La cession d'activité peut permettre de sauver une entreprise en difficultés, malgré l'ouverture d'une procédure collective.
Pour réaliser une cession d'activité (ou une cession d'entreprise), il faut élaborer un plan de cession qui doit être arrêté par le tribunal. Il peut être précédé d'une période de location-gérance mais doit être élaboré selon les modalités fixées par le tribunal.
La cession d'entreprise ou plan de cession peut intervenir lors de la procédure de sauvegarde (mais elle ne peut être que partielle), lors de la procédure de redressement judiciaire à défaut d'un plan de redressement crédible, ou lors de la procédure de liquidation judiciaire, lorsque le Tribunal a autorisé la poursuite d'activité à cette fin.
Le repreneur dépose alors une offre de reprise auprès de l'administrateur ou, à défaut, du liquidateur.
Dans le cadre d'une procédure de sauvegarde, le dirigeant de l'entreprise en difficulté doit élaborer un plan.
Il existe deux types de plan :
Contrairement à la procédure de redressement et à la procédure de liquidation judiciaire, la cession d'activité dans le cadre d'une procédure de sauvegarde ne peut être que partielle. Elle ne peut jamais être totale car cette procédure a vocation à sauver des entreprises qui ne sont pas en état de cessation des paiements.
En outre, la décision de céder une partie de l'entreprise appartient uniquement à son dirigeant. Elle ne peut jamais lui être imposée.
Lorsque le dirigeant prend la décision de céder partiellement son entreprise, l'administrateur doit fixer le délai de présentation des offres de reprise.
Dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire, les organes de la procédure doivent élaborer un plan.
Il existe deux types de plan :
La cession de l'entreprise doit être demandée par l'administrateur judiciaire lorsqu'aucun plan de redressement ne peut être obtenu ou si le plan de redressement est insuffisant pour assurer la survie de l'entreprise. La cession est alors ordonnée par le Tribunal.
Les tiers peuvent également présenter spontanément des offres de reprise à l'administrateur, lors de la période d'observation.
Lorsque la cession d'activité est envisagée alors qu'aucun administrateur judiciaire n'a été nommé, le Code de commerce impose sa nomination.
L'administrateur judiciaire est chargé de fixer le délai de présentation des offres, de les recevoir, de procéder à tous les actes nécessaires à la préparation de la cession de l'entreprise et, le cas échéant, à sa réalisation.
Le plan de cession concerne le plus souvent les entreprises faisant l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire.
Lorsque le Tribunal estime que la cession totale ou partielle de l'entreprise est possible, il prononce le maintien provisoire de l'activité et détermine un délai durant lequel les offres de reprise doivent parvenir au liquidateur et à l'administrateur lorsqu'il en a été désigné.
L'avantage du plan de cession est que l'activité est maintenue le temps de recueillir les offres, ce qui permet de valoriser une entreprise en activité, et donc de céder ses contrats et droits attachés à l'activité, et d'ainsi valoriser économiquement son activité, c'est-à-dire son fonds.
Être informé de la défaillance des entreprises représente la principale difficulté pour le racheteur. Les délais fixés par les administrateurs judiciaires sont très courts.
Il existe un site internet qui répertorie les offres de cession d'entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire : CNAJMJ.fr. Les calendriers des audiences et des jugements peuvent être obtenus sur www.infogreffe.fr
Pour éviter les mauvaises surprises et avoir une idée du potentiel de l'entreprise, il est nécessaire d'obtenir des informations détaillées. Cette étape est souvent compliquée car les méthodes traditionnelles d'évaluation sont inopérantes. Le recours à des professionnels est conseillé.
Avantages de la reprise | Inconvénients de la reprise |
---|---|
Éligibilité à de nombreuses aides publiques
Clientèle déjà constituée. En cas de reprise de l'équipement, le repreneur peut commencer à produire dès la reprise. Il peut aussi bénéficier des conseils du cédant Il plus simple d'évaluer le potentiel de développement de l'entreprise, celle-ci disposant déjà de bilans et de comptes de résultats Prise en charge des coûts sociaux de restructuration par l'AGS |
Difficultés pour obtenir de nouveaux produits financiers
Le personnel devra s'adapter à un nouvel employeur et à de nouvelles méthodes d'exploitation, ce qui peut dégrader le climat social Relations d'affaire perturbées |
L'offre de reprise est soumise à des règles strictes :
Dans toutes les procédures collectives, l'offre de reprise doit obligatoirement émaner d'un tiers.
