Un commissaire aux comptes est-il obligatoire dans une entreprise ?

Rédigé par Roxane Hidoux

Le caractère obligatoire ou facultatif de la désignation d'un commissaire aux comptes dans une entreprise dépend du montant du total du bilan, du chiffre d’affaires et du nombre de salariés.

Sommaire :

Quand une entreprise doit-elle désigner un commissaire aux comptes ?

La désignation d'un commissaire aux comptes est obligatoire lorsque :

  • la société dépasse certains seuils (qui varient selon sa forme juridique),
  • les associés demandent la désignation d'un commissaire aux comptes,
  • les statuts imposent la nomination d'un commissaire aux comptes.

La société dépasse certains seuils

Une directive européenne a modifié les seuils permettant de classer les entreprises par leur taille, ce qui a conduit à relever les seuils de désignation des commissaires aux comptes à compter du 1er janvier 2024.

Forme de la société Seuils de désignation Mode de désignation
SARL, SCA, SNC, SCS Obligatoire si dépassement de 2 des seuils suivants :
  • 5 000 000 € de bilan
  • 10 000 000 € de chiffre d'affaires HT
  • 50 salariés
En assemblée générale ordinaire
EURL Obligatoire si dépassement de 2 des seuils suivants :
  • 5 000 000 € de bilan
  • 10 000 000 € de chiffre d'affaires HT
  • 50 salariés
Par l'associé unique
SA Obligatoire si dépassement de 2 des seuils suivants :
  • 5 000 000 € de bilan
  • 10 000 000 € de chiffre d'affaires HT
  • 50 salariés
En assemblée générale ordinaire, sur proposition du conseil d'administration (ou du conseil de surveillance), ou, sous certaines conditions, des actionnaires
SAS Obligatoire si dépassement de 2 des seuils suivants :
  • 5 000 000 € de bilan
  • 10 000 000 € de chiffre d'affaires HT
  • 50 salariés
Via une décision collective des associés et sur proposition du président (ou d'un autre organe de direction)

La désignation du commissaire aux comptes doit être effectuée par l'assemblée approuvant les comptes de l'exercice à la clôture duquel les seuils ont été dépassés, même s'il apparaît d'emblée que les seuils ne seront probablement pas atteints lors des exercices suivants.

En revanche, il n'est pas obligatoire de nommer un commissaire aux comptes pour le contrôle des comptes de l'exercice au cours duquel les seuils ont été dépassés.

Les associés demandent la désignation d'un commissaire aux comptes

Même lorsque les seuils de désignation ne sont pas atteints, un commissaire aux comptes peut être désigné volontairement :

  • par décision des associés d'une SAS, ou d'une SA et d'une SCA en assemblée générale ordinaire,
  • sur demande des associés représentant au moins 1/3 du capital dans une SNC ou une SARL. Comme en cas de dépassement de seuils, la direction de la société n'a pas d'autre choix que d'organiser la désignation du commissaire aux comptes.

Le commissaire aux comptes nommé volontairement est soumis aux mêmes obligations, exerce les mêmes pouvoirs et encourt les mêmes responsabilités civile et pénale qu'un commissaire nommé obligatoirement.

La désignation d'un commissaire aux comptes peut également être demandée en justice :

  • par des associés minoritaires représentant au moins 10 % du capital dans une SA, SCA, SAS ou SARL,
  • par un associé au moins dans une SNC.

Les statuts imposent la nomination d'un commissaire aux comptes

La société peut être tenue de désigner un commissaire aux comptes, en dehors de toute obligation légale, si une clause statutaire le lui impose.

Comment choisir le commissaire aux comptes ?

Le commissaire aux comptes doit être choisi parmi une liste dressée par chaque compagnie régionale des commissaires aux comptes.

Le choix du commissaire aux comptes est à l'appréciation des dirigeants de la société. Il n'est pas obligatoire de désigner un commissaire aux comptes proche géographiquement de la société.

Les critères à retenir pour choisir un commissaire aux comptes sont les suivants :

  • la connaissance du secteur d'activité et des problématiques de l'entreprise. Tous les commissaires aux comptes ne connaissent pas tous les secteurs d'activité ;
  • l'adéquation de la taille du cabinet avec celle de l'entreprise. Les « big four » sont des cabinets configurés pour répondre principalement aux besoins des grandes entreprises. Les petits cabinets traditionnels, qui ne disposent pas des mêmes moyens, sont conçus pour les petites et moyennes entreprises.

Il est conseillé de se rapprocher des conseillers juridiques ou de l'expert-comptable de l'entreprise pour trouver le professionnel adéquat.

Quelles formalités réaliser après avoir choisi le commissaire aux comptes ?

Acceptation du mandat

Une fois le choix effectué, l'entreprise doit contacter le commissaire aux comptes pressenti et lui proposer le mandat.

Celui-ci doit alors formuler son acceptation par écrit dans une lettre d'acceptation, accompagnée d'une attestation émanant de la Compagnie Régionale des Commissaires aux comptes dont il dépend.

