Qu'est-ce qu'un contrat de bail professionnel ?

Rédigé par Roxane Hidoux

Le bail professionnel est un contrat proche du bail commercial qui s'adresse principalement aux membres des professions libérales, réglementées ou non : notaire, sage-femme, kinésithérapeute, sculpteur, artiste-peintre...

Sommaire :

Qui peut bénéficier d'un bail professionnel ?

Le recours au bail professionnel n'est permis que lorsque tous les autres types de baux sont exclus.

Il ne peut donc pas être conclu par une personne qui compte y exercer :

  • une activité commerciale, industrielle ou artisanale (c'est le bail commercial qui s'applique) ;
  • une activité agricole (c'est un bail rural qui doit être conclu) ;
  • une activité à la fois commerciale et professionnelle, ce qui vise les agents d’assurances, les administrateurs de biens, les agents immobiliers... (c'est le bail commercial qui s'applique) ;
  • une activité professionnelle, mais en vivant également sur les lieux (c'est un bail mixte habitation-professionnel qui doit être conclu).

En pratique, le bail professionnel concerne principalement les professions libérales réglementées (médecins, avocats, notaires, experts-comptables, etc.) mais aussi des professions libérales non réglementées tels que les conseils en gestion de patrimoine.

Le bail professionnel peut d'ailleurs permettre à plusieurs professionnels de partager un même local, ainsi que le loyer. Ils sont alors colocataires.

Le locataire peut également être une association, lorsqu'elle exerce une activité de nature exclusivement professionnelle.

A quelle réglementation un bail professionnel est-il soumis ?

Le bail professionnel est un bail dont le régime est particulièrement souple. La loi n°86-1290 du 23 décembre 1986 régit seulement quelques aspects du bail professionnel, comme sa durée, le préavis, ou encore ses modalités de renouvellement.

Le reste du bail professionnel est librement négocié entre le propriétaire et son locataire, ce qui vise :

  • le versement ou non d'un dépôt de garantie,
  • le montant du loyer, la périodicité et les modalités de paiement,
  • la répartition des travaux et des charges entre locataire et bailleur,
  • les modalités de révision du loyer (une clause d'indexation peut prévoir une révision annuelle),
  • les assurances à souscrire.

Pour les questions non abordées par le bail professionnel, ce sont les dispositions du Code civil sur le louage d’immeubles qui s’appliquent (articles 1713 à 1762).

État des lieux obligatoire

Dans le cadre d'un bail professionnel, la réalisation d'un état des lieux est obligatoire.

L'état des lieux d'entrée et de sortie doit être établi de façon contradictoire. A défaut, il est établi par commissaire de justice à la demande de la partie la plus diligente, et les frais sont partagés en 2 de manière égale entre les 2 parties.

Aucune forme particulière n'est exigée pour l'établissement de l'état des lieux. Celui-ci peut être rédigé contradictoirement par les parties, par commissaire de justice ou par un mandataire des parties.

Comment est fixé le loyer d'un bail professionnel ?

Le loyer d'un bail professionnel n'étant soumis à aucune réglementation, son montant est librement négocié par les parties au moment de la conclusion du bail initial.

Le bailleur n'est pas tenu de déterminer une surface pondérée de son bien pour calculer le loyer, contrairement à ce qui est d'usage en matière commerciale.

Le loyer peut prendre la forme d'une somme fixe ou variable, en partie (une partie reste fixe) ou totalement.

Révision du loyer en principe impossible

Le Code civil ne prévoit pas de possibilité de révision du loyer, ni en cours de bail, ni lors d'un éventuel renouvellement.

Par conséquent :

  • le bailleur ne peut pas demander la révision du loyer en justice au bout de 3 ans de location, s'il estime que le loyer est inférieur aux prix du marché, comme peut le faire le bailleur commercial,
  • le locataire ne peut pas demander au juge le blocage de la clause d'indexation si celle-ci aboutit à une augmentation du loyer de 10% comme peut le faire le locataire commercial.

Cependant, le bail est libre de prévoir le principe d'une révision, par le biais notamment d'une clause d'indexation en relation directe avec l'activité de l'une des parties.

La date de la première révision ainsi que sa périodicité doit être mentionnée dans le bail. La périodicité de la révision est librement définie par le bail (date anniversaire, révision automatique si l'indice de référence dépasse un certain pourcentage).

La clause d'indexation ne doit pas exclure la réciprocité, sous peine d'annulation. Il est conseillé de prévoir que les variations de l'indice seront prises en compte "en plus ou en moins".

