Qu'est-ce que la période d'observation dans une procédure collective ?
Le jugement qui prononce l'ouverture d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire ouvre une période d'observation de 6 mois maximum, renouvelable sans pouvoir dépasser 12 ou 18 mois, selon les cas.
La période d'observation est destinée à analyser la situation de l'entreprise et à préparer une solution de redressement.
Combien de temps dure la période d'observation ?
La période d'observation a pour point de départ la première heure du jour d'ouverture de la procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire (à 00h00).
La période d'observation n'est pas obligatoire ; le Tribunal de commerce peut décider de placer directement l'entreprise en difficulté en liquidation judiciaire si sa situation est manifestement impossible à redresser.
Durée minimale de la période d'observation
Le jugement d'ouverture d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire marque le point de départ de la période d'observation, période de 6 mois, renouvelable 1 ou 2 fois selon les cas.
Le Tribunal peut librement fixer la durée de la période initiale, sous réserve qu'elle n'excède pas 6 mois. Il a aussi la possibilité de prolonger cette période initiale, en fonction des difficultés prévisibles et de la nécessité de contrôler les résultats d'exploitation de manière plus ou moins rapprochée, tant que la durée totale de cette période ne dépasse pas 6 mois.
Lorsqu'il convertit la procédure de sauvegarde en procédure de redressement judiciaire, le Tribunal peut, si nécessaire, modifier la durée de la période d'observation restant à courir ou la prolonger pour une durée maximale de 6 mois.
Aucune durée minimale de la période d'observation n'est imposée par les textes. D'ailleurs, à tout moment, avant l'expiration de la durée qu'il a fixée, le tribunal peut mettre fin à la période d'observation.
Durée maximale de la période d'observation
Durée maximale de la période d'observation d'une procédure de sauvegarde
La période d’observation d’une procédure de sauvegarde pouvait, jusqu’au 30 septembre 2021, faire l’objet d’un premier renouvellement de 6 mois puis d’un autre renouvellement – de 6 mois également – à la demande du Procureur de la République. Au final, la période d’observation pouvait durer jusqu’à 18 mois.
Pour les procédures de sauvegarde ouvertes depuis le 1er octobre 2021, la période d’observation initiale de 6 mois ne peut être renouvelée qu’une seule fois, et pour une durée maximale de 6 mois.
Le Procureur ne peut plus demander une prolongation supplémentaire de 6 mois, possibilité désormais réservée au redressement judiciaire. La période d’observation d'une procédure de sauvegarde ne peut donc pas excéder 12 mois.
Dans le cas où le tribunal a ouvert une procédure de sauvegarde accélérée, la durée de la période d'observation est limitée à 3 mois.
Durée maximale de la période d'observation d'une procédure de redressement judiciaire
Dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire, la période d'observation a une durée maximale de 6 mois mais le Tribunal a la possibilité de la renouveler une fois à la demande de l'entreprise, de l'administrateur ou du ministère public.
Ce dernier peut, en outre, à titre exceptionnel, demander une prolongation supplémentaire pour une durée de 6 mois.
La période d'observation se termine :
- lorsqu'un plan de redressement, de continuation ou de cession est adopté,
- le jour de la conversion d'une procédure de sauvegarde ou de redressement en liquidation judiciaire,
- le jour de la clôture de la procédure s'il apparaît que l'entreprise en difficulté dispose de sommes suffisantes pour payer les créanciers et régler les frais.
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Quelles sont les conséquences de la période d'observation sur l'entreprise ?
1. Un nouveau compte bancaire est ouvert
L'ouverture d'un nouveau compte bancaire au sein du même établissement bancaire s'impose pour faciliter le respect de l'interdiction de paiement des dettes antérieures.
Cette ouverture peut prendre de quelques heures à plusieurs semaines, en fonction de la réactivité de la banque et de son implication auprès de l'entreprise en difficulté.
Ce nouveau compte bancaire mentionnera devant ou après le nom du titulaire le terme RJ pour redressement judiciaire ou SV pour sauvegarde, et sur lequel la position créditrice sera transférée.
L'entreprise se verra remettre un nouveau chéquier, une nouvelle carte bancaire et ses terminaux de paiement devront être rattachés au nouveau compte bancaire.
Parallèlement, l'ancien compte bancaire doit rester ouvert pour recevoir les virements déjà domiciliés par les clients de l'entreprise en difficulté.
