Comment réaliser un apport en nature ?

Un apport en nature désigne la remise d'un bien (autre qu'une somme d'argent) destiné à entrer dans le capital social d'une société.

Qu'est-ce qu'un apport en nature ?

Un apport en nature est constitué par la remise au capital d'une société d'un bien meuble, corporel ou incorporel, ou d'un bien immobilier.

Un apport en nature peut prendre diverses formes : terrains, constructions, fonds de commerce (y compris la clientèle, le nom commercial, le droit au bail et tous autres éléments incorporels), matériel, mobilier, valeurs mobilières, participations, créances, stocks de marchandises.

Un apport en nature peut être réalisé :

  • soit en pleine propriété,
  • soit en nue-propriété,
  • soit en usufruit,
  • soit en jouissance.

L’associé ou l'actionnaire ne pourra récupérer son apport en nature qu’à l’occasion de la dissolution de la société, si sa situation financière le permet.

Quelles formes peut prendre un apport en nature ?

Apport en nature en pleine propriété

En cas d’apport en plein propriété, l’apporteur s'engage, dans les statuts ou dans un acte distinct annexé aux statuts, à transférer la propriété du bien à la société et à le mettre à sa disposition.

La propriété du bien est transférée à celle-ci à compter de l'immatriculation de la société. Les parts sociales ou actions attribuées à l’apporteur en constituent le prix.

A noter : en cas d'apport d'un bien immatériel (marque, brevet...), il est préférable de réaliser apport en jouissance ou de conclure un contrat de licence avec la société plutôt que de faire un apport en nature en pleine propriété.

Apport en nature en jouissance

En cas d’apport en jouissance, l’apporteur se contente de mettre le bien à disposition de la société qui en a simplement l’usage.

L’associé en demeure le seul propriétaire. Il a en principe l'assurance de récupérer son bien en cas de dissolution puisqu'il ne fait pas partie du patrimoine de la société et échappe par conséquent à l'action des créanciers.

Apport en nature en nue-propriété

Dans le cas d’un apport en nue-propriété, l’apporteur est qualifié d’usufruitier. Il apporte seulement à la société le droit de propriété.

Elle devient propriétaire du bien et peut donc le vendre ou modifier sa nature. En revanche, elle n’a ni le droit de l’utiliser, ni d’en percevoir les fruits.

Apport en nature en usufruit

Dans le cas d’un apport en usufruit, l’apporteur devient nu-propriétaire. Il apporte à la société le droit d’utiliser le bien et d’en percevoir les revenus, pour une durée déterminée qui ne peut excéder ni 30 ans, ni la durée de vie de l'usufruitier.

Si la société peut percevoir les loyers de l’immeuble apporté, y installer son siège social ou encore percevoir les dividendes d’un portefeuille d’action, elle ne pourra pas vendre le bien ou en modifier sa nature (par exemple, transformer un bail à usage d’habitation en bail commercial).

Quand peut-on réaliser un apport en nature ?

Il est possible de réaliser un apport en nature :

  • lors de la création d’une société ;
  • à l’occasion d’une augmentation de capital par les associés ou actionnaires déjà en place ;
  • lors de l'entrée d'un nouvel associé / actionnaire fait son entrée.

Sauf s'il s'agit d'une société à capital variable, la modification du capital social nécessite de mettre les statuts à jour.

Comment évaluer un apport en nature ?

Évaluation par un commissaire aux apports

Chaque apport en nature doit faire l’objet d’une évaluation dans les statuts.

En principe, la valeur d'un apport en nature ne peut être déterminée par les associés qu'au vu d'un rapport établi par un commissaire aux apports et annexé aux statuts.

Dans les SARL et les SAS, le commissaire aux apports doit être choisi parmi les commissaires aux comptes ou parmi les experts inscrits sur l’une des listes établies par les cours et les tribunaux. Il ne peut s’agir ni du commissaire aux comptes, ni de l’expert-comptable de la société.

Dans les SA, le commissaire aux apports est obligatoirement choisi par le Tribunal de commerce.

Évaluation par les associés

Les associés d'une d'une SARL ou d'une SAS peuvent toutefois décider à l'unanimité de ne pas recourir à un commissaire aux apports si les 2 conditions suivantes sont remplies :

  • aucun apport en nature n'a une valeur brute supérieure à 30 000 € ;
  • et, la valeur totale de l'ensemble des apports en nature non soumis à l’évaluation d'un commissaire aux apports n’excède pas la moitié du capital.

En cas de non-recours à un commissaire aux apports, les associés sont responsables solidairement de la valeur donnée aux biens pendant 5 ans.

Évaluation d'un apport en nature en plein propriété

Pour évaluer la valeur d’un apport en nature en pleine propriété, il faut prendre en compte sa valeur marchande, c’est-à-dire le prix le plus probable auquel il pourrait être vendu au jour de l’estimation.