Quelle est la durée d'un bail professionnel ?

Un bail professionnel est conclu pour une durée minimale de 6 ans.

A son terme, il peut être reconduit tacitement pour une autre durée de 6 ans, sans formalités particulières. Mais le locataire ou le bailleur peut aussi décider de ne pas renouveler le bail professionnel, à condition de respecter un délai de préavis de 6 mois.

Le locataire, et lui uniquement, a cependant la possibilité de donner congé avant la fin du bail, à condition de respecter un délai de préavis de 6 mois.

Reconduction tacite du bail professionnel

A son terme, le bail professionnel est reconduit tacitement pour une durée de 6 ans (ou celle prévue au contrat initial si elle est supérieure), sauf congé délivré par l'une des parties 6 mois au moins avant le terme du bail.

Un nouveau bail se substitue au précédent, en tous points identique au bail initial, y compris le loyer. Le bail professionnel peut toutefois prévoir, dès le départ, les conditions de fixation du loyer du bail renouvelé.

Le bailleur ne peut pas profiter de la tacite reconduction pour modifier les obligations du locataire, et ce dernier pour ne plus exécuter certaines de ses obligations.

Renouvellement du bail professionnel

Le bailleur peut proposer au locataire le renouvellement de son bail. Il doit alors lui adresser un congé pour la fin du bail en cours avec offre de renouvellement.

Le congé doit préciser les conditions du nouveau bail, le bailleur pouvant en profiter pour augmenter le loyer ou imposer de nouvelles obligations au locataire.

Le locataire peut accepter ces nouvelles conditions et signer le nouveau bail, ou les refuser : le bail professionnel sera alors reconduit, à défaut de congé dans le délai de 6 mois.

Le bailleur peut aussi refuser le renouvellement du bail professionnel. Le locataire ne bénéficie pas d'un droit au renouvellement et ne peut pas non plus exiger le versement d'une indemnité d'éviction, comme dans le cas d'un bail commercial.

Rupture du bail professionnel

Le locataire peut, à tout moment, notifier au bailleur son intention de quitter les locaux en respectant un délai de préavis de 6 mois.

Le bailleur peut donner congé au locataire pour la fin du bail, s'il ne souhaite pas le renouveler. Il doit alors respecter un préavis de 6 mois.

Il ne peut pas, en revanche, donner congé au locataire en cours de bail mais, si le locataire a commis des fautes, peut poursuivre la résiliation du bail en justice ou faire jouer la clause résolutoire qu'il contient.

La fin d'un bail professionnel présente plusieurs particularités :

  • le congé n'a pas à être motivé, le locataire professionnel ne bénéficiant pas du droit au renouvellement accordé aux titulaires d'un bail commercial,
  • le bailleur n'est pas non plus tenu de lui verser une indemnité d'éviction,
  • lorsque les locaux loués sont repris pour être vendus, le locataire sortant ne bénéficie pas du droit de préemption accordé au locataire d'un logement, sauf si le bail est à usage mixte professionnel et d'habitation.

Modèle de bail professionnel

LegalPlace propose un modèle de bail professionnel conçu par des avocats spécialisés en droit des baux. Le modèle s'adapte à la situation du bailleur et du locataire.

Quelles différences entre un bail professionnel et un bail commercial ?

La frontière entre bail professionnel et bail commercial n’est pas toujours aisée à déterminer.

Nature des activités autorisées

Un professionnel libéral doit en principe se tourner vers le bail professionnel. Il peut cependant opter pour un bail commercial, à condition qu'il fasse immatriculer son fonds au RCS et que le bailleur donne son accord.

Une personne exerçant une activité commerciale, industrielle ou artisanale doit obligatoirement conclure un bail commercial. Elle ne peut pas se tourner vers le bail professionnel, même si elle exerce en partie une activité de nature professionnelle.

Durée du bail

Un bail professionnel doit être conclu pour une durée minimale de 6 ans.

Un bail commercial doit être conclu pour 9 ans minimum.

Modalités de révision du loyer

Le loyer d'un bail professionnel peut être révisé lorsque qu'une clause le prévoit. Il n'est pas soumis à des plafonnements légaux.

La révision du loyer d'un bail commercial est plus encadrée. Elle peut avoir lieu au bout de 3 ans ou avant si le bail contient une clause d’échelle mobile. Elle est plafonnée.