Théoriquement, la banque ne peut pas refuser le maintien de l'ancien compte, même sous couvert de l'ouverture d'un nouveau numéro sur lequel il faudra transférer les prélèvements, virements et paiements effectués par le terminal de paiement ou de la nécessité d'ajouter la signature de l'administrateur judiciaire à celle du dirigeant en cas de mission d'assistance (Cass com 4 juin 2013 n°12-17203).
Comme tous les contrats en cours, la convention de compte est poursuivie dans des conditions identiques, même si, pour des raisons pratiques, la banque maintient le compte sous un nouveau numéro.
2. L'entreprise en difficulté continue son activité normalement
Au cours de la période d'observation, l'entreprise poursuit son activité habituelle.
La poursuite de l'activité durant la période d'observation impose à l'entreprise en difficulté, sous peine de conversion de la procédure en liquidation judiciaire :
- de payer à leur échéance normale les créances nées pour les besoins de la poursuite de l'activité ;
- de ne pas créer de nouvelles dettes.
Les contrats en cours se poursuivent normalement mais il arrive que certains cocontractants refusent d'exécution leurs obligations du seul fait de l'ouverture de la procédure, et en infraction avec la loi. L'article L 622-13 du Code de commerce prévoit en effet le maintien des contrats en cours.
Dans la majorité des cas, un simple appel téléphonique expliquant les règles applicables lors d'une procédure collective suffit pour les faire revenir à la raison. Parfois, une mise en demeure de respecter l'article L 622-13 du Code de commerce s'impose.
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3. Un inventaire des actifs de l'entreprise en difficulté est réalisé
Dès le prononcé du jugement d'ouverture de la procédure collective, le commissaire-priseur, le notaire, le commissaire de justice ou encore un courtier en marchandises assermenté effectue un inventaire des actifs de l'entreprise.
A défaut, le dirigeant doit établir lui-même l'inventaire qui devra être certifié par un commissaire aux comptes ou attesté par un expert-comptable.
L'inventaire consiste essentiellement en l'énumération, la description et l'évaluation de tous les biens de l'entreprise en difficulté et éventuellement des garanties qui les grèvent (hypothèque, par exemple) : véhicules, machines, ordinateurs, outils, mobilier.
Tous les biens figurant dans cet inventaire sont protégés. Ils ne pourront donc plus être saisis par les créanciers de l'entreprise ou détournés par ses dirigeants.
Certains actifs pourront être cédés pour aider à redresser l'entreprise en difficulté. En cas de liquidation judiciaire, tout sera vendu aux enchères afin d'aider à payer les créanciers.
4. L'entreprise ne doit plus payer les dettes nées avant le jugement d'ouverture
L'entreprise en difficulté a l'interdiction de régler une dette dont le fait générateur est antérieur à la date du jugement d'ouverture. Procéder au règlement de l'une d'entre elles est un délit pénalement répréhensible.
Le fait générateur d'une dette correspond à la date à laquelle la prestation ou la livraison a été effectivement réalisée, et non à celle de l'édition de la facture.
Pour les procédures collectives ouvertes depuis le 1er octobre 2021, le juge commissaire peut cependant autoriser, au cours de la période d'observation, l'entreprise en sauvegarde à payer les factures des transporteurs.
Le gel du passif ne concerne que les dettes antérieures à la procédure collective. L'article L. 622-17 du Code de commerce impose le paiement à l'échéance des dettes nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie à l'entreprise.
5. L'entreprise en difficulté peut engager des licenciements économiques
Pendant la période d'observation, seuls les licenciements économiques ayant un caractère urgent, indispensable et inévitable peuvent être prononcés.
Après information des représentants du personnel, ils doivent être autorisés par le juge commissaire, qui fixe le nombre de salariés licenciés et leur activité.
Rappelons que durant la période d'observation, les élections des représentants du personnel doivent continuer à se tenir.
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Quelles sont les conséquences de la période d'observation pour le dirigeant de l'entreprise ?
1. Un professionnel peut surveiller ou assister le dirigeant
Au cours de la période d'observation, le dirigeant de l'entreprise en difficulté poursuit en principe son activité :
- soit seul (en l'absence d'un administrateur judiciaire),
- soit sous la surveillance d'un administrateur judiciaire (en cas de sauvegarde),
- soit avec son assistance (en cas de redressement judiciaire), l'administrateur judiciaire ayant parfois une mission d'administration directe de l'entreprise.