Nomination effective par les associés

Lorsque l'obligation de désigner un commissaire aux comptes apparaît dès la création de l'entreprise, il est alors nommé dans les statuts. A défaut, le commissaire aux comptes est nommé par l'assemblée générale ordinaire.

Chaque nomination de commissaire aux comptes doit prévoir :

  • un titulaire – celui qui va être actif,
  • et un suppléant, si le commissaire aux comptes est une personne physique ou une société unipersonnelle (article L 823-1, I-al. 2 du Code de commerce). Le suppléant est destiné à remplacer le commissaire aux comptes titulaires en cas d'empêchement (décès...).

Le commissaire aux comptes et son suppléant sont désignés pour une durée de 6 ans. Par exception, lorsque la nomination d'un commissaire aux comptes a été demandée par un ou plusieurs associés représentant au moins 1/3 du capital, le commissaire aux comptes nommé suite à cette demande est désigné pour une durée de 3 ans seulement.

Remise d'une lettre de mission

Une fois qu'il a été formellement désigné par l'assemblée générale de la société, le commissaire aux comptes remet à son dirigeant une lettre de mission.

Celle-ci présente :

  • les grands chantiers à aborder, tout en rappelant brièvement les textes réglementaires et les normes d'exercice professionnel en respect desquels sera conduite la mission ;
  • le mode d'organisation de la mission : équipe intervenante, modes de communication... ;
  • une estimation des heures de travail nécessaires et des honoraires à acquitter par l'entreprise ;
  • les rôles respectifs du commissaire aux comptes et des acteurs de l'entreprise, ainsi que les responsabilités et obligations de chacun ;
  • la description détaillée des travaux qui seront réalisés, avec une première estimation des heures qui vont être effectuées ;
  • les documents à préparer par l'entreprise pour que le commissaire aux comptes puisse réaliser sa mission.

Réalisation des formalités

Publication d'une annonce légale

La nomination des commissaires aux comptes titulaires et, le cas échéant, suppléants doit donner lieu à l'insertion d'une annonce dans un journal d'annonces légales du lieu du siège social.

L'annonce légale de nomination d'un commissaire aux comptes doit obligatoirement préciser :

  • la dénomination sociale, suivie de l'éventuel sigle de la société ;
  • la forme de la société (« SARL », « EURL », « SAS », « SASU », etc.) ;
  • le montant du capital social de la société ;
  • l'adresse du siège social de la société ;
  • le numéro d'identification de la société suivi de la mention RCS et du nom de la ville où se trouve le greffe dans lequel la société est immatriculée ;
  • les nom, prénom et adresse du commissaire aux comptes titulaire (le cas échéant, dénomination sociale, forme juridique, montant du capital, siège social, RCS et ville, numéro SIREN) ;
  • les nom, prénom et adresse du commissaire aux comptes suppléant (le cas échéant, dénomination sociale, forme juridique, montant du capital, siège social, RCS et ville, numéro SIREN) ;
  • la date d'effet de la nomination des commissaires aux comptes ;
  • le greffe du tribunal de commerce auprès duquel l'inscription ou la modification sera effectuée.

Dépôt d'un dossier au greffe du Tribunal de commerce

Une demande d'inscription modificative doit ensuite être déposée au greffe du Tribunal de commerce.

Elle doit comporter les pièces justificatives suivantes :

  • procès-verbal des associés désignant les commissaires aux comptes,
  • lettre d'acceptation des commissaires aux comptes titulaire et suppléant,
  • justificatif de l'inscription sur la liste officielle des commissaires aux comptes,
  • formulaire M3 ou M3-SARL.

Cette démarche, payante, peut être réalisée en ligne sur le site formalites.entreprises.gouv.fr.

Que fait un commissaire aux comptes concrètement ?

Le rôle principal du commissaire aux comptes consiste à certifier que les comptes annuels publiés par la société sont conformes aux normes légales et donnent une image sincère et fidèle de sa situation financière.

Cette mission de contrôle et de surveillance vise non seulement à informer les associés, mais aussi toutes les personnes (créanciers, fournisseurs, banquiers, investisseurs éventuels, voire salariés) qui ont à apprécier la situation financière de la société et qui, pour cela, doivent pouvoir se fier aux documents comptables et financiers la concernant.

Le commissaire aux comptes a aussi pour mission d'alerter les dirigeants de l'entreprise dès qu'il relève des faits susceptibles de compromettre la continuité de l'activité. S'il constate que les décisions prises ne permettent pas d'améliorer la situation, il doit en informer le président du Tribunal de commerce.

Réalisation d'un rapport sur les comptes annuels

Chaque année, le commissaire aux comptes est tenu de présenter à l'assemblée générale un rapport sur les comptes annuels qui vise à démontrer que les comptes annuels ne comportent pas d'anomalies significatives.

Le rapport sur les comptes annuels se compose de 3 parties.

1ère partie : décision de certifier ou non les comptes

Dans la 1ère partie de son rapport sur les comptes annuels, le commissaire aux comptes rappelle le contexte et l'objectif de son intervention.

