Comment créer un journal associatif en 6 étapes ?

Rédigé par Roxane Hidoux

Une association qui crée un journal associatif est soumise au droit commun de la presse. Certaines démarches doivent ainsi être accomplies par l'association en amont et au moment de chaque parution. Des mentions obligatoires sont également figurer sur chaque exemplaire.

Sommaire :

1. Déterminer si la publication est soumise au droit de la presse

Un journal, ou une revue, peut être publié sans déclaration ni autorisation préalable (Loi 29-7-1881 art. 5).

Toutefois, l'association éditrice et l'imprimeur doivent accomplir diverses formalités avant et au moment de chaque parution, dès lors que la publication est mise à la disposition du public et qu'elle a une certaine périodicité, même si elle n'est pas régulière.

Journaux et revus périodiques

Dès lors qu'ils sont mis à disposition du public, les écrits périodiques (quotidiens, hebdomadaires, mensuels, etc.) doivent obligatoirement respecter, avant leur diffusion ainsi que lors de chaque parution, certaines formalités prévues par la loi du 29 juillet 1881 sur la presse.

Avant la première diffusion, l'association doit désigner un directeur de publication. La déclaration d'intention de paraître (ou dépôt de titre) a été supprimée par la loi 2012-387 du 22 mars 2012.

Lors de chaque parution, il faut ensuite :

  • effectuer une déclaration auprès de la BNF lors de la parution du premier numéro via le site depotlegal.bnf.fr (dépôt légal) ;
  • déposer chaque exemplaire des publications à diffusion nationale auprès de la DGMIC ;
  • veiller à ce que les mentions légales figurent sur chaque exemplaire.

Le dépôt légal des publications diffusées en ligne s'effectue selon les modalités propres aux sites web, sans que l'association ait à effectuer de démarche.

Les écrits destinés à la jeunesse sont soumis à des contraintes particulières supplémentaires.

Écrits associatifs non périodiques

Si l'association souhaite créer un écrit non périodique ou publié seulement une fois par an (calendrier, annuaire), il n'y a pas de formalités particulières à respecter.

2. Choisir un directeur de la publication

Toute revue ou journal édité par une association doit obligatoirement avoir un directeur de publication.

Caractéristiques du directeur de publication d'une association

Le directeur de publication ne peut être que la personne physique qui représente légalement l'association, c'est-à-dire le président de l'association ou toute autre personne mandatée à cet effet par le conseil d'administration.

Le directeur de publication doit avoir la jouissance de ses droits civils et n'être privé de ses droits civiques par aucune condamnation judiciaire.

Il doit en principe être majeur mais un mineur âgé d'au moins 16 ans peut être directeur ou codirecteur de la publication de tout journal ou écrit périodique réalisé bénévolement.

Le nom du directeur de la publication doit être imprimé sur chaque numéro édité. A défaut, les dirigeants de l'association encourent une amende de 6 000 €. L'imprimeur encourt quant à lui une amende de 750 € par numéro.

Tout changement de directeur de publication doit faire l'objet d'une déclaration auprès du tribunal judiciaire dont relève l'imprimeur de la publication.

Responsabilité du directeur de publication d'une association

Le directeur de publication d'une association (ou codirecteur) est civilement et pénalement responsable de la publication et de son contenu, notamment en cas de poursuites exercées pour des délits de presse (publication de fausses nouvelles, diffamation, injure, etc.), même s'il n'est pas l'auteur de l'article litigieux.

Il a d'ailleurs été jugé que lorsqu'un membre d'une association éditrice d'un journal apparaît à l'égard des tiers comme le directeur de la publication, il crée une apparence trompeuse et doit répondre, le cas échéant, des délits de presse (Paris, 11e ch.A, 20 juin 2001).

Si la publication ne mentionne aucun nom, c'est le président qui sera considéré, en tant que responsable légal de l'association éditrice, comme le directeur de la publication (Cour de cassation, Chambre civile 1, 6 décembre 2017, n° 16-22068). La loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse mentionne en effet dans son article 6 que « le directeur de la publication est le représentant légal de l'entreprise éditrice. »

3. Insérer les mentions légales dans la publication

Dans chaque numéro publié doivent figurer les mentions suivantes :

  • la dénomination de l'association éditrice, sa forme juridique associative, son siège, le nom de son représentant ;
  • le nom du directeur de la publication et celui du responsable de la rédaction ;
  • le nom (ou raison sociale) et l'adresse de l'imprimeur ou la mention « imprimé par nos soins » ;
  • la date de parution et de dépôt légal (mois et année) ;
  • le mois et l'année d'édition ;
  • le prix en euros ;
  • le numéro international des publications en série ISSN. Dans l'attente de sa communication par le centre ISSN, la mention " ISSN en cours " peut figurer sur la publication.

