Rémunération du gérant de SARL : règles de fixation

Rédigé par Roxane Hidoux

Un gérant de SARL peut percevoir une rémunération au titre de son mandat social. Comment sa rémunération est-elle déterminée ? Quelles limites respecter ?

Sommaire :

Tous les gérants de SARL peuvent-ils être rémunérés ?

Un gérant de SARL peut recevoir une rémunération au titre de son mandat social ou de son contrat de travail s'il exerce des fonctions techniques distinctes de son mandat.

Les associés conviennent librement dans les statuts ou par une décision collective des associés des modalités de fixation et de versement de la rémunération du gérant de la SARL.

En pratique, il est fréquent que les statuts prévoient l'attribution d'une rémunération au gérant de la SARL, la fixation du montant relevant d'une décision des associés.

En outre, un gérant de SARL qui bénéficie d'un droit à rémunération peut y renoncer, mais sa renonciation ne doit pas être équivoque.

Contrairement à une croyance répandue, un gérant de SARL peut se payer dès la première année.

De quelles manières un gérant de SARL peut-il être rémunéré ?

Fixation de la rémunération du gérant de SARL par les statuts ou les associés

La rémunération du gérant de SARL peut être :

  • fixée par les statuts. Il faut éviter de prévoir une somme fixe car tout changement dans sa rémunération obligerait à modifier les statuts et à payer des frais de publication ;
  • déterminée par une décision collective des associés. La loi n'interdit pas au gérant de participer au vote mais cela reste déconseillé, surtout s'il est majoritaire. Si les associés ne parviennent pas à se mettre d'accord sur le montant de sa rémunération, c'est le juge qui la fixera.

Une rémunération fixée pour une année ou un exercice précis ne vaut que pour celui-ci. Si la rémunération du gérant de SARL n'a pas vocation à changer d'une année sur l'autre, il est préférable dans la décision collective qui fixe cette rémunération, de ne pas préciser qu'elle est attribuée au titre d'un exercice précis et d'ajouter, par exemple, que ce montant demeurera inchangé jusqu'à nouvelle décision des associés.

Fixation de la rémunération par le gérant de SARL lui-même

En aucun cas, le gérant de SARL ne peut décider de s'attribuer lui-même une rémunération ou fixer son montant.

Une telle décision constituerait une faute pouvant entraîner l'obligation de restituer les sommes perçues et pouvant constituer un motif légitime de révocation.

Le gérant de SARL ne peut pas, même au titre de son contrat de travail, s'octroyer, sans l'accord des associés, les majorations de salaires ou autres avantages qu'il consent au personnel en général (CA Paris 3-3-1976).

La décision de rémunérer un gérant de SARL est-elle une convention réglementée ?

La détermination de la rémunération du gérant d'une SARL n'est pas considérée comme une convention, de sorte qu'elle échappe au régime des conventions réglementées.

Le gérant de SARL peut donc, s'il est associé, prendre part au vote, même s'il est majoritaire. Toutefois, la décision concernant sa rémunération ne doit pas constituer un abus de majorité. Il n'est pas rare en effet que le gérant d'une SARL s'attribue une rémunération importante avec l'accord de la majorité des autres associés, soit parce qu'ils font partie de la même famille ou sont amis.

Un abus de majorité est un vote contraire à l'intérêt de la SARL et qui a pour seul but de favoriser les membres de la majorité au détriment des autres associés. Le ou les associés minoritaires pourront demander en justice l'annulation de la décision de rémunération du gérant de SARL et des dommages-intérêts contre le ou les associés majoritaires.

Si la société tarde à réagir et continue de rémunérer le gérant malgré la décision du Tribunal de commerce, les associés pourront agir en référé.

La rémunération d'un gérant de SARL est-elle plafonnée ?

La rémunération du gérant de SARL peut être modulée de diverses manières. Son montant peut être :

  • fixe. Cela est peu conseillé car tout changement nécessite une modification des statuts et/ou une décision collective ;
  • proportionnelle au chiffre d'affaires ou aux bénéfices ;
  • fixe avec une part variable.

Le gérant de SARL peut également ouvrir un PER individuel (ou PERIN), qui remplace depuis le 1er octobre 2020 le Plan d'épargne retraite populaire (PERP) et le contrat Madelin.

