Un dirigeant cotise-t-il à l'assurance chômage ?

Rédigé par Roxane Hidoux

Les dirigeants ou associés qui sont réellement titulaires d'un contrat de travail, en plus de leur fonction, peuvent bénéficier de la couverture de l'assurance chômage gérée par France Travail.

Ainsi, même s'ils sont assimilés salariés, les dirigeants qui ne peuvent prouver l'existence d'un véritable contrat de travail en plus de leur mandat social, sont exclus du régime d'assurance chômage des salariés.

Sommaire :

Quand un dirigeant a-t-il droit au chômage ?

Certains dirigeants rémunérés sont assimilés salariés alors même qu'ils ne disposent pas d'un contrat de travail :

  • les gérants minoritaires ou égalitaires de SARL,
  • les gérants d’EURL non associés,
  • les présidents ou directeurs généraux de SAS,
  • les PDG ou directeurs généraux de SA…

Mais si le statut de dirigeant assimilé salarié leur permet de relever du régime général de la Sécurité sociale salarial, il ne leur ouvre pas automatiquement droit à l’assurance chômage.

En effet, pour pouvoir prétendre à la couverture de l’assurance chômage, ils doivent également :

  • être titulaires d’un contrat de travail au sein de la société, pour l’exercice de fonctions distinctes de celles qu’ils exercent en tant que dirigeants et les plaçant dans une situation de subordination vis-à-vis de la société ;
  • avoir cotisé à France Travail

La conclusion d’un contrat de travail ne suffit donc pas toujours pour ouvrir droit aux allocations Pôle Emploi, et ce même si le dirigeant a bien cotisé au chômage.

Les gérants majoritaire ou égalitaires de SARL, les présidents associés uniques ou majoritaires de SAS, sont systématiquement exclus de toute couverture par Pôle Emploi, même avec un contrat de travail, puisqu'il est peu probable qu'ils se trouvent placés dans un lien de subordination vis-à-vis de la société.

Quelles conditions les dirigeants doivent-il respecter pour avoir droit au chômage ?

Un dirigeant de société ne peut bénéficier de l'assurance chômage gérée par le France Travail que si son contrat de travail correspond à un emploi effectif.

Lors de son inscription, France Travail va préalablement vérifier l'existence :

  • de l'exercice de fonctions techniques distinctes de son mandat social,
  • du versement d'une rémunération distincte,
  • et, d'un lien de subordination entre le salarié et l’employeur.

Ainsi, la conclusion d’un contrat de travail ne suffit pas toujours pour ouvrir droit aux allocations Pôle Emploi, et ce même si le dirigeant a bien cotisé au chômage.

1ère condition : existence de fonctions techniques distinctes

Les fonctions exercées doivent être nettement distinctes de celles exercées au titre du mandat social.

Les juges peuvent se baser sur divers éléments :

  • l'ancienneté du contrat de travail préexistant au mandat social. Un contrat de travail conclu avant le mandat social est parfois un élément d'appréciation retenu par les juges en faveur du cumul,
  • la taille de la société. La taille réduite de la société fait souvent obstacle à la reconnaissance d'un emploi effectif.

Les fonctions salariales doivent obligatoirement revêtir un caractère de technicité particulière (les connaissances seules ne suffisent pas). Les fonctions consistant en la gestion et l'administration de l'entreprise sont donc souvent rejetées. Ont été admises les fonctions suivantes :

  • chef d'atelier
  • chef des ventes
  • comptable
  • directeur technique

La qualification donnée par les parties n'est qu'un simple indice.

2ème condition : versement d'une rémunération distincte

L'existence d'une rémunération distincte n'impose pas à la société de verser une double rémunération en contrepartie du mandat social et du contrat de travail, les fonctions sociales pouvant parfaitement ne pas être rémunérées.

Toutefois, en cas de rémunération unique, celle-ci sera considérée comme un salaire versé en contrepartie de l'exécution d'un contrat de travail tandis que le mandat social sera réputé être exercé à titre gratuit.