Répartition des charges

Dans le cas d'un bail professionnel, la répartition des charges est libre. Il peut ainsi faire peser sur le locataire l’ensemble des charges relatives au local loué et à l’ensemble de l’immeuble, et notamment les grosses réparations.

Dans le cas d'un bail commercial, la répartition des charges sera encadrée puisque les grosses réparations doivent obligatoirement peser sur le bailleur.

Droit au renouvellement

Dans le cas d'un bail professionnel, le locataire n'a pas droit au renouvellement. Le bailleur peut mettre fin au bail à l’expiration de sa durée sans indemnité d'éviction et sans justification. Il doit juste respecter un délai de préavis de 6 mois.

Dans le cas d'un bail commercial, le locataire dispose d’un droit au renouvellement du bail. En cas de refus du bailleur, le locataire a droit à une indemnité d’éviction, sauf dans certains cas précis.

Résiliation du bail

Dans le cas d'un bail professionnel, le locataire peut résilier son bail à tout moment en respectant un préavis de 6 mois. Quant au bailleur, il peut mettre fin au bail seulement 6 mois avant l’échéance de celui-ci.

Dans le cas d'un bail commercial, le locataire ne peut demander la résiliation anticipée du contrat de bail qu’à l’expiration de chaque période triennale et en donnant congé 6 mois à l’avance.

Quant au bailleur, il peut mettre fin au bail à l’expiration de chaque période triennale, pour les motifs suivants :

  • la construction ou la reconstruction de l’immeuble,
  • la surélévation de l’immeuble,
  • l’exécution de travaux prescrits ou autorisés.

Possibilité de sous-louer le local

Dans le cas d'un bail professionnel, le locataire peut sous-louer le local sauf si une clause le lui interdit.

Dans le cas d'un bail commercial, le locataire ne peut pas sous-louer le local sauf si une clause le lui autorise ou si le bailleur donne son accord.

Possibilité de céder le bail

Dans le cas d'un bail professionnel, le locataire peut céder son bail, sauf si une clause le lui interdit.

Dans le cas d'un bail commercial, aucune clause ne peut interdire au locataire de céder son bail lors d’une cession du fonds commercial, industriel ou artisanal.

A quelle fiscalité un bail professionnel est-il soumis ?

Bail professionnel et TVA

Un bail professionnel est en principe exonéré de TVA.

Le bailleur a cependant la possibilité d'opter pour la TVA. Il doit dans ce cas, dans les 15 jours suivant le début de la location, souscrire une déclaration d'existence sur un imprimé à remettre au centre des impôts du lieu de situation des locaux.

L'option est alors prise jusqu'au 31 décembre de la neuvième année suivant la déclaration. L'option à la TVA peut ensuite être dénoncée à tout moment. Par exemple, si un bail professionnel est conclu le 1er septembre 2022 et que le bailleur opte pour la TVA le 10 septembre 2026, l'option est valable jusqu'au 31 décembre 2035 et peut ensuite être dénoncée à tout moment.

Cette option présente plusieurs avantages :

  • la TVA afférente aux dépenses exposées par le bailleur (travaux sur le local par exemple) vient en déduction de la TVA perçue. En cas de gros frais, le bailleur peut donc avoir intérêt à opter pour le régime de la TVA,
  • le locataire peut déduire le montant de cette TVA s'il est lui-même assujetti. En cas de bail mixte, cette déduction s'effectue au prorata de la superficie consacrée à l'activité professionnelle.

Attention, le bailleur ne peut pas se décider pour cette option en cours de bail et en faire supporter le coût au locataire car, en cours de bail, l'option ne doit pas se traduire par une augmentation des sommes à payer par le locataire.

Bail professionnel et taxe foncière

La taxe foncière est perçue par l'administration fiscale auprès du propriétaire des locaux.

Toutefois, le bail peut prévoir que le locataire la lui remboursera, sauf s'il s'agit d'un bail mixte.

Bail professionnel et taxe annuelle sur les bureaux

La taxe sur les bureaux (TSB), applicable dans la région d'Île-de-France, est une taxe annuelle qui concerne les bureaux et les locaux professionnels, dès lors que la surface est supérieure à 100 m2.

Le redevable légal de cette taxe est le propriétaire. Toutefois, une clause du bail peut mettre cette taxe à la charge du locataire. Sans clause particulière, la taxe n'est pas récupérable par le bailleur, qui en reste redevable.

En ce qui concerne les locaux mixtes, il ne peut pas répercuter celle-ci sur le locataire, les charges récupérables étant limitativement énumérées par la loi.