Le liquidateur amiable : nomination, missions et responsabilité

Le liquidateur amiable est chargé de la réalisation des opérations de liquidation d'une société en cours de dissolution.

Quand la désignation d'un liquidateur amiable est-elle obligatoire ?

La désignation d'un liquidateur est obligatoire pour dissoudre à l'amiable une société (SARL/EURL, SAS/SASU...).

En effet, bien que la dissolution de la société mette fin aux fonctions du dirigeant, elle ne permet pas de mettre définitivement fin à la société.

Non seulement les opérations de liquidation ne peuvent pas être effectuées par les associés eux-mêmes, mais elles ne peuvent avoir lieu à défaut de désignation d’un liquidateur.

La dissolution amiable n'est possible que lorsque la société n'est pas en cessation des paiements.

Comment choisir le liquidateur amiable ?

Le liquidateur amiable est généralement désigné à l’avance par les statuts, la clause la plus usuelle étant « A la dissolution de la société, les fonctions de liquidateur seront remplies par le gérant en exercice au moment de la dissolution. ».

Si le liquidateur amiable n'est pas désigné par les statuts, les associés doivent procéder à la désignation du liquidateur au cours de l'assemblée générale décidant la dissolution de la société.

Les associés peuvent désigner comme liquidateur amiable :

  • le dirigeant de la société,
  • un associé,
  • un tiers.

Contrairement à ce qui est prévu en cas de liquidation judiciaire, le liquidateur amiable n'a pas à être choisi sur une liste établie par une commission régionale instituée au siège de chaque cour d'appel.

Il est possible de désigner plusieurs liquidateurs, sauf si les statuts de la société l'interdisent. Sauf si l'acte de nomination prévoit le contraire, ils exerceront leurs fonctions séparément mais devront remettre un rapport commun aux associés.

Si les associés n'arrivent pas à tomber d'accord, le liquidateur amiable sera désigné par le tribunal de commerce, à la demande de tout intéressé.

Le liquidateur amiable ne peut pas être :

  • une personne ayant fait l'objet d'une interdiction de diriger, de gérer ou d'administrer une entreprise,
  • une personne qui envisage d'acheter des biens appartenant à la société (ou l’un de ses proches).

Le liquidateur amiable doit-il être rémunéré ?

La rémunération du liquidateur amiable est normalement fixée par la décision de nomination.

Son montant est fixé librement mais, s'il ne correspond pas à un travail effectif, il sera possible de saisir le juge pour qu'il en modifie le montant.

Si la décision de nomination ne fixe pas la rémunération du liquidateur amiable de la société, elle est fixée, à la demande de celui-ci, par le président du tribunal de commerce.

Quelles sont les missions du liquidateur amiable ?

Représentation légale de la société

Dès sa désignation, le liquidateur amiable a seul qualité pour agir au nom de la société. Le ou les dirigeants perdent leurs pouvoirs d'administration et de représentation de la société.

Ainsi, l'ancien dirigeant n'a plus le pouvoir de convoquer l'assemblée générale des associés. Une telle assemblée encourt l'annulation, sauf si tous les associés étaient présents ou représentés.

Continuation des affaires sociales en cours

Contrats en cours

Le liquidateur amiable a la possibilité de continuer les contrats en cours, ou d'en conclure des nouveaux, si :

  • la conclusion est nécessaire pour les besoins de la liquidation de la société,
  • le liquidateur a obtenu l'autorisation des associés.

En cas d'inaction du liquidateur amiable, tout intéressé peut demander la désignation d'un mandataire par le président du tribunal de commerce.

Actes conservatoires

Le liquidateur amiable est également habilité à procéder à des actes conservatoires, destinés à conserver l'actif social de la société :

En cas d'inertie du liquidateur amiable, le dirigeant de la société ou un associé pourra effectuer lui-même ces actes.

Actions en justice

Le liquidateur amiable est le seul habilité à représenter la société en justice.

Il peut ainsi engager une action en justice contre un tiers ou contre un associé, notamment lorsque ce dernier n'a pas rempli envers la société les obligations dont il est tenu (réalisation d'une avance en compte courant, libération d'un apport...).

Il peut également représenter la société lorsque celle-ci est mise en cause par un tiers.

En cas d'inaction du liquidateur amiable, il est seulement possible de demander son remplacement.

Réalisation de l'actif social de la société

La réalisation de l'actif social consiste essentiellement à vendre les actifs de la société.