Évaluation d'un apport en nature en usufruit

Pour évaluer un apport en usufruit, 2 méthodes sont admises :

  • la méthode fiscale, qui consiste à déduire de la valeur du bien en pleine propriété un pourcentage fixé par la loi (de 10 à 90 % en fonction de l'âge de l'usufruitier) ;
  • la méthode économique, qui consiste à estimer l’usufruit en fonction des revenus qui seront perçus pendant sa durée, en tenant compte de l’espérance de vie de l’usufruitier.

Évaluation d'un apport en nature grevé d'un passif

Seule la valeur nette est considérée comme un apport en nature (actif moins passif), le passif repris par la société étant considéré comme une vente.

L'accord du conjoint est-il nécessaire en cas d'apport en nature ?

Le régime matrimonial de l'associé est susceptible d'avoir une incidence sur les formalités à réaliser en cas d'apport en nature.

Époux mariés sous le régime de la communauté légale

Apport d'un bien commun par 2 époux

Si des époux décident de réaliser ensemble un apport en nature, il n’y aura pas de difficulté : l’apport sera réalisé d’un commun accord, et les époux seront tous 2 actionnaires ou associés.

Apport d'un bien commun par 1 époux

Lorsque le bien apporté appartient aux 2 époux, les formalités à respecter dépendent de la forme juridique de la société.

Lorsque l'apport en nature est réalisé à une SA ou à une SAS, seul l’époux ayant procédé à l’apport en sera actionnaire. Pour autant, la valeur des actions va figurer à l’actif de la communauté.

Ainsi, en cas de divorce, l’époux qui n’est pas titulaire des actions pourra néanmoins en revendiquer la moitié de leur valeur.

Lorsque l'apport est réalisé à une SARL, il doit faire l'objet d'une information préalable auprès de l'époux non apporteur.

En pratique, cette information peut prendre 2 formes différentes :

  • soit l'obtention du consentement du conjoint (obligatoire en cas d'apport d’un fonds de commerce, d’une exploitation, d’un immeuble, de droits sociaux non négociables, d’un bien concerné par une clause d'administration conjointe, des droits par lesquels est assuré le logement de famille) ;
  • soit la simple information du conjoint. Dans les autres cas, l’associé doit avertir formellement son époux lorsqu’il envisage d’apporter un bien commun à la société, et le justifier dans l’acte d’apport. Une mention est généralement intégrée dans les statuts de la société.

Époux mariés sous un régime de séparation des biens

L’associé ou l’actionnaire marié sous le régime de la séparation de biens reste, malgré son mariage, propriétaire de ses biens.

Son patrimoine étant distinct de celui de son conjoint, il peut prendre la décision d'apporter les biens qu'il souhaite au capital d'une société.

L’accord de son conjoint n’est pas nécessaire. Lui seul aura la qualité d’associé, et le patrimoine de son conjoint, étranger à l’opération, restera protégé des créanciers de la société.

Quand faut-il remettre les apports en nature ?

La libération d'un apport en nature intervient lorsque l’apporteur prend l’engagement d’apporter le bien en cause à la société.

En pratique, l’acte d’apport est signé en même temps que les statuts et annexé à ceux-ci.

Le transfert de propriété n’est effectif qu’à partir du jour où la société a été immatriculée.

Jusqu’à cette date, l’apporteur reste le propriétaire de l’apport et doit s’assurer de sa bonne conservation en s’abstenant de tout acte pouvant faire obstacle au transfert.

Quel est le régime fiscal d'un apport en nature ?

Droits d'enregistrement sur les apports en nature

Les apports purs et simples effectués lors de la constitution d'une société sont en principe exonérés de droits d’enregistrement.

Lorsque la société est soumise à l'impôt sur les sociétés, l’apporteur s’engage à conserver durant 3 ans les parts reçues en contrepartie de l’apport. Aucune condition n'est prévue lorsque la société est soumis à l'impôt sur le revenu.

Si ces conditions ne sont pas remplies, un droit d’enregistrement est exigé. Il est égal à :

  • pour les apports d'immeubles et de droits immobiliers : 5 % de la valeur retenue (taux plus élevé dans certains départements) ;
  • pour les fonds de commerce, clientèle et droit au bail : 3 % sur la fraction comprise entre 23 000 et 200 000 €, et 5 % sur la fraction dépassant 200 000 € (aucun droit n'est dû entre 0 et 23 000 €).

Le montant minimum des droits d'enregistrement est de 25 €.

TVA sur les apports en nature

Les apports effectués lors de la formation de la société sont en principe exonérés de TVA.

Il existe toutefois certaines exceptions : apport de certains éléments du fonds de commerce, apports portant sur des terrains à bâtir ou sur des immeubles bâtis lorsque l’apport est fait avant l’achèvement...

Plus-value sur les apports en nature

Au regard du régime des plus-values, l’apport d’un bien à une société est considéré comme une vente, même si l’apporteur ne reçoit aucune somme d’argent.

La plus-value éventuellement réalisée par l'apporteur est donc imposable, et ce même si l'apport est réalisé à titre pur et simple.