Ne peuvent pas présenter d'offres de reprise :
Les personnes ainsi désignées ne peuvent pas davantage, pendant les 5 années qui suivent la cession, acquérir tout ou partie des biens dépendants, directement ou indirectement, de la liquidation, ainsi que d'acquérir des parts ou titres de capital de toute société ayant dans son patrimoine, directement ou indirectement, tout ou partie de ces biens, ainsi que des valeurs mobilières donnant accès, dans le même délai, au capital de la société.
La violation de cette règle est sanctionnée par la nullité de l'offre qui peut être demandée par le Ministère public et par toute personne intéressée, dans le délai de 3 ans à compter de la conclusion de l'acte.
Les personnes frappées par cette interdiction ont cependant la possibilité d'obtenir une dérogation. Il est alors nécessaire que le Ministère public présente une requête spéciale et que le Tribunal motive spécialement sa décision.
A la lecture des dispositions du Code de commerce, un associé ou un actionnaire ne peut être considéré comme une personne interposée, et donc exclu de la possibilité de formuler une offre, pour ce seul motif.
En revanche, une offre présentée par un associé ou un actionnaire de la société en procédure collective doit être écartée s'il existe des fortes présomptions qu'il soit également dirigeant de fait de cette dernière.
Le dirigeant qui démissionne de ses fonctions avant l'ouverture de la procédure collective peut parfaitement présenter une offre de reprise. La jurisprudence a estimé que le Code de commerce, qui ne prévoyait pas cette hypothèse, est d'appréciation stricte.
Le dirigeant de la société cible peut être salarié dans la société du repreneur sous réserve que les éléments essentiels du contrat de travail soient réunis (lien de subordination, travail effectif et rémunération).
Il a également la possibilité de contracter une promesse unilatérale d'achat au bénéfice du repreneur avec levée de l'option une fois écoulée la durée de 5 ans.
Dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire, l'offre de reprise peut être présentée dès l'ouverture de la procédure. D'ailleurs, la Cour de Cassation a jugé qu'il n'y avait pas lieu d'attendre l'issue de la période d'observation pour ordonner la cession (Cass com 3 mai 2016 n°14-24865).
Dans le cadre d'une procédure de liquidation judiciaire, le délai de remise des offres est fixé par le Tribunal. Mais, dans le cas où des offres ont déjà été présentées au moment de l'ouverture de la procédure, le tribunal peut ne pas fixer de délai ni autoriser la poursuite d'activité. Les offres présentes sont alors examinées et de nouvelles offres sont admises dans les 8 jours qui précèdent l'audience.
L'offre doit être écrite.
Elle doit comporter les indications suivantes :
L'auteur de l'offre doit également y annexer :
Une fois déposée, l'offre de reprise lie son auteur jusqu'à la décision du Tribunal. Elle ne peut donc pas être retirée ou modifiée.
Toutefois, une exception est prévue : l'offre peut être modifiée en un sens plus favorable en vue de maintenir l'activité, l'emploi et d'apurer le passif (plus de salariés sont conservés, le prix est plus élevé).
Cependant, plus aucune modification ne peut être effectuée dans les 2 jours qui précédent la date de l'examen des offres. Toutefois, en cas de renvoi de l'affaire à une audience ultérieure, le Tribunal peut fixer un nouveau délai pour la présentation de nouvelles offres ou l'amélioration des offres préalablement déposées.
De même, en cas d'appel de la décision du Tribunal, le repreneur qui a été choisi ne peut pas modifier son offre. En revanche, ses concurrents évincés recouvrent toute liberté pour présenter d'autres offres.
Chaque offre de reprise doit être adressée à l'administrateur ou au liquidateur judiciaire.
Ce dernier dépose les offres au greffe du tribunal où tout intéressé peut en prendre connaissance.
Le liquidateur informe également informe le dirigeant de l'entreprise, le représentant des salariés ainsi que les créanciers contrôleurs du contenu des offres.
Enfin, si l'entreprise exerce une profession libérale, les offres de reprise doivent être notifiées à l'ordre professionnel ou à l'autorité compétente.
Une audience du Tribunal est fixée pour examiner les offres de reprises.
Lors de cette audience, le Tribunal commence par entendre le dirigeant de l'entreprise en difficulté, les représentants du personnel, les créanciers contrôleurs ainsi que le Ministère public.
