Comment fixer et réviser le loyer d'un bail commercial ?

Rédigé par Roxane Hidoux

Le loyer initial d'un bail commercial est libre. Des règles spécifiques s'appliquent en revanche lors de la révision triennale ou du renouvellement du bail commercial.

Sommaire :

Comment fixer le loyer initial d'un bail commercial ?

Lors de la conclusion du bail commercial, le bailleur et le locataire peuvent négocier librement le montant du loyer et ses modalités de paiement. Le bailleur n'est pas tenu par le loyer du locataire précédent ou par des loyers de référence.

Le loyer initial d'un bail commercial peut être fixé de plusieurs façons :

  • il peut être fixé forfaitairement,
  • il peut être déterminé par un pourcentage du chiffre d'affaires réalisé par le locataire,
  • il peut être révisé automatiquement, à des échéances déterminées.

Un " pas-de-porte " ou un " droit d'entrée " peut aussi venir s'ajouter. C'est une somme versée par le locataire en une ou plusieurs fois, lors de la conclusion du bail.

Le locataire peut-il faire réduire un loyer initial jugé surévalué ?

Le locataire ne peut pas demander au juge la réduction d'un loyer qu'il estimerait excessif, la fixation du loyer initial d'un bail commercial relevant de la liberté contractuelle.

Un loyer excessif pourra toutefois retrouver un niveau égal à la valeur locative à l'occasion de la révision triennale ou du renouvellement du bail commercial.

Le loyer commercial fixe

La plupart du temps, le loyer du bail commercial est fixé en fonction de la valeur locative des locaux, forfaitairement, c'est-à-dire sans référence à la surface louée, ni à la méthode utilisée.

En pratique, le montant du loyer commercial est fixé par le bailleur et dépend :

  • de la situation géographique du local. Le fait que le local soit situé dans une grande métropole ou une petite agglomération, un centre-ville ou en périphérie, à proximité d'autres commerces ou d'un moyen de transport, en façade d'immeuble ou en fond de cour va influer grandement sur le montant du loyer ;
  • de la nature des activités autorisées par le bail. Le loyer d'un bail " tous commerces " est plus élevé que celui d'un bail réservé à une seule activité. Avec un bail tous commerces, le locataire est en effet libre de changer d'activité dans les lieux sans que cela ne conduise à une majoration ou à un déplafonnement du loyer ;
  • des contraintes mises à la charge du locataire, comme la réalisation des grosses réparations.

Le montant du loyer commercial peut cependant être plus élevé que la valeur locative, parce que le bailleur estime que l'immeuble ou l'emplacement contribuent à l'image de marque du locataire.

Le loyer commercial déterminé par un pourcentage du chiffre d'affaires

La clause recettes permet au bailleur de faire varier le montant du loyer commercial en fonction du chiffre d'affaires du locataire. C'est une pratique courante pour les commerces implantés en centre-ville ou dans les centres commerciaux.

Il existe 2 types de clause recettes :

  • la clause recettes pure et simple : le loyer commercial est calculé uniquement en fonction d'un pourcentage du chiffre d'affaires HT réalisé par le locataire durant la période prévue ;
  • la clause recettes binaire : elle combine une partie fixe (loyer commercial de base ou loyer minimum garanti) et une partie variable variant selon les recettes réalisées par le locataire. Cette dernière partie peut elle-même comporter des paliers ou prévoir plusieurs pourcentages dégressifs ou progressifs.

Le loyer commercial automatiquement révisé

La clause d'échelle mobile (ou clause d'indexation) organise, à des échéances déterminées, la révision automatique du loyer commercial en fonction, du prix d'une denrée, d'un service ou bien encore d'un indice économique ou monétaire, etc.

L'indice de réévaluation peut être :

  • l'ILC (indice des loyers commerciaux) pour les activités commerciales,
  • l'ILAT (indice des loyers des activités tertiaires) pour les activités libérales et tertiaires (bureaux, cabinets médicaux ou d'architecte, entrepôts logistiques..).

La loi Pinel du 18 juin 2014 a supprimé la possibilité de se référer à l'ICC.

Il s'applique généralement à la totalité du loyer commercial, mais peut également ne concerner qu'une partie de celui-ci.

En cas d'oubli de révision du loyer commercial, le bailleur peut remonter jusqu'à 5 ans an arrière.