La rémunération doit être proportionnée à l'activité réelle du gérant de SARL

La rémunération doit être proportionnée à l'activité réelle du gérant, à ses compétences, à ses résultats ainsi qu'aux possibilités financières de la SARL.

Ce qui n'est pas le cas dans les hypothèses suivantes :

  • le gérant de SARL perçoit, durant les premiers mois d'activité, une rémunération représentant la moitié des frais généraux de la société ;
  • le gérant de SARL perçoit une rémunération importante alors qu'il est souvent absent.

La rémunération du gérant de SARL doit correspondre à la situation financière de la société

Une rémunération excédant les capacités financières de la SARL constitue 3 infractions simultanées :

  • une faute de gestion pouvant entraîner des sanctions pécuniaires à l'encontre du gérant (faillite personnelle, interdiction de gérer, action en extension du passif de la SARL), si la SARL vient à subir une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire ;
  • un abus de bien sociaux (5 ans de prison et/ou 3750 000 € d'amende maximum) ;
  • un juste motif permettant de le révoquer sans indemnités.

Pour autant, un gérant de SARL peut percevoir une rémunération élevée, malgré les difficultés financières rencontrées par la société, dès lors que cette rémunération n'a pas contribué à ces difficultés et que celles-ci sont dues à des causes extérieures à la gestion du dirigeant (Cass. com. 20 septembre 2016, nos 14-22189 et 14-24282).

Quels risques pour la SARL en cas de rémunération excessive de son gérant ?

Appréciation du caractère excessif de la rémunération du gérant de SARL

L'appréciation du caractère effectif des fonctions rémunérées dépend essentiellement de 2 éléments :

  • La réalité du travail exercé par le gérant de la SARL. Elle va se référer à toutes les circonstances qui permettront de démontrer l'absence d'effectivité du travail. Ainsi, le gérant qui n'accomplit que des actes isolés ne pouvant pas présenter le caractère d'une activité professionnelle normale ne réalise pas un travail effectif. A l'inverse, le fait que le gérant signe les documents sociaux comme les principales commandes et qu'il définisse la politique de l'entreprise est considéré comme un travail effectif.
  • La corrélation entre le travail effectué et la rémunération du gérant de SARL. Un critère semble être examiné de manière prioritaire et retient souvent la faveur des juges : la comparaison avec d'autres entreprises similaires. L'administration va également comparer la rémunération du gérant de SARL avec celles allouées aux autres salariés de la société.

    Elle peut aussi prendre en considération le rôle essentiel du gérant de SARL dans l'évaluation du développement de la société : une croissance rapide du chiffre d'affaires et du bénéfice social ou l'amélioration de la situation commerciale démontrera l'importance de son rôle et donc de sa rémunération.

Conséquences de la rémunération excessive du gérant de SARL

Les conséquences de la rémunération excessive d'un gérant de SARL varient en fonction du régime fiscal de la société.

SARL soumise à l'impôt sur les sociétés

Du côté de la société, la rémunération excessive de l'un de ses gérants aura les conséquences suivantes :

  • La fraction excédentaire est exclue des charges déductibles des bénéfices sociaux pour l'établissement de l'impôt sur les sociétés et doit, dès lors, être réintégrée dans les bases de cet impôt. Il en résulte un redressement des déclarations souscrites par la société.
  • La fraction excessive de la rémunération du gérant de SARL est considérée, sur le plan fiscal, comme présentant le caractère d'un revenu distribué (revenu de capitaux mobiliers) et non d'un salaire. Elle doit donc être exclue des bases des diverses taxes et participations assises sur les salaires.

Du côté du gérant de la SARL, la fraction excessive est considérée comme une distribution de revenus de capitaux mobiliers passibles de l'impôt sur le revenu et n'ouvre pas droit à l'abattement de 40 %.

SARL soumise à l'impôt sur le revenu

Lorsque la rémunération du gérant de SARL est considérée comme excessive, il en résulte les conséquences suivantes :

  • Les sommes correspondant à la fraction de la rémunération considérée comme excessive doivent être réintégrées dans le bénéfice imposable de la société. Ce bénéfice est imposé au nom personnel des associés, chacun pour la quote-part correspondant à ses droits dans la SARL.
  • La fraction excessive de la rémunération du gérant est considérée comme un revenu taxable entre les mains du bénéficiaire. Selon l'administration, l'imposition ne doit pas être établie dans la catégorie des traitements et salaires mais dans celle des bénéfices non commerciaux (ou des BIC pour les sommes versées au conjoint d'un commerçant).