Dans ce cadre, la loi attribue au liquidateur de larges pouvoirs :

  • il peut diligenter seul la vente de meubles ou d'immeubles,
  • il peut choisir, plutôt que de vendre, de mettre en gage ou de nantir un meuble ou un immeuble,
  • il peut décider que la vente aura lieu aux enchères ou à l'amiable...

La loi a néanmoins introduit certaines limitations pour que la vente ne se fasse pas au détriment des créanciers de la société ou des associés.

Règlement du passif social de la société

Le liquidateur amiable doit payer les créanciers de la société dans l'ordre dans lequel ils se présentent. Mais il doit veiller à désintéresser les créanciers sociaux avant les associés.

Il reste néanmoins tenu de respecter une certaine égalité entre les créanciers de la société, sous peine d'engager sa responsabilité. Ces derniers ne peuvent d'ailleurs pas exiger un remboursement anticipé de leurs créances.

Sauf si l'acte de nomination ou les statuts de la société l'interdisent, le liquidateur amiable peut également verser aux créanciers des acomptes en cours de liquidation.

Représentation des créanciers de la société

En principe, le liquidateur amiable n'a pas le pouvoir de réclamer aux associés de la société le règlement des dettes de la société en dehors de leur apport.

Toutefois, rien n'empêche les créanciers qui y consentent de l'investir du mandat de les représenter.

Combien de temps dure le mandat d'un liquidateur amiable ?

A défaut de durée précisée lors de sa désignation, les fonctions du liquidateur amiable prennent fin à l'expiration d'un délai de 3 ans.

A la fin de ce délai, le mandat du liquidateur amiable peut être renouvelé par les associés de la société. Si ces derniers n'ont pu être réunis pour statuer sur le renouvellement, le mandat pourra être renouvelé par décision de justice, à la demande du liquidateur.

Il arrive également que le liquidateur amiable cesse prématurément ses fonctions, notamment lorsqu'il est révoqué par les associés de la société.

Pour être valable, la révocation doit reposer sur un juste motif, par exemple une faute du liquidateur dans l'accomplissement de sa mission, une mésentente entre le liquidateur et les associés ou une perte de confiance en la personne du liquidateur.

Quelles sont les obligations du liquidateur amiable ?

Afin de protéger les associés de la société, la loi contraint le liquidateur amiable à procéder à certaines tâches et à réunir les associés.

Obligations du liquidateur de la société lors de l'entrée en fonction

Publication de la nomination de la société

Le liquidateur amiable est tenu de procéder à la publication de son acte de nomination dans le délai de 1 mois suivant sa nomination.

Réalisation d'un inventaire des éléments de l'actif et du passif social

En plus de procéder à un inventaire des éléments de l'actif et du passif social, le liquidateur amiable de la société doit :

  • se faire délivrer par l'ex-dirigeant un compte de gestion détaillé et les livres comptables,
  • fournir une caution, si l'acte de nomination lui impose cette obligation,
  • requérir la levée des scellés, s'il en a été apposé à la requête des créanciers ou des associés eux-mêmes.

Obligations du liquidateur de la société lors de la phase de liquidation

Information des associés de la société

Dans le silence des statuts et des conventions conclues entre les associés, le liquidateur amiable est tenu de rendre périodiquement compte aux associés de la situation de la société et du déroulement des opérations de liquidation, de les convoquer en assemblée générale et de leur communiquer certains documents sociaux.

Il doit notamment :

  • établir les comptes annuels ainsi qu'un rapport écrit rendant compte des opérations de liquidation,
  • convoquer l'assemblée générale annuelle selon les modalités prévues par les statuts, au moins une fois par an et dans les 6 mois de la clôture de l'exercice,
  • communiquer les documents sociaux dans les mêmes conditions qu'antérieurement.

Information des tiers

Le liquidateur amiable est tenu d'accomplir, à la place du dirigeant de la société, les formalités de publicité consécutives aux modifications statutaires.

Un liquidateur amiable peut-il engager sa responsabilité ?

Tout comme celle du dirigeant qu'il remplace, la responsabilité du liquidateur amiable peut être civile, pénale voire fiscale.

Responsabilité civile du liquidateur amiable

L'action en responsabilité civile contre le liquidateur amiable peut être engagée jusqu'à 3 ans à compter de la manifestation du dommage ou, s'il a été dissimulé, à compter de sa révélation. Passé 3 ans, l'action est prescrite.