Puis, il donne son opinion sur les comptes annuels :

  • Si le commissaire aux comptes accepte de certifier les comptes, il valide les comptes annuels purement et simplement sans émettre de réserve.
  • Si le commissaire aux comptes certifie les comptes avec réserves, il valide les comptes annuels mais formule des remarques sur certains éléments dans son rapport.
  • Si le commissaire aux comptes refuse de certifier les comptes, il ne valide aucun élément des comptes annuels.

Conséquences du refus de certification des comptes annuels

La certification ou non des comptes a uniquement pour but d'éclairer la décision des associés.

C'est la raison pour laquelle un refus de certification n'empêche pas l'assemblée générale d'approuver les comptes ni même de les déposer au greffe du Tribunal de commerce.

Le refus de certifier les comptes ne fait pas non plus obstacle à la distribution de dividendes.

Le commissaire aux comptes peut également ajouter des observations sur certains points.

2ème partie : justification de la décision

Dans la 2ème partie de son rapport, le commissaire aux comptes va justifier son opinion sur les comptes annuels.

Il va ainsi détailler les remarques et observations qu'il a formulées dans la première partie.

3e partie : vérifications spécifiques

La dernière partie du rapport se concentre sur les vérifications spécifiques que le commissaire aux comptes est tenu de réaliser.

Elle exprime notamment l'opinion du commissaire aux comptes sur la concordance et la sincérité des informations mentionnées dans le rapport de la gérance ou du conseil d'administration.

Elle mentionne également les éventuelles irrégularités ou inexactitudes constatées par le commissaire aux comptes.

Réalisation d'un rapport spécial sur les conventions réglementées

Lorsqu'une société est tenue de désigner un commissaire aux comptes, c'est lui qui est chargé de la rédaction du rapport spécial sur les conventions réglementées.

Le rapport spécial sur les conventions réglementées doit ensuite être présenté à l'assemblée générale.

Les dirigeants de la société sont tenus d'aviser le commissaire aux comptes en cas des conventions réglementées dans un délai de 1 mois à compter de leur conclusion.

Combien coûte un commissaire aux comptes ?

Les honoraires du commissaire aux comptes ne résultent pas d'une tarification automatique proportionnelle au montant total du bilan, mais d'une libre négociation entre les parties et ils dépendent du nombre d'heures de travail estimé, lequel doit être conforme à une fourchette fixée par décret (C. com. art. R 823-12).

Chaque année, une base de référence doit être calculée pour l'entreprise, en additionnant : Total du bilan + Total des produits d'exploitation HT + Total des produits financiers HT

Les honoraires calculés tiendront également compte du nombre d'heures de travail nécessaires et de la complexité des travaux à réaliser.

Total du bilan + Total des produits d'exploitation HT + Total des produits financiers HT Nombre normal d'heures de travail Estimation HT (selon complexité)
jusqu'à 305 000 euros 20 à 35 heures Entre 2 000 et 7 000 euros
de 305 000 à 760 000 euros 30 à 50 heures Entre 3 000 et 10 000 euros
de 760 000 à 1 525 000 euros 40 à 60 heures Entre 4 000 et 12 000 euros
de 1 525 000 à 3 050 000 euros 50 à 80 heures Entre 5 000 et 16 000 euros
de 3 050 000 à 7 622 000 euros 70 à 120 heures Entre 7 000 et 24 000 euros
de 7 622 000 à 15 245 000 euros 100 à 200 heures Entre 10 000 et 40 000 euros
de 15 245 000 à 45 735 000 euros 180 à 360 heures Entre 18 000 et 72 000 euros
de 45 735 000 à 122 000 000 euros 300 à 700 heures Entre 30 000 et 140 000 euros

Peut-on mettre fin aux fonction d'un commissaire aux comptes ?

En cas de faute ou d'empêchement, les commissaires aux comptes peuvent être relevés de leurs fonctions par décision de justice à la demande du dirigeant de l'entreprise.

Deux types de fautes peuvent justifier le relèvement : une carence dans l'accomplissement des devoirs professionnels ou un excès de zèle dans l'exécution des tâches.

L'empêchement vise toutes les situations dans lesquelles le commissaire aux comptes se trouve dans l'incapacité de poursuivre sa mission dans les conditions et délais requis. Cet empêchement peut être de nature physique (par exemple, maladie, éloignement, surcharge d'activité, etc.) ou juridique (incompatibilité, omission, interdiction temporaire, suspension provisoire ou radiation).

En revanche, la seule introduction d'une action en responsabilité contre un commissaire aux comptes par la société au sein de laquelle il exerce sa mission ne constitue pas un empêchement justifiant son relèvement (Cass. com. 24-1-2024 n° 22-12.340 Sté Chestone France c/ X).

Les litiges relatifs au montant de la rémunération des commissaires aux comptes pour leur mission de certification de comptes doivent, après tentative de conciliation demeurée infructueuse devant le président de la compagnie régionale des commissaires aux comptes, être portés devant la formation restreinte du Haut Conseil du commissariat aux comptes (C. com. art. R 823-18 et R 823-19).