La rémunération du gérant est-elle déductible des résultats de la SARL ?

Les conditions de déduction de la rémunération versée à un gérant de SARL sont définies à l'article 39 du Code général des impôts.

Les rémunérations versées à un gérant de SARL ne sont admises en déduction des résultats de la société que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne présentent pas un caractère excessif eu égard à l'importance du service rendu.

L'article 39 du Code général des impôts ne fixant pas de limites mécaniques à la rémunération des gérants de SARL, il appartient à la société versante de démontrer son adéquation par rapport à un travail effectif.

Faut-il remettre une fiche de paie au gérant de SARL rémunéré ?

Un gérant de SARL rémunéré ne bénéficie pas obligatoire d'une fiche de paie.

Gérant minoritaire ou égalitaire de SARL rémunéré

Le gérant minoritaire ou égalitaire de SARL rémunéré est assimilé salarié. Il doit donc bénéficier d'une fiche de paie.

Sa rémunération est assujettie aux cotisations sociales (sauf les cotisations France Travail) et, le cas échéant, au régime complémentaire de retraite des cadres.

Malgré tout, le gérant ne peut pas bénéficier des avantages réservés aux salariés (convention collective, congés payés, assurance chômage...).

Depuis la fin de l’année 2019, il peut en revanche bénéficier de l’allocation chômage des travailleurs indépendants, sous conditions d'activité antérieure et de ressources. L’allocation chômage s’élève à environ 800 € par mois et est versée pendant une durée de 6 mois.

Gérant majoritaire de SARL rémunéré

Un gérant majoritaire est un travailleur non salarié. Il ne peut donc avoir de fiche de paie.

Le procès-verbal de l'assemblée générale constitue un document juridique qui doit être porté dans le livre des assemblées et être mis à la disposition des contrôleurs de l'URSSAF ou des Impôts. Il pourra aussi être attesté par un expert-comptable.

Le gérant de SARL peut-il percevoir des dividendes ou des intérêts de compte courant ?

Il n'y a aucune incompatibilité à ce qu'un gérant de SARL perçoive divers types de rémunération.

S'il est associé, il peut ainsi se verser un salaire, des dividendes et percevoir les intérêts des sommes versées en compte courant d'associé.

Qu'il soit associé ou non, il peut y ajouter des avantages en nature (logement, voiture, équipements informatiques, téléphone...) et des revenus fonciers s'il loue à la SARL un local dont il est le propriétaire. Le gérant de SARL peut également recourir à des compléments de rémunération tels que des dispositifs d'épargne salariale ou faire financer par la SARL une partie de sa retraite.

Mais le gérant de SARL n'est pas totalement libre de ses actes. Les associés peuvent ainsi demander une expertise de gestion si, par exemple, le gérant de SARL s'est attribué une rémunération de sa propre initiative et sans vote de l'assemblée générale des associés.

Verser un salaire au gérant de SARL

Le gérant minoritaire ou égalitaire d'une SARL est assimilé à un salarié et peut donc se verser un salaire. Il sera affilié au régime général de la Sécurité sociale et recevra une fiche de paie tous les mois.

Le gérant majoritaire ou le gérant d'une SARL imposée à l'impôt sur le revenu relève du régime des non-salariés, géré par l'URSSAF.

Quelles que soient ses fonctions, il est toujours conseillé au gérant de SARL de se verser un salaire normal. Un salaire trop élevé lui faire courir divers risques :

  • la remise en cause par l'administration fiscale de la déduction de la rémunération,
  • la contestation par les associés qui pourront éventuellement demander sa révocation ou le poursuivre pour abus de biens sociaux,
  • la condamnation au paiement des dettes de la SARL en cas de redressement ou de liquidation judiciaire.

Cumul rémunération du gérant de SARL et contrat de travail

Si le gérant minoritaire de SARL exerce une fonction distincte dans les mêmes conditions qu'un salarié, il peut également être titulaire d'un contrat de travail. Attention, le cumul n'est possible que dans certaines situations.