Fautes commises dans l'exercice de ses fonctions de mandataire

Le liquidateur amiable répond de ses fautes personnelles à l'égard de la société, des associés et des tiers, généralement les créanciers.

En pratique, la responsabilité civile du liquidateur amiable est souvent retenue lorsque le liquidateur amiable est un ancien dirigeant, en même temps associé, car il a tendance à désavantager les créanciers au profit des associés.

La mauvaise gestion des affaires sociales est également fautive :

Il faut noter que le quitus de gestion reçu de l'assemblée générale ne remet pas en cause le droit d'agir en responsabilité contre le liquidateur amiable, que l'action émane des associés ou des tiers.

En revanche, il semble que le quitus soit exonératoire de responsabilité vis-à-vis de la société, dans la mesure où il concerne des faits révélés à l'assemblée et expressément approuvés par les associés.

Absence de paiement des créanciers

Les exemples de fautes commises par le liquidateur amiable à l'égard des tiers sont nombreux :

  • règlement de toutes les créances sauf une seule, bien que le liquidateur amiable en connaissait l'existence,
  • dissimulation de la situation réelle de la société,
  • omission d'informer un fournisseur que la société est en liquidation,
  • refus de fournir des renseignements sur les conditions de réalisation de l'actif et sur les règlements déjà effectués aux créanciers...

La clôture prématurée de la liquidation peut également être considérée comme fautive. C'est notamment le cas lorsque :

  • le liquidateur s'est abstenu d'inclure une créance dans les comptes de liquidation,
  • le liquidateur n'a pas constitué de provision pour garantir le paiement d'une créance litigieuse alors que la société était en litige avec un tiers,
  • le liquidateur a omis de résilier un contrat pour échapper à une indemnité de résiliation et éviter la restitution du matériel loué...

Responsabilité pénale du liquidateur amiable

Non-respect de l'interdiction d'exercer les fonctions de liquidateur amiable

Le fait de contrevenir à l'interdiction d'exercer les fonctions de liquidateur amiable est puni d'un emprisonnement de 2 ans et d'une amende de 9 000 euros.

Absence de publicité

L'absence de publication de son acte de nomination dans le délai de 1 mois ainsi que le défaut de convocation des associés à l'assemblée de clôture de liquidation est sanctionné d'un emprisonnement de 6 mois et d'une amende de 9 000 euros.

Manquements aux obligations informatives et comptables

Est puni d'une peine de 6 mois d'emprisonnement et de 9 000 euros d'amende le fait :

  • de ne pas présenter, dans les 6 mois de sa nomination, un rapport sur la situation active et passive, sur la poursuite des opérations de liquidation, ni sollicité les autorisations nécessaires pour les terminer,
  • de ne pas avoir établi, dans les 3 mois de la clôture de chaque exercice, les comptes annuels ainsi qu'un rapport écrit dans lequel il rend compte des opérations de liquidation effectuées au cours de l'exercice écoulé,
  • de ne pas avoir déposé, dans le délai de 15 jours à compter de la décision de répartition, les sommes affectées aux répartitions entre les associés et les créanciers, ou de ne pas avoir déposé à la Caisse des dépôts et des consignations les sommes non réclamées.

Abus de biens sociaux

Le liquidateur amiable qui fait des biens ou du crédit de la société, un usage qu'il sait contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société dans laquelle il est intéressé directement ou indirectement commet un abus de bien sociaux.

L'abus de bien sociaux est puni d'un emprisonnement de 5 ans et de 9000 euros d'amende.

Cession de tout ou partie de l'actif à des personnes non autorisées

Le liquidateur amiable a interdiction d'effectuer des cessions directes ou indirectes de tout ou partie de la société en liquidation à lui-même ou à ses employés ainsi qu'à leurs conjoints, ascendants et descendants.

A défaut, il encourt une peine de 5 ans d'emprisonnement et de 9000 euros d'amende.

Responsabilité fiscale du liquidateur amiable

Le liquidateur amiable qui, en présence d'une comptabilité manifestement irrégulière, a procédé à la clôture de la liquidation prématurément, sans avoir accompli ses obligations déclaratives et sans avoir sauvegardé les droits de l'administration fiscale, peut être condamné au paiement du montant des impôts éludés.

Par ailleurs, le liquidateur amiable qui procède à des distributions aux associés, sans avoir vérifié que les impôts ont bien été payés, peut être condamné à les payer à titre personnel.