Requalification d'un CDD en CDI : dans quels cas ?

Rédigé par Roxane Hidoux

Lorsque l'employeur ne respecte pas la réglementation relative au CDD, le salarié peut demander la requalification de son contrat en CDI et obtenir toutes les indemnités attachées à la rupture d'un CDI.

Sommaire :

Dans quels cas demander la requalification d'un CDD en CDI ?

Un salarié peut demander la requalification d'un CDD en CDI lorsque l'employeur :

  • ne signe pas le contrat de travail (l'apposition d'une signature numérisée et non manuscrite ne suffit pas) ;
  • verse une rémunération inférieure à celle que percevrait un salarié en CDI pour le même emploi ;
  • ne fixe pas un terme précis, ou une durée minimale lors de la conclusion du contrat ;
  • conclut un CDD en dehors des cas autorisés par la loi ou pour pourvoir un emploi permanent ;
  • ne conclut pas le CDD par écrit ou n'indique pas le motif de recours ;
  • laisse le salarié prendre son poste alors que le CDD n'a pas été signé par lui-même ou par le salarié (sauf mauvaise foi ou intention frauduleuse du salarié) ;
  • contrevient aux dispositions relatives à l'interdiction de recourir au CDD après un licenciement économique, pour remplacer un salarié gréviste ou pour effectuer des travaux dangereux ;
  • renouvelle le contrat sans l'avoir prévu dans le contrat ou par avenant ;
  • renouvelle le contrat plus d'une fois ou le prolonge au-delà de la durée maximale autorisée ;
  • ne consulte pas le comité social et économique lorsque son avis est requis avant l'embauche en CDD ;
  • ne respecte pas le délai de carence entre 2 contrats.

La requalification du CDD n'est pas la seule sanction à laquelle s'expose l'employeur. Le Code du travail prévoit également qu'il encourt une amende de 3 750 € au plus (7 500 € en cas de récidive) et/ou un emprisonnement de 6 mois au plus.

Quel est le délai de prescription applicable à la requalification d'un CDD ?

L'action en requalification d'un CDD en CDI est soumise au délai de prescription de 2 ans de l'article L 1471-1 du Code du travail.

Le point de départ du délai de prescription varie selon l'irrégularité soulevée :

  • la date de conclusion du CDD, en cas de non-respect du formalisme (absence de signature, absence d'indication du motif de recours, défaut d'établissement d'un écrit, défaut de précision du terme...) ;
  • le terme du CDD (ou, en cas de succession de CDD, le terme du dernier contrat), lorsque le motif de recours indiqué dans le contrat est inexact ou lorsqu'il est recouru au CDD pour pourvoir un emploi permanent. Mais les indemnités sont calculées à partir du premier contrat irrégulier ;
  • le premier jour d'exécution du second contrat, en cas de non-respect du délai de carence entre 2 CDD successifs ;
  • l'expiration du délai de 2 jours ouvrables imparti à l'employeur pour transmettre au salarié le contrat de travail lorsqu’elle est fondée sur l'absence d'écrit (Cour de cassation, 15 mars 2023, n° 20-21.774).

En revanche, la demande de rappel de salaire est soumise au délai de prescription triennal prévu par l'article L 3245-1 du Code du travail pour l'action en paiement ou en répétition du salaire.

Les tribunaux appliquent ainsi à chaque demande du salarié le délai de prescription qui lui est propre.

Quelle procédure pour obtenir la requalification d'un CDD en CDI ?

La requalification d'un CDD en CDI en cas de dépassement du terme du CDD

Le salarié n'a pas de procédure particulière à respecter car la requalification est automatique.

La requalification d'un CDD en CDI dans les autres cas

Le salarié doit saisir le Conseil de Prud'hommes en choisissant :

  • soit la procédure accélérée (référé). L'affaire est alors portée directement devant le bureau du jugement sans passer par la phase de conciliation ;
  • soit la procédure classique. L'affaire passe d'abord devant un bureau de conciliation et d'orientation devant lequel l'employeur et le salarié vont tenter de trouver un arrangement. S'ils n'y parviennent pas, l'affaire passera devant le bureau du jugement.

Quelles conséquences en cas de requalification d'un CDD en CDI ?

La requalification d'un CDD en CDI produit les conséquences suivantes :

  • la requalification a pour effet de replacer le salarié comme s’il avait été recruté depuis l’origine dans le cadre d’un CDI ;
  • le salarié peut prétendre à un rappel de salaire sans qu’il y ait lieu de prendre en compte les sommes perçues, dans le cadre des CDD, définitivement acquises, même lorsqu'elle étaient plus élevées que si le salarié avait été embauché en CDI (notamment du fait du versement de l'indemnité de précarité).

Le salarié a ainsi droit :

  • à une indemnité de requalification (uniquement lorsque le CDD a été jugé irrégulier).Elle doit être supérieure ou égale à 1 mois de salaire. Le mois de salaire correspond au dernier salaire perçu pendant le CDD ou à la moyenne des salaires perçus mensuellement dans le cadre du CDD, avant la demande de requalification. L'indemnité de précarité n'a pas à être intégrée au salaire moyen et n'entre donc pas dans la base de calcul de l'indemnité de requalification (Cass. soc. 18 décembre 2013, n°12-15454) ;
  • aux primes salariales conventionnelles (ancienneté, sujétion, fin d’année), et ce même si le salarié a déjà effectivement perçu un salaire annuel moyen plus élevé que ce qu’il aurait effectivement perçu s’il avait été recruté dès l’origine en CDI, primes comprises ;
  • si le contrat a été rompu, à des indemnités de rupture calculées sur la base de la situation contractuelle réelle du salarié. La rupture est considérée comme un licenciement et si elle apparaissait injustifiée, comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse, accompagné des indemnités de licenciement prévues par la loi dans cette hypothèse. Elles doivent être calculées au regard des sommes perçues par le salarié au titre du salaire de base brut perçu en CDD et définitivement acquises ;
  • si le contrat a été rompu, à une indemnité compensatrice de préavis. Elle doit être calculée selon le salaire qu’aurait dû percevoir le salarié s’il avait été recruté dès l’origine en CDI (et donc, sans tenir compte des sommes versées par l’employeur en exécution des CDD).

En revanche, le salarié ne peut bénéficier, en plus, de dommages-intérêts pour rupture abusive de son ou ses CDD.