Le Tribunal retient l'offre qui permet dans les meilleures conditions d'assurer le plus durablement l'emploi attaché à l'ensemble cédé, le paiement des créanciers et qui présente les meilleures garanties d'exécution.
Il arrête ensuite un plan de cession, voire plusieurs en cas de pluralité d'offres pour des branches autonomes d'activités. Le jugement arrêtant le plan de cession précise les biens et les contrats cédés, en respectant la proposition contenue dans l'offre choisie.
Le contenu du plan de cession est négocié avec le candidat retenu par le Tribunal.
Généralement, le plan de cession :
Le repreneur ne reprend pas le passif de l'entreprise en difficulté. Celui-ci rachète uniquement les moyens de production, le fonds de commerce, le matériel, les murs et les stocks. Il ne récupère pas les créances, les dettes fiscales et sociales ou les emprunts du cédant.
Dès lors, il ne doit assumer que le paiement du prix de cession ainsi que la charge du crédit garanti par un nantissement ou toute forme de sureté immobilière ou mobilière spéciale.
Le repreneur doit, en revanche, assumer les charges et coûts indissociables de la propriété des actifs cédés. Il peut toutefois former une action en responsabilité contre les organes de la procédure si une charge n'aurait pas été portée à sa connaissance.
Modification du plan de cession
Le plan de cession peut être modifié par le repreneur en cas de changements substantiels des moyens et des objectifs.
Cette modification doit être fondée sur une cause apparue après l'arrêté du plan, mais ne peut jamais porter sur le prix de cession.
Le liquidateur ou l'administrateur lorsqu'il en a été désigné passe tous les actes nécessaires à la réalisation de la cession (signature devant un notaire en cas de bien immobilier).
Dans l'attente de la signature des actes de cession, le repreneur peut demander au Tribunal d'assurer, sous sa responsabilité, la gestion de l'entreprise cédée, sur justification de la consignation du prix de cession ou d'une garantie équivalente.
Généralement, la prise de possession se fait au moment du rendu du jugement arrêtant le plan de cession, même si l'acte de cession est régularisé 2 ou 3 mois après.
Le plan de cession peut contenir une période de location-gérance préalable du fonds de commerce, même en présence d'une clause contraire dans le bail de l'immeuble. Cette période doit être autorisée par le Tribunal et ne peut pas excéder 2 ans.
Au terme de la location-gérance, le locataire doit acquérir l'entreprise. Il lui est impossible de faire un essai ou de stipuler qu'il pourra dans certaines conditions reprendre sa liberté.
Lorsque le locataire-gérant ne respecte pas ses obligations ou qu'il ne peut pas acquérir l'entreprise dans les conditions et délais fixés par le plan de cession, le Tribunal peut ordonner la résiliation du contrat de location-gérance, la résolution du plan de cession, et éventuellement le versement de dommages-intérêts.
En outre, si la défaillance du locataire-gérant provient d'une incapacité de financer l'acquisition, elle peut aussi révéler un état de cessation des paiements et justifier l'ouverture d'une procédure collective à son égard.
Révision du plan de cession
Le locataire-gérant peut solliciter du Tribunal la révision des conditions et délais fixés par le plan de cession lorsque les circonstances économiques ou les données d'un marché ont changé.
Le Tribunal doit être saisi avant l'expiration du contrat de location-gérance et après avis du commissaire à l'exécution du plan. Il prend sa décision après avoir recueilli l'avis du ministère public et entendu ou dûment appelé le liquidateur, l'administrateur lorsqu'il en est désigné, les créanciers contrôleurs, les représentants du comité social et économique et toute personne intéressée.
Le Tribunal peut décider de modifier les conditions et délais fixés dans le plan de cession sauf en ce qui concerne le montant du prix et le délai maximal de 2 ans.
Le jugement arrêtant le plan de cession peut faire l'objet d'un appel, initié par :
En revanche, le liquidateur, l'administrateur, les créanciers, les représentants des salariés et les candidats à la reprise dont l'offre n'a pas été retenue ne peuvent pas faire appel.
Le jugement arrêtant le plan de cession est exécutoire, c'est-à-dire qu'il peut être mis en œuvre nonobstant l'exercice d'un recours (il existe des possibilités de suspension d'exécution provisoire).
Ensuite, seul le Ministère public peut introduire un pourvoi en cassation contre l'arrêt rendu par la cour d'appel.