Comment se passe une liquidation judiciaire ?

Rédigé par Roxane Hidoux

La liquidation judiciaire est une procédure collective destinée à mettre fin à une entreprise en état de cessation des paiements.

Sommaire :

Définition de la procédure de liquidation judiciaire

La procédure de liquidation judiciaire a pour but de mettre fin à une entreprise en état de cessation des paiements (ou dépôt de bilan) qui est dans l'incapacité de se redresser.

L'objectif principal d'une liquidation judiciaire est de stopper l'endettement de l'entreprise en difficulté et de rembourser les créanciers (impôts, URSSAF, fournisseurs, clients n'ayant pas reçu leur commande...) grâce à la vente de ses biens.

La durée moyenne d'une procédure de liquidation judiciaire classique est de 2 ans et demi.

Mais il existe 2 procédures simplifiées :

  • la liquidation judiciaire simplifiée, qui a pour avantage de durer 9 mois maximum (réservée aux petites entreprises) ;
  • le rétablissement professionnel, qui dure 4 mois maximum (réservé aux petits entrepreneurs individuels, excepté les EIRL).

Une entreprise qui se trouve en état de cessation des paiements ne peut pas procéder à une liquidation amiable. Elle doit obligatoirement demander l'ouverture d'une procédure collective via un dépôt de bilan.

Comment se déroule une procédure de liquidation judiciaire ?

1ère étape : demande d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire

Délai pour demander l'ouverture d'une liquidation judiciaire

Le dirigeant d'une entreprise qui se trouve en cessation des paiements doit déclarer sa situation dans les 45 jours de sa constatation.

S'il s'abstient de le faire et qu'il n'y a pas de procédure de conciliation en cours, l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire peut aussi être demandée par un créancier de l'entreprise qui n'a pas été payé ou par le ministère public (qui peut être informé de la situation d'une entreprise par le président du Tribunal ou par le comité social et économique).

Par ailleurs, le dirigeant qui s'est abstenu de déclarer la cessation des paiements dans les 45 jours peut être condamné à une interdiction de gérer.

Formulaire à remplir pour demander l'ouverture d'une liquidation judiciaire

Pour demander l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire, le dirigeant de l'entreprise doit déposer une déclaration de cessation des paiements au greffe du Tribunal de commerce ou du Tribunal judiciaire (formulaire cerfa 10530*01).

Dans la déclaration de cessation des paiements, le dirigeant de l'entreprise en difficulté doit expliquer la nature des difficultés rencontrées par l'entreprise et les raisons pour lesquelles cette dernière ne peut les surmonter.

Une fois le dépôt de bilan réalisé, le dirigeant de l'entreprise reçoit une convocation pour une audience fixée en moyenne à 8 jours, au cours de laquelle il devra exposer aux magistrats présents, la genèse des difficultés et les perspectives envisagées, qui justifient sa demande d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire.

L'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire n'entraîne pas l'interdiction bancaire de l'entreprise ou de son dirigeant. L'interdiction bancaire est uniquement liée à l'émission de chèques sans provision.

2ème étape : examen de la demande d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire

Le Tribunal se prononce sur l'ouverture d'une liquidation judiciaire après avoir entendu le dirigeant de l'entreprise et éventuellement le représentant du comité social et économique, si l'entreprise a des salariés.

Il désigne ensuite :

  • un juge-commissaire,
  • un liquidateur judiciaire,
  • un représentant des salariés,
  • éventuellement un expert,
  • un représentant de l'ordre professionnel le cas échéant.

Par ailleurs, le juge-commissaire désigne entre 1 à 5 contrôleurs parmi les créanciers qui lui en font la demande.

Le Tribunal missionne également un professionnel pour procéder à un inventaire et une prisée, c'est-à-dire une estimation des biens. Le président du Tribunal ou son délégué arrête la rémunération de la personne désignée pour dresser l’inventaire, au vu d'un compte détaillé ou le cas échéant selon le tarif qui lui est applicable.

En cas de mouvements de fonds anormaux entre le patrimoine de l'entreprise et celui d'une autre entreprise, la procédure de liquidation judiciaire peut être étendue à la seconde.

2ème étape : maintien temporaire de l'activité de l'entreprise en liquidation (optionnel)

À partir du jugement qui prononce la liquidation judiciaire, l'entreprise doit cesser immédiatement son activité, sauf autorisation du tribunal (pour une durée de 3 mois, qui peut être prolongée une fois, soit 6 mois au total).

Le maintien temporaire de l'activité est généralement décidé lorsque la cession de l'entreprise est envisagée ou lorsque l'intérêt public ou celui des créanciers l'exige.

Les contrats de travail liant les salariés et l'employeur sont rompus dans un délai de 15 jours suivant l'expiration de l'autorisation de poursuite de l'activité.

Il n'y a pas de période d'observation dans une procédure de liquidation judiciaire.

3ème étape : vente des actifs de l'entreprise en liquidation judiciaire

Le liquidateur effectue la vente des biens de l'entreprise en liquidation judiciaire (marchandises, matériels, immeubles, droit au bail, etc.) :

  • soit dans le cadre d'une vente globale de l'entreprise (plan de cession),
  • soit par des ventes séparées (les fonds sont alors répartis entre les différents créanciers suivant le rang de chacun).

Dans ce cadre, la vente de l'actif de l'entreprise en liquidation judiciaire peut s'effectuer via :

  • la vente aux enchères (ou saisie immobilière pour les immeubles),
  • ou, la vente dite de gré à gré, c'est-à-dire la vente à un candidat qui s'est présenté au liquidateur et a déposé une offre jugée satisfaisante par le juge commissaire.

Quelle que soit la façon dont la vente des actifs de l'entreprise en liquidation judiciaire est réalisée, ni l'entreprise, ni ses dirigeants de droit ou de fait, ni les parents ou alliés proches de ces dirigeants ou de l'entreprise, ni les personnes ayant ou ayant eu la qualité de contrôleur au cours de la procédure ne sont autorisés, directement ou par personne interposée, à présenter une offre de reprise.

Les biens appartenant en propre au conjoint d'un entrepreneur individuel en liquidation judiciaire sont à l'abri de la procédure contrairement aux biens communs ou indivis entre les époux.

4ème étape : clôture de la procédure de liquidation judiciaire

La procédure de liquidation judiciaire est clôturée lorsque la poursuite des opérations de liquidation est rendue impossible en raison de l'insuffisance d'actif.

Le dirigeant de l'entreprise en liquidation ne peut donc pas être poursuivi pour le paiement de créances qui faisaient partie de la procédure, et n'a pas évidemment à les payer spontanément.

Cette règle ne profite cependant pas à l'époux commun en biens, codébiteur solidaire de son conjoint objet d'une liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d'actif (Cass. com. 2-2-2022 n° 20-18.791).

Dans de rares hypothèses, la clôture de la liquidation judiciaire peut aussi être prononcée lorsqu'il n'existe plus de passif exigible ou que le liquidateur dispose de sommes suffisantes pour payer les créanciers.

Quelles sont les conséquences d'une liquidation judiciaire ?

Les conséquences de la liquidation judiciaire sur les créanciers

L'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire a les mêmes effets pour les créanciers que la procédure de sauvegarde et de redressement judiciaire : les créances sont gelées et l'entreprise a l'interdiction de les payer.

Les créanciers qui souhaitent obtenir le paiement de sommes dues par une entreprise en procédure de liquidation judiciaire doivent transmettre une déclaration de créances au liquidateur judiciaire. Certaines créances sont cependant dispensées de déclaration, notamment les créances salariales.

En revanche, les créances nées après l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire doivent être payées :

  • normalement,
  • intégralement,
  • et, à leur échéance.

Les conséquences de la liquidation judiciaire sur l'entreprise elle-même

Souvent, la liquidation judiciaire entraîne la vente des biens de l'entreprise, dans le cadre de ventes publiques organisées dans les tribunaux de commerce.

Lorsqu'une offre de rachat est présentée, le repreneur ne rachète pas l'entreprise elle-même qui a généralement une valeur très faible et fera l'objet d'une liquidation judiciaire. Il n'a donc pas à prendre en charge le passif de l'entreprise.

Le repreneur se contente de racheter l'activité de l'entreprise, c'est-à-dire :

  • une partie ou la totalité de l'actif de l'entreprise,
  • le fonds de commerce,
  • une branche de l'activité.

Certains repreneurs rachètent même l'activité pour 1 euro symbolique.

Les conséquences de la liquidation judiciaire sur le dirigeant de l'entreprise

Dès l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire, le dirigeant de l'entreprise est dessaisi de ses fonctions.

La plupart des actes de gestion sont désormais accomplis par liquidateur. Par exemple, le dirigeant ne peut valablement vendre un actif, résilier un contrat, encaisser une somme d'argent, renoncer à un droit dont l'exercice constituerait un actif, participer à un partage amiable d'indivision...

Les conséquences de la liquidation judiciaire sur les salariés de l'entreprise

L'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire peut avoir un impact important sur les salariés de l'entreprise.

L'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire entraîne l'élection d'un représentant des salariés.

Le représentant des salariés a pour mission essentielle de vérifier le relevé des créances résultant des contrats de travail qui a été établi par le mandataire de justice, le représentant des créanciers.

Il a également la possibilité d'assister ou de représenter les salariés devant le Conseil de Prud'hommes, en cas de contestation relative à leurs créances.

Le liquidateur procède aux licenciements des salariés, qui doivent intervenir dans les 15 jours de la liquidation judiciaire, ou s'il y a eu autorisation de poursuite provisoire de l'activité, dans les 15 jours de la fin de cette période.

Il effectue également les demandes d'avance des créances salariales dues auprès de l'AGS et règle les salariés.

Les impacts de la procédure de liquidation judiciaire sur les cocontractants de l'entreprise

Aucun contrat en cours ne peut être résilié par le seul fait qu'une procédure de liquidation judiciaire est ouverte à l'encontre de l'entreprise.

Seul le liquidateur peut exiger l'exécution des contrats en cours, en fournissant la prestation promise à l'autre partie, ou décider de résilier le contrat.

Le tribunal peut prévoir un maintien exceptionnel de l'activité pendant 3 mois, renouvelable une fois. Les contrats se donc poursuivent afin de maintenir les activités.

La loi permet également au contractant qui veut connaître avec certitude la position du liquidateur judiciaire sur la poursuite d'un contrat en cours, de lui adresser une mise en demeure de prendre parti sur la poursuite du contrat, par courrier recommandé avec accusé de réception.

A défaut de réponse dans le délai de 1 mois, et sauf si le juge commissaire accorde un délai supplémentaire d'option, le contrat est résilié de plein droit.

Combien coûte une procédure de liquidation judiciaire ?

Le coût global d'une procédure de liquidation judiciaire est principalement constitué des frais de publicité, des droits d'enregistrement, d'un droit fixe de 2 500 € et des honoraires du liquidateur.

Ce n'est pas au dirigeant de l'entreprise d'acquitter ces frais, sauf s'il est condamné à les régler personnellement.