Pendant la période d'observation, le dirigeant est généralement accompagné par un administrateur judiciaire dans ses actes de gestion, mais pas obligatoirement.
En présence d'un administrateur judiciaire
En présence d'un administrateur judiciaire, les pouvoirs du dirigeant dépendront de la nature de la mission confiée à l'administrateur.
L'administrateur judiciaire représente les intérêts de l'entreprise en difficulté et va chercher des solutions pour la redresser, face au mandataire judiciaire qui représente pour sa part les créanciers.
Il peut, par exemple, accompagner le dirigeant dans la restructuration de son entreprise, notamment s'il doit réaliser plusieurs licenciements au sein de ses équipes.
L'administrateur judiciaire est un auxiliaire de justice rémunéré par l'entreprise en difficulté selon un barème réglementaire.
En l'absence d'un administrateur judiciaire
En l'absence d'administrateur judiciaire, le dirigeant reste à la tête de son entreprise, décide et met en œuvre tous les actes nécessaires à la gestion courante de l'entreprise :
- choix des achats, commandes ;
- gestion des paiements des créances nées pour les besoins de la poursuite de l'activité ;
- négociation de l'application des conditions générales de vente ;
- commercialisation de ses produits ;
- paiement des salaires et prélèvement de la retenue à la source destinée aux impôts ;
- choix du maintien ou non des contrats en cours (selon une procédure spécifique).
Cependant, la liberté de gestion du dirigeant durant la période d'observation se limite aux seuls actes habituels et nécessaires à la gestion quotidienne de l'activité.
Les actes de disposition étrangers à la gestion courante de l'entreprise en difficulté (par exemple résiliation du bail des locaux d’exploitation, investissements nouveaux, constitution de nouvelles garanties, transactions, etc.) doivent, pour être valables, être autorisés par le juge commissaire.
En cas de doute, il est indispensable de consulter son avocat ou les organes de la procédure sur la nature de l'acte projeté.
2. Un bilan économique, social et environnemental doit être réalisé
L'administrateur judiciaire est chargé, en collaboration avec le dirigeant, de faire un bilan sur la situation globale de l'entreprise en difficulté.
A cette fin, l'administrateur judiciaire va analyser :
- le contexte économique et les perspectives d'avenir de l'entreprise,
- la structure des coûts, des frais de personnel et de fonctionnement,
- le carnet de commande et les clients existants,
- le niveau de la concurrence.
Pour cela, il prend en compte l'état des dettes mais aussi des contrats en cours et des encaissements à venir.
Une fois réalisé, le bilan économique, social et environnemental devient un support de travail pour établir un plan de sauvegarde ou de redressement.
3. Le dirigeant de l'entreprise continue d'être rémunéré
Depuis l'entrée en vigueur de la loi Pacte, la rémunération du chef d'entreprise est maintenue durant la période d'observation, même en cas de redressement judiciaire.
L'administrateur judiciaire peut toutefois demander au juge-commissaire de la modifier.
4. Les parts ne peuvent plus être cédées librement
Dans le cadre d'une procédure de sauvegarde, les parts peuvent être cédées librement.
Dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire, les parts sociales, titres de capital ou valeurs mobilières donnant accès au capital ne peuvent être cédés, à peine de nullité, que dans les conditions fixées par le tribunal.
En conséquence, il faut porter à la connaissance du tribunal toute opportunité de cession.
Quels sont les évènements qui jalonnent la période d'observation ?
Les différents organes de la procédure effectuent un contrôle rapproché de l'entreprise en difficulté, qui constitue l'une des contreparties des effets protecteurs de la procédure.
La période d'observation est jalonnée par un certain nombre d'actes et évènements liés à la procédure :
- le premier rendez-vous avec le mandataire judiciaire représentant des créanciers ;
- lorsqu'il en a été désigné un, les rendez-vous et échanges avec l'administrateur judiciaire ;
- l'inventaire des biens de l'entreprise ;
- les éventuelles actions en revendication notamment de la part de créanciers titulaires d'une clause de réserve de propriété ou d'un contrat publié ;
- la procédure de vérification des créances, une fois les déclarations de créances réceptionnées ;
- les différentes audiences dont la fréquence varie en fonction des procédures, des tribunaux et de la durée de la période d'observation et de ses éventuels renouvellements et prolongations successifs ;
- les éventuelles requêtes auprès du juge commissaire.
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