Si la publication est inscrite à la Commission paritaire, il faut y ajouter :

  • le numéro d'inscription à la Commission paritaire ;
  • le numéro de publication ;
  • la périodicité, la date ou période de rattachement ;
  • le sommaire qui doit comprendre la désignation des informations contenues dans chaque page (toutes les pages doivent être citées) ;
  • le prix de vente au numéro ou le prix de l'abonnement.

En outre, l'association doit porter à la connaissance des lecteurs tout transfert ou promesse de propriété ou de l'exploitation du titre de presse dans un délai de 1 mois à compter de la date où elle en prend elle-même connaissance, ou lors de la parution de la publication la plus proche.

Publicité pour l'association

L'association utiliser sa publication pour communiquer sur ses activités. Tant que ces activités sont gratuites, aucun problème. Mais si ces activités sont payantes et dès lors que le journal est inscrit à la Commission Paritaire des publications et agences de presse (CPPAP), l'information pourra être assimilée à de la publicité.

En plus de la remise en cause de son régime fiscal, l'association risque la prise en compte de sa communication dans l'évaluation du volume global de publicité, dont dépend l'affiliation à la CPPAP.

Il faut aussi garder à l'esprit que la publicité extérieure ne peut excéder les 2/3 des pages et que la surface occupée par les informations relatives à la vie interne de l'association doit être supérieure à 50 % de la surface rédactionnelle, hors publicité.

4. Protéger le titre du journal ou de la revue associative

Le titre d'une publication associative peut être protégé :

  • en tant que marque ;
  • en tant que dessin et modèle ;
  • ou, en tant qu'oeuvre littéraire et artistique.

Le dépôt du titre s'effectue auprès de l'Institut national de la propriété industrielle (INPI).

L'INPI se contente d'enregistrer les marques sans procéder à une étude de nouveauté. C'est donc à l'association de s'assurer préalablement qu'un même titre n'est pas déjà utilisé ou protégé en tant que marque commerciale par le dépôt antérieur d'une marque identique ou voisine s'appliquant à un produit similaire, c'est-à-dire à un autre journal ou revue.

Cette phase préalable porte le nom de " recherche d'antériorité ".

Recherche d'antériorité

Effectuer une recherche d'antériorité permet de vérifier que le titre envisagé n'appartient pas déjà à un tiers.

L'utilisation d'un titre déjà utilisé peut au mieux causer à l'association la perte pure et simple du titre de la publication et au pire la voir s'exposer à une action en concurrence déloyale de la part du titulaire du titre.

Cette dernière peut avoir de graves conséquences pour l'association qui peut en plus se voir condamner :

  • à une astreinte. Celle-ci consiste en l'obligation de verser une somme d'argent par jour d'utilisation abusive du titre contesté ;
  • au versement de dommages et intérêts ;
  • à la confiscation ou à la destruction des périodiques ;
  • à la publication du jugement aux frais de l'association ;
  • au paiement d'une amende et/ou à une peine d'emprisonnement, si le tribunal correctionnel a été saisi.

Recherche de première approche

En premier lieu, il faut vérifier que le titre n'est pas déjà la propriété d'un tiers (pour une marque concernant des produits et services proches ou identiques) ou qu'il ne s'agit pas du nom d'une société.

L'association peut consulter les services de recherche suivants :

  • data.inpi.fr pour les marques en vigueur en France, les marques communautaires et les enregistrements internationaux, les dessins et modèles ;
  • infogreffe.fr pour les noms de sociétés immatriculées au Registre national du commerce et des sociétés (RCS).

Recherche de similitude

En second lieu, l'association doit rechercher, parmi des services/activités identiques ou similaires, s'il existe des marques ou des noms de société présentant des similitudes orthographiques, phonétiques ou intellectuelles susceptibles de créer une confusion dans l'esprit du public.

La recherche