Attention : est nulle la clause d'indexation qui exclut la réciprocité de la variation et stipule que le loyer commercial ne peut être révisé qu'à la hausse.

Plafonnement temporaire de la variation annuelle de l’ILC

La loi pouvoir d'achat plafonne la revalorisation des loyers commerciaux pendant 1 an pour les baux conclus avec des entreprises de moins de 250 salariés dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 50 millions d'euros (ou dont le bilan annuel n’excède pas 43 M€).

Il est ainsi prévu que la variation de l’indice ILC ne peut excéder 3,5 % pour les trimestres compris entre le deuxième trimestre 2022 et le premier trimestre 2024.

Une foire aux questions est a été mise à disposition des entreprises par la Direction Générale des Entreprises (DGE).

A noter : le plafonnement de l’ILC ne s’applique pas aux contrats dont les révisions de loyer sont encadrées par d’autres indices.

Comment réviser le loyer d'un bail commercial ?

Lorsqu'aucune clause de révision n'est prévue dans le bail, tous les 3 ans, le bailleur comme le locataire a le droit de demander la révision du loyer du bail commercial.

À la différence du loyer initial que les parties sont libres de fixer librement, la révision triennale du loyer commercial est strictement réglementée.

Le bail commercial peut aussi prévoir une clause d'indexation automatique et dans ce cas les règles de la révision triennale ne s'appliquent pas.

Le loyer commercial révisé est basé sur la variation d'un indice

Le bailleur doit normalement appliquer la hausse correspondant à la variation de l'indice trimestriel de référence stipulé dans le bail commercial :

  • l'indice trimestriel des loyers commerciaux (ILC) pour les activités commerciales ou artisanales,
  • l'indice des loyers des activités tertiaires (Ilat) pour les autres activités.

C’est INSEE qui se charge du calcul et de la diffusion de ces indices chaque trimestre :

  • voir le montant de l'ILC
  • voir le montant de l'Ilat

Le loyer commercial révisé se calcule de la façon suivante : loyer précédent x (dernier indice de référence connu / indice de référence des loyers en vigueur lors de la conclusion du bail / dernière fixation de loyer).

En pratique, le bailleur doit :

  1. Reprendre le montant du loyer actuel hors charges
  2. Multiplier ce montant par le dernier indice connu (respecter le trimestre indiqué dans le bail)
  3. Diviser le résultat par l'indice en vigueur lors de la conclusion du bail commercial ou de la dernière fixation de loyer

Exemple de calcul

Un bail commercial a été signé en juin 2008 avec un loyer mensuel de 500 € et avec l'ILC pour indice de référence.

En juin 2011, la première révision de loyer intervient. Le dernier indice publié à la date de signature du bail commercial est celui du 1er trimestre 2008, soit 100. Le nouvel indice publié à la date de révision est celui du 1er trimestre 2011, soit 104,44.

Le nouveau loyer doit être calculé de la manière suivante : 500 € x (104,44/ 100) = 522,22 €

Le loyer commercial révisé est basé sur la variation de la valeur locative

Le bailleur a la possibilité d'écarter ce plafonnement et de demander au locataire une augmentation plus importante s'il démontre qu'une modification matérielle des facteurs locaux de commercialité (c'est-à-dire de la commercialité du quartier) a entraîné, depuis la conclusion du bail commercial ou la dernière révision, une variation de plus de 10 % de la valeur locative des locaux.

La valeur locative correspond au niveau de loyer annuel théorique que le local commercial pourrait produire s'il était loué. En cas de désaccord des parties, pour déterminer cette valeur locative, il faut prendre en compte :

  • les caractéristiques du local considéré ;
  • la destination des lieux ;
  • les obligations respectives des parties ;
  • les facteurs locaux de commercialité ;
  • les prix couramment pratiqués dans le voisinage.

La difficulté est que ces éléments ne sont pas accessibles au public et qu'aucun registre ou barème public n’existe. C'est pourquoi, il est conseillé de se tourner vers :

  • les revues spécialisées en baux commerciaux ;
  • les décisions de justice ;
  • les comptes-rendus des observatoires privés des loyers judiciaires des locaux commerciaux ;
  • les revues spécialisées dans les décisions rendues par les chambres des loyers commerciaux des tribunaux, etc.

Comment augmenter le loyer d'un bail commercial renouvelé ?

