Quelles sont les cessions concernées par le droit de préemption commercial des communes ?

Rédigé par Roxane Hidoux

Le droit de préemption commercial permet à la commune de préempter un bail commercial, un fonds de commerce, un fonds artisanal ou un terrain pouvant accueillir des commerces.

Sommaire :

Qu'est-ce que le droit de préemption commercial des communes ?

Certaines ventes intervenant dans un périmètre de sauvegarde du commerce de proximité, délimité par chaque commune, peut faire l'objet d'un droit de préemption par celle-ci :

  • Cession de fonds de commerce
  • Cession de fonds artisanal
  • Cession de baux commerciaux
  • Cession de terrains accueillant déjà ou destinés à accueillir des commerces d'une surface de vente comprise entre 300 m² et 1 000 m

Le Code de l'urbanisme ne vise que les aliénations à titre onéreux, ce qui exclue :

  • les transmissions à titre gratuit (successions, donations, legs),
  • les contrats n'emportant aucun effet translatif comme les contrats de location-gérance et de crédit-bail,
  • les opérations ne portant pas directement sur le bail commercial. C'est le cas lorsque le transfert du bail résulte d'une fusion d'une scission ou d'un apport partiel d'actifs soumis au régime des scissions.

En revanche, l'apport en nature d'un bail à une société en dehors des opérations précitées, la dation en paiement et la vente en viager sont assimilables à une cession et se voient donc soumis au droit de préemption de la commune.

Les cessions consenties à l'occasion d'un plan de sauvegarde ou d'un plan de cession d'entreprise à l'occasion d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire ne peuvent pas être préemptées par la commune.

Comment déclarer la cession d'un fonds ou d'un bail se trouvant dans le périmètre concerné par le droit de préemption ?

Avant tout projet de cession, le vendeur doit se renseigner auprès de la mairie pour savoir s'il existe un périmètre de sauvegarde du commerce et de l'artisanat de proximité.

Si c'est le cas, le vendeur doit signaler son intention de céder le fonds, le bail ou le terrain en remettant à la commune une déclaration de cession, au moyen du formulaire cerfa n°13644*02.

La déclaration de cession doit être transmise au maire de la commune :

  • soit par voie postale par pli recommandé avec demande d'avis de réception (en 4 exemplaires),
  • soit par dépôt en mairie contre récépissé (en 4 exemplaires),
  • soit par voie électronique (en un seul exemplaire).

Dans un délai de 2 mois à compter de sa réception, la commune doit faire connaître sa décision :

  • soit la volonté d'acquérir le bail aux conditions et prix figurant dans la déclaration,
  • soit le souhait d'acquérir le bail à des conditions et à un prix fixé par le juge,
  • soit la renonciation à préempter.

La déclaration préalable est obligatoire sous peine de nullité de la cession (prescrite au bout de 5 ans après la cession).

En cas de modification du prix et des conditions de vente par le cédant après sa déclaration, le cédant doit procéder à une nouvelle déclaration qui fera courir un nouveau délai de préemption au profit de la commune.

La commune va-t-elle obligatoirement préempter le fonds ou le bail ?

Le maire dispose d'un délai de 2 mois pour exercer éventuellement le droit de préemption commercial au profit de la commune ou y renoncer.

Au terme de ce délai, le maire notifie au cédant :

  • soit sa décision de renoncer à préempter le fonds de commerce. Le cédant peut donc conclure la vente, mais il ne pourra le faire qu'aux prix et conditions figurant dans sa déclaration,
  • soit sa décision d'acquérir le fonds de commerce aux prix et conditions de la déclaration, l'accord entre les parties est alors parfait et l'acte de vente peut être passé,
  • soit son offre d'acquérir le fonds de commerce aux prix et conditions fixés par le juge de l'expropriation. En cas de désaccord sur le prix ou les conditions indiquées dans la déclaration préalable, le maire a en effet la possibilité de demander à ce que le prix soit fixé par le juge de l'expropriation.

Le maire décide de préempter le fonds de commerce ou le bail commercial

Conditions

Le droit de préemption du maire doit s’exercer en vue de la réalisation, dans l’intérêt général, des actions ou opérations d’aménagement répondant aux objets de l’article L 300-1 du Code de l’urbanisme.

Pour exercer ce droit, le maire doit justifier, à la date de la décision de préemption, de la réalité d’un projet d’action ou d’opération d’aménagement répondant aux objets mentionnés à l’article L 300-1 du Code de l’urbanisme, même si les caractéristiques précises de ce projet n’ont pas encore été définies à cette date, et mentionner la nature du projet dans la décision.

En outre, la mise en œuvre du droit de préemption doit répondre à un intérêt général suffisant, eu égard notamment aux caractéristiques du fonds ou du bail commercial faisant l’objet de l’opération et au coût prévisible de cette dernière (CE 15-12-2023 n° 470167, Sté NM Market).

Mise en oeuvre

En cas de préemption du bail ou du fonds de commerce, l'acte de cession doit être impérativement dressé dans un délai de 3 mois.

Dans un délai de 2 ans à compter de la prise d'effet de la cession, la commune devra rétrocéder le bail ou le fonds à une entreprise immatriculée au registre du commerce et des sociétés en vue d'une exploitation destinée à préserver la diversité de l'activité commerciale dans le périmètre concerné.

Pendant ce délai de revente, la commune peut mettre le fonds de commerce en location-gérance afin de le maintenir en activité. Dans ce cas, le délai de rétrocession peut être porté à 3 ans.

Si la rétrocession n'a pas été faite au bout des 2 ou 3 ans, l'acquéreur évincé dispose d'un droit de priorité pour l'acquisition du fonds de commerce ou du bail commercial, à condition que son identité ait été mentionnée dans la déclaration d'aliéner.

La commune ne peut rétrocéder un bail commercial ou un fonds de commerce qu'avec l'accord préalable du bailleur. En effet, lorsque la commune exerce son droit de préemption commercial, elle n'acquiert que le droit d'exploiter des locaux ou un terrain, elle n'est pas propriétaire de l'immeuble dans son ensemble. C'est lorsque la commune a trouvé un candidat à la rétrocession que le bailleur est informé.

Dans cette hypothèse :

  • soit il accepte et le fait savoir expressément. Il peut aussi garder le silence pendant ce délai, il sera alors réputé avoir donné son accord,
  • soit il refuse le candidat proposé par la commune. Celui-ci doit saisir en référé le président du tribunal judiciaire pour pouvoir récupérer le bail,
  • soit il accepte le principe de la rétrocession mais refuse de céder au prix ou conditions fixés. Il lui faudra dans ce cas saisir le juge de l'expropriation.

Le maire renonce à préempter le fonds de commerce ou le bail commercial

Le vendeur peut alors réaliser la vente, mais la cession doit impérativement être réalisée aux prix et conditions figurant dans la DIA.

Désaccord entre le vendeur et la commune

Lorsque le vendeur et la commune ne sont pas d'accord sur le prix ou les conditions de la cession du fonds ou du bail, la commune peut saisir le juge de l'expropriation dans un délai de 2 mois suivant la notification de la déclaration d'aliénation.

A défaut d'accord sur le prix, le vendeur peut toujours renoncer à vendre. De même, la commune peut également renoncer à la préemption en cours de procédure, et même après la décision définitive du juge de l'expropriation.