travail,
  • l'allocation aux adultes handicapés (AAH) sauf pour le paiement des frais d'entretien de la personne handicapée,
  • les indemnités de départ consécutif à la situation économique de l'entreprise,
  • les indemnités pour remboursement de frais professionnels avancés par le salarié.

Pour cela, le titulaire du compte doit remettre à sa banque une attestation, délivrée par l'organisme payeur, d'insaisissabilité de ces prestations.

Les indemnités de licenciement, les indemnités de rupture conventionnelle et les sommes versées au titre de la participation ou de l'intéressement sont saisissables en totalité.

Revenus partiellement insaisissables

D'autres revenus ne sont saisissables qu'en partie :

  • le salaire et les majorations de salaire pour heures supplémentaires ;
  • les avantages en nature ;
  • les allocations complémentaires servies en cas de réduction d'horaire (activité partielle, passage temporaire à mi-temps) ;
  • les indemnités journalières de maladie, de maternité et d'accident du travail ;
  • les indemnités de chômage et l'allocation de retour à l'emploi (ARE);
  • les indemnité de départ volontaire à la retraite ;
  • les pensions et rentes viagères d'invalidité ;
  • les pensions de retraite et pensions de réversion ;
  • l'allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa).

La partie saisissable dépend d'un barème fixé par décret.

Les prestations familiales peuvent être saisies seulement dans certains cas et notamment pour le paiement de certaines créances.

4. Le titulaire du compte ne dispose pas du solde bancaire insaisissable

L'commissaire de justice a l'obligation de laisser au minimum à la disposition de la personne saisie le montant du solde bancaire insaisissable (SIB), c'est-à-dire une somme au moins égale à 565,34 € (montant mensuel du RSA pour une personne seule).

Ainsi, même lorsque le titulaire du compte perçoit uniquement des revenus saisissables, le commissaire de justice doit lui laisser au minimum cette somme.

Que faire lorsque l'on ne dispose pas de motifs de contestation ?

Le titulaire du compte peut décider de reconnaître la dette mais réclamer un délai de grâce (délai de paiement).

Le juge de l'exécution peut accorder jusqu'à 24 mois de délais.