Comment annuler une cession de titres pour vice du consentement ?

Rédigé par Roxane Hidoux

Lorsqu'une cession de titres ne respecte pas les conditions de validité, elle encourt la nullité.

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Pour quels motifs une cession de titres peut-elle être annulée ?

La loi prévoit 3 vices susceptibles d’affecter la validité du consentement donné à la conclusion du contrat :

  • Erreur : une des parties s’est trompée en concluant la cession
  • Dol : une des parties s’est engagée parce qu’elle a été trompée par l’autre
  • Violence : une des parties a accepté la cession par craintes de menaces

L’erreur

L’erreur sur la valeur des titres n’est pas recevable. Autrement dit, l’acquéreur ne peut pas se plaindre d’avoir payé un prix trop élevé par erreur. Il ne peut invoquer l’erreur que si elle concerne les qualités essentielles de la prestation, conformément à l’article 1132 du Code civil.

Cependant, dans le cas de titres, les qualités essentielles sont limitées : elles se réduisent principalement au droit de participer aux résultats de la société et au droit de vote. De ce fait, il est très rare qu’une erreur sur ces qualités essentielles puisse être invoquée.

La Cour de cassation a toutefois jugé qu’une erreur peut être reconnue lorsque l’acquéreur découvre, après la cession, que la société est dans l’impossibilité de poursuivre son activité économique (Com., 1er octobre 1991, JCPE 1992, 277).

Le dol

Le dol survient lorsqu’une partie obtient le consentement de l’autre grâce à des mensonges ou des manœuvres (article 1137 du Code civil). Il peut porter sur la valeur, les titres ou la situation de la société.

Dans une cession de titres, le dol apparaît souvent lorsque l’acheteur est trompé sur la situation financière ou économique de la société.

Exemples courants :

  • Cacher des dettes importantes.
  • Mentir sur l’existence de contrats clients ou fournisseurs.
  • Dissimuler un prêt bancaire, un redressement fiscal, un litige en cours ou des autorisations manquantes.

En revanche, la cession ne peut pas être annulée lorsque l'acquéreur connaissait parfaitement la situation et a néanmoins conclu la cession (Cass. com. 13-3-2019 n° 17-19.501 F-D), ce qui peut être démontré par les éléments suivants :

  • l'acte de cession précisait que la société était menacée de manière certaine par la cessation des paiements, les banques lui ayant supprimé toute facilité de caisse et son affactureur ayant rompu toute relation avec elle ;
  • l'acquéreur disposait de tous les documents utiles relatifs à la situation financière et comptable de la société et avait pu réaliser un audit complet de cette dernière avec le concours d'un expert-comptable ;
  • l'acquéreur avait une information complète sur la situation désastreuse de la société à la date de la cession ; il savait notamment que, à la suite de la rupture des concours bancaires, la trésorerie de la société ne lui permettrait pas, à très bref délai, de financer la poursuite de son activité, un redressement n'étant envisageable que par un apport de fonds.

La violence

La violence est un vice du consentement qui se produit lorsqu’une partie accepte la cession sous la contrainte, par crainte de menaces physiques, morales ou économiques (articles 1140 et suivants du Code civil).

Exemples possibles :

  • Menaces physiques ou agressions pour forcer l’acheteur ou le vendeur à conclure la transaction.
  • Pressions graves sur le plan professionnel ou personnel pour obtenir le consentement.
  • Menaces de blocage de l’activité de la société par le vendeur ou par un tiers pour contraindre la cession.

À noter : les pressions ordinaires ou les négociations agressives (par exemple, menace de poursuites judiciaires ou d’une saisie) ne constituent pas de la violence.

Qui peut demander l'annulation de la cession ?

En cas de vice du consentement, la nullité est relative, c'est-à-dire que l'action en nullité ne peut être engagée que par celui qui se trouve victime du vice du consentement.

En cas d'absence d'objet - principalement en cas de cession de titres intervenue à vil prix - c'est une nullité absolue qui est encourue. L'action en nullité pourra dès lors être engagée par tout intéressé.

En cas d'omission des formalités de publicité, la cession de titres n'encourt pas la nullité mais demeure inopposable.

Quel tribunal saisir ?