L'augmentation du loyer d'un bail commercial renouvelé est possible

Le bailleur a la possibilité d'augmenter le montant du loyer d'un bail commercial renouvelé, s'il respecte les 2 étapes suivantes :

  1. Envoyer un congé avec offre de renouvellement au locataire, 6 mois avant la fin du bail commercial.
  2. Proposer au locataire un nouveau bail commercial avec un loyer modifié.

Si le locataire refuse le nouveau loyer proposé ou ne répond pas, tout en acceptant le renouvellement du bail commercial, il est possible de saisir la Commission départementale de conciliation des baux commerciaux.

Celle-ci va faire en sorte que le bailleur et le locataire trouvent un terrain d'entente et, en cas d'accord sur un nouveau loyer commercial, un acte est dressé, signé par chacune des parties, ayant force obligatoire.

A défaut d'accord, le bailleur ou le locataire doit saisir le Tribunal judiciaire. Le juge fixera le loyer du bail renouvelé rétroactivement à compter de la date de renouvellement du bail commercial.

Par conséquent, si son montant est supérieur au précédent loyer commercial, le locataire devra verser au bailleur la différence. Si le nouveau loyer est inférieur au loyer précédent, le bailleur devra rembourser le trop-perçu.

Lorsqu'un bail commercial a été renouvelé « aux mêmes clauses et conditions », le loyer reste identique, de sorte que la demande ultérieure en fixation du loyer du bail renouvelé ne pourra qu'être rejetée (Civ. 3e, 15 avr. 2021).

Le loyer d'un bail commercial renouvelé est plafonnée

Le loyer d'un bail commercial renouvelé doit correspondre à la valeur locative des locaux, mais dans la limite d'un plafonnement résultant de la variation de l'indice retenu, intervenue depuis la dernière fixation du loyer :

  • l'ILC (indice des loyers commerciaux) pour les activités commerciales,
  • l'ILAT (indice des loyers des activités tertiaires) pour les activités libérales et tertiaires (bureaux, cabinets médicaux ou d'architecte, entrepôts logistiques..).

Le calcul du plafonnement doit être réalisé à partir du loyer initial fixé du bail commercial et non pas du loyer issu de la révision légale si une telle révision est intervenue en cours de bail.

Le loyer d'un bail commercial renouvelé peut être déplafonné

Le loyer commercial peut être augmenté et déplafonné s'il y a eu en cours de bail une modification importante des caractéristiques du local, de la destination des lieux, des obligations des parties ou des facteurs locaux de commercialité (exemple : agrandissement de la terrasse extérieure).

Modifications pouvant conduire au déplafonnement du loyer

Le plafonnement du loyer du bail commercial renouvelé est écarté lorsque :

  • la surface des locaux a été modifiée au cours du bail (par exemple, une partie des lieux a été reprise par le propriétaire) ;
  • le locataire a apporté des améliorations au local. Mais celles-ci ne pourront être prises en compte que si le bailleur en a supporté directement ou indirectement (loyer plus réduit) la charge ;
  • le locataire a adjoint à son activité initiale une activité connexe ou complémentaire, ou a changé d'activité.

La modification doit s'être produite au cours du bail qui vient d'expirer ou, au plus tard, à la date de prise d'effet du nouveau bail. Une modification antérieure au renouvellement n'entraîne pas de déplafonnement du loyer du bail commercial renouvelé.

Mais attention : il n'est pas nécessaire que cette modification entraîne une variation de plus de 10 % de la valeur locative ; il suffit qu'elle entraîne une hausse de la valeur locative, quelle qu'elle soit.

Il y a aussi déplafonnement du loyer commercial lorsque :

  • le bail commercial qui vient à échéance avait une durée supérieure à 9 ans ;
  • le bail commercial est renouvelé pour une durée supérieure à 9 ans ;
  • le bail commercial qui vient à échéance s'est poursuivi tacitement au-delà de 12 ans.

La loi Pinel du 18 juin 2014 a instauré un lissage de l'augmentation des loyers déplafonnés à hauteur de 10 % par an. Mais, l'article L 145-34 du Code de commerce, qui met en place le mécanisme de lissage des loyers commerciaux, n'est pas d'ordre public. Le bail commercial peut donc comporter une clause excluant son application.

Que faire lorsque la hausse de loyer est trop importante ?

Le déplafonnement du loyer du bail commercial renouvelé peut déboucher sur une hausse importante de loyer, spécialement lorsque le mécanisme de lissage ne s'applique pas.

Dans cette situation, le locataire devra donc :