En outre, il ne doit pas y avoir fraude :

  • la rémunération attribuée ne doit pas être excessive au regard de l'emploi exercé,
  • le contrat de travail ne doit pas avoir été signé pour pérenniser la présence du dirigeant au sein de la société et faire échec aux règles de révocabilité,
  • la signature du contrat de travail et la nomination en tant que mandataire social ne doivent pas intervenir le même jour, si elles sont appuyées par un autre élément faisant déjà échec au cumul, par exemple l'absence de lien de subordination,
  • le salarié ne doit pas exercer les fonctions de dirigeant de fait de la société sans avoir été nommé dirigeant de droit.

3ème condition : lien de subordination

Non seulement, les fonctions exercées au titre du contrat de travail doivent être clairement déterminées, distinctes du mandat et réellement exercées, mais encore, elles doivent l'être dans le cadre d'un lien de subordination.

Le lien de subordination se caractérise par le fait que l'intéressé soit placé sous un contrôle continu, générateur de dépendance. La retenue des heures d'absence, l'existence d'avertissements pour absences injustifiées, l'existence d'instructions de la part de la direction, sont autant d'indices de l'existence de ce lien de subordination.

C'est pour cela que le gérant d'une EURL, le gérant égalitaire ou majoritaire de SARL, l'associé majoritaire de SAS, ou l'associé unique de SASU, ne peuvent cumuler un mandat social avec un contrat de travail.

L'absence de lien de subordination sera retenue en l'absence d'horaire de travail, si le salarié gère lui-même son activité, en choisit les orientations, tout en respectant un projet à mettre en œuvre, mais sans recevoir d'instruction, s'il participe aux activités selon son bon vouloir et selon des modalités déterminées par lui. Il n'y a pas non plus de cumul envisageable pour une personne qui a le monopole des compétences.

Comment être certain qu'un dirigeant a droit au chômage ?

Quelle que soit la forme de la société, le cumul d'un contrat de travail et d'un mandat social suppose que l'emploi salarié :

  • corresponde à des fonctions distinctes de celles exercées dans le cadre du mandat social,
  • donne lieu à une rémunération distincte,
  • crée un lien de subordination de l'intéressé envers la société.

Afin de permettre au dirigeant cumulant un contrat de travail et un mandat social de s'assurer de ses droits au régime d'assurance chômage et, notamment, d'éviter de cotiser à perte, une procédure préalable permet d'interroger le France Travail sur sa situation personnelle.

Pour cela, le dirigeant doit remettre à France Travail un questionnaire destiné à examiner sa situation.

Ce questionnaire doit être accompagné de diverses pièces justificatives :

  • Photocopie des statuts,
  • Photocopie de l’acte d’acquisition ou de cession de parts,
  • Photocopie d’un extrait récent du registre du commerce et des sociétés (K ou K bis),
  • Photocopie d’un extrait des inscriptions au répertoire des métiers,
  • Photocopie de la feuille de présence à la dernière assemblée générale,
  • Photocopie du procès-verbal de nomination au mandat,
  • Photocopie du procès-verbal confirmant les fonctions salariales,
  • Photocopie du procès-verbal de cessation du mandat,
  • Contrat de travail et ses avenants ou lettre d’engagement,
  • Photocopie de la déclaration unique d’embauche (DUE) ou de la déclaration préalable à l’embauche (DPAE),
  • Photocopie des 12 derniers bulletins de salaires,
  • Organigramme nominatif de la société,
  • Rapport annuel présenté par le conseil d’administration ou le directoire faisant état des rémunérations des mandataires sociaux,
  • Déclaration annuelle des données sociales (DADS) des 2 dernières années...

Quelles sont les conséquences de la décision rendue par France Travail ?

France Travail rend un avis favorable

Si le dirigeant est considéré comme salarié pour le régime d'assurance chômage :

  • la société doit cotiser et, en cas de perte d'emploi, le dirigeant bénéficiera des allocations chômage,
  • la société doit payer les contributions d'assurance chômage et les cotisations AGS non versées durant les 3 dernière années.

La réponse positive du France Travail engage l'organisme pour l'avenir. Toutefois, en cas de perte d'emploi et de demande d'allocations chômage, la situation du dirigeant sera, à nouveau, vérifiée, dans la mesure où l'avis rendu n'engage le France Travail qu'en l'absence de modification de la situation du dirigeant.