La demande d'annulation d'une cession de titres d'une société commerciale (SARL, SAS...) relève de la compétence du tribunal de commerce.

Il en va de même lorsque le vendeur et l'acquéreur sont des personnes non commerçantes (en l'espèce, une personne physique et une société civile) et que la cession soit un acte de nature civile (CA Paris 25-9-2018 n° 18/04571).

Quelle est le délai de prescription de l'action ?

L'action en nullité basée sur un vice du consentement est soumise à un délai de prescription de 5 ans, qui démarre au jour de la cession des titres. Ce délai concerne non seulement la cession conventionnelle des titres mais aussi le rachat des titres de l'associé qui se retire de la société.

En revanche, lorsqu'elle est fondée sur une irrégularité affectant la décision sociale ayant accordé au cessionnaire l'agrément exigé par la loi ou les statuts, l'action en nullité est soumise à un délai de prescription de 3 ans (Cass. Civ. III, 6 octobre 2004, n° 01-00896).

Si la nullité est invoquée par voie d'exception, elle ne peut être opposée comme moyen de défense que s'il n'y a pas de commencement d'exécution de l'acte. Notamment, s'il s'avère que l'acquéreur a d'ores et déjà partiellement payé le prix de cession, il ne peut plus invoquer la nullité de la cession par voie d'exception.

Comment restituer les titres suite à l'annulation de la cession ?

Restitution des titres en nature

L'annulation de la cession des titres entraîne normalement l'obligation pour l'acquéreur de restituer les titres et pour le vendeur le prix.

Quelques particularités sont à relever :

  • si la valeur des titres a augmenté depuis l'annulation de la cession, c'est le vendeur qui va profiter de l'intégralité de la plus-value. L'acquéreur peut simplement demander le remboursement des dépenses nécessaires ou utiles qu'il a exposées pour la conservation des titres. Inversement, si les titres ont perdu de leur valeur, l'acquéreur n'est pas tenu de rembourser le vendeur, sauf si ce dernier apporte la preuve d'une faute de l'acquéreur lui ayant causé un préjudice,
  • si l'acquéreur est de bonne foi, il peut conserver les dividendes (consulter notre guide complet sur les dividendes) qu'il a perçus avant l'annulation. Il est considéré comme de mauvaise foi à partir du moment où il a eu connaissance de l'irrégularité de la cession.

Restitution des titres en valeur

Dans certains cas, la restitution en nature s'avère impossible. C'est le cas lorsque, après la cession mais avant que la nullité ne soit définitivement prononcée par le juge, la société dont les titres ont été cédés a disparu (liquidation judiciaire, absorption, annulation des titres dans le cadre d'une réduction de capital).

La restitution s'opère alors en valeur. Pour calculer son montant, le juge se fonde sur la valeur des titres au jour de la restitution. Si entre-temps les titres ont pris de la valeur, l'acquéreur conserve la plus-value, et non au jour de l'acte annulé. Si l'acquéreur reçoit les titres de bonne foi et les revend à un tiers, il ne devra restituer que le prix qu'il a perçu.

L'acquéreur peut également conserver les dividendes perçus entre la date de la cession et celle du jugement d'annulation, sauf si à la date de leur distribution, il avait connaissance du vice affectant l'acte de cession (Cass. com. 2-2-2016 n° 14-19.278).

Si les titres ont été revendus alors que la cession initiale a été annulée, les 2 ventes successives seront annulées, même si le sous-acquéreur est de bonne foi. Mais il pourra conserver les dividendes que la société lui a versés.

Comment obtenir le remboursement de l'impôt sur la plus-value ?

L'annulation de la cession est en principe sans incidence sur le principe de l'imposition de la plus-value réalisée, et ne permet donc pas au vendeur de prétendre à un quelconque remboursement.

En effet, c'est le transfert de propriété des titres qui provoque l'imposition, et non pas le paiement intégral du prix de vente convenu entre les parties (arrêt du Conseil d'Etat du 9 septembre 2020, n°433821).

Toutefois, l'administration admet clairement dans ses commentaires qu'il est possible, sur réclamation, d'obtenir une restitution partielle ou totale de l'impôt payé sur la plus-value réalisée en cas d'annulation ultérieure de la cession.

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