Pour savoir s'il remplit les conditions requises, il est possible d'interroger Pôle Emploi.

Attribuer des dividendes au gérant de SARL

Les dividendes ne viennent pas rémunérer l'activité du gérant de SARL mais le capital qu'il a investi dans la société en tant qu'associé. A la différence du salaire, les dividendes sont attribués en fonction du bénéfice réalisé par la SARL et avec l'accord des associés majoritaires.

La distribution des dividendes doit profiter à tous les associés. Il est interdit de priver un associé de son droit à dividende.

Depuis le 1er janvier 2018, les dividendes font l'objet soit du prélèvement forfaitaire unique (PFU) composé de 12,8 % au titre de l'impôt sur le revenu et de 17,2 % au titre des prélèvements sociaux, soit de l'imposition au barème progressif.

Rémunérer le compte courant d'associé du gérant de SARL

Le compte courant permet à chaque associé de mettre à disposition de la SARL les sommes qu'il souhaite. En contrepartie, il est rémunéré par des intérêts qui sont déductibles des résultats de la société dans une certaine limite et à des conditions assez strictes.

Les intérêts non déductibles restent imposables en tant que revenus mobiliers si la SARL est soumise à l'impôt sur les sociétés. Si la SARL est soumise à l'impôt sur le revenu, ils sont imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux.

Du côté de l'associé, les intérêts sont soumis au prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 12,8 %, auquel s'ajoute les prélèvements sociaux fixés à 17,2 %, soit un prélèvement total de 30 %.

Le gérant de SARL peut-il bénéficier d'un PEE ou d'un contrat de retraite Madelin ?

Un gérant de SARL rémunéré peut profiter d'un plan épargne salariale mis en place par la société et faire financer une partie de sa retraite par la SARL.

Le Plan d'Epargne Entreprise du gérant de SARL

Le plan d'épargne entreprise (PEE) est un dispositif facultatif qui permet au salarié d'augmenter ses revenus par la constitution, avec l'aide de la SARL, d'un portefeuille de valeurs mobilières.

Mais les gérants de SARL, ainsi que les conjoints du gérant ayant le statut de conjoint collaborateur ou de conjoint associé peuvent également en bénéficier.

La seule condition est que la SARL comprenne entre 1 et 250 salariés et que l'ouverture aux dirigeants de la SARL soit expressément prévue par l'accord.

L'épargne peut résulter de versements volontaires du gérant de SARL, plafonnés à 25 % de sa rémunération annuelle ou de versements complémentaires de la SARL limités chaque année à 8 % du plafond annuel de la Sécurité sociale et à 3 fois les versements du salarié.

Les sommes placées sont gérées par un organisme bancaire et affectées à l'acquisition de titres d'OPCV (Sicav, FCPE, actions émises par l'entreprise et créées en vue de leur rachat par les salariés).

Les sommes épargnées sur le PEE sont bloquées pendant une durée minimale de 5 ans, mais le gérant de SARL a la possibilité de débloquer son PEE par anticipation s'il se trouve dans certaines situations (mariage ou conclusion d'un PACS, création ou reprise d'entreprise, invalidité, surendettement...).

Le gérant de SARL ne peut bénéficier d'un régime d'intéressement ou de participation, réservés aux salariés titulaires d'un contrat de travail.

Le financement d'une partie de la retraite du gérant par la SARL

Les gérants majoritaires et égalitaires, ainsi que leurs conjoints collaborateurs, peuvent bénéficier du contrat de retraite Madelin.

Le contrat Madelin permet au gérant de SARL de se constituer une retraite complémentaire qui sera restituée sous forme de rentes en parallèle des retraites obligatoires.

Les cotisations versées par la SARL sont déductibles fiscalement et exonérées de charges patronales et salariales (dans une certaine limite).

Le contrat Madelin peut être couplé avec une garantie optionnelle de prévoyance, permettant d'assurer la prise en charge des cotisations en cas d'arrêt de travail ou d'invalidité et, en cas de décès, de faire prendre en charge par l'assureur les cotisations jusqu'au terme du contrat, puis de verser la rente au profit des personnes désignées.