En particulier, l'augmentation de la participation du mandataire social qui peut devenir majoritaire, entre la date de l'examen de sa situation par le France Travail et la date de la rupture de son contrat de travail, peut avoir une incidence déterminante.

France Travail rend un avis défavorable

Si le dirigeant n'est pas considéré comme salarié par le France Travail :

  • la société ne doit pas cotiser aux contributions d'assurance chômage et aux cotisations AGS,
  • la société peut obtenir le remboursement des cotisations d'assurance chômage et des cotisations AGS versées durant les 3 dernières années. Pour cela, elle doit adresser un courrier de demande de remboursement accompagné de l'avis défavorable rendu par France Travail.

Le versement des contributions et cotisations étant global et non nominatif, il sera alors demandé à l'employeur une attestation du commissaire aux comptes ou, à défaut, de l'expert-comptable justifiant du versement effectif des sommes dont le remboursement est demandé.

Afin de s'assurer une garantie contre le risque chômage, le dirigeant peut s'adresser à des systèmes d'assurance privée, et notamment l'APPI, la GSC, la Cameic ou APRIL.

Ces assurances garantissent pour quelques centaines d'euros par an les mandataires sociaux ne bénéficiant pas du chômage, de la perte de leur emploi consécutive notamment à un redressement, une liquidation, une cession judiciaire, une dissolution à la suite de difficultés économiques ou une révocation de leur mandat. Chaque organisme définit ses conditions d’accès, ses garanties et ses tarifs.

Il est toujours possible de prévoir dans le contrat de travail une indemnisation spécifique en cas de rupture.

Comment se passe l'examen d'une demande d'allocations chômage ?

Lors du dépôt d'une demande d'allocations par un demandeur d'emploi qui déclare être ou avoir été titulaire d'un mandat social ou avoir exercé une activité de dirigeant de l'entreprise, le France Travail procède à un examen particulier du dossier.

Si le dirigeant a effectué une demande de renseignements préalables

Lors du dépôt de l'examen de la demande d'allocations, le France Travail vérifie que la situation du dirigeant n'a pas subi de modification depuis le jour où le régime d'assurance chômage a été interrogé.

Pour cela, le dirigeant doit fournir une attestation sur l'honneur lui permettant soit de préciser que son statut et celui de l'entreprise n'ont pas été modifiés depuis le jour où l'institution a été interrogée, soit d'indiquer les modifications intervenues depuis cette date.

2 situations sont possibles :

  • la situation du dirigeant a fait l'objet d'une étude préalable sur la participation au régime d'assurance chômage et cette situation n'a pas changé. Le France Travail respecte donc l'avis qu'il a émis,
  • la situation du dirigeant a fait l'objet d'une étude préalable sur la participation au régime d'assurance chômage mais son statut ou celui de l'entreprise a été modifié. Dans ce cas, le France Travail va rechercher si les modifications intervenues ont entraîné la perte du statut de salarié ou, au contraire, permettent au dirigeant de se prévaloir du statut de salarié.

Si le dirigeant n'a pas effectué une demande de renseignements préalables

Si le France Travail n'a pas été interrogé sur la situation du dirigeant, vis-à-vis de l'assurance chômage, le versement des cotisations, au titre de la rémunération du dirigeant, ne peut, en aucun cas, être considéré comme un acquiescement de la part du France Travail.

Ce n'est qu'à l'occasion du dépôt de la demande d'allocation, que la situation du dirigeant sera examinée et notamment l'existence ou non d'un lien de subordination vis-à-vis de la société.

Comment est fixé le montant des allocations chômage ?

Les allocations chômage sont calculées uniquement sur les revenus salariés perçus pendant l’exécution du contrat de travail.

En effet, l’assurance-chômage ne bénéficie qu’aux salariés licenciés et non aux dirigeants révoqués ou dont le mandat n'a pas été renouvelé. Pour ces derniers, seule la souscription d'une assurance privée peut leur permettre de percevoir une indemnité.

Par conséquent, si le contrat de travail a été suspendu pendant la durée du mandat social, France Travail neutralise cette période de suspension pour l’appréciation des droits à l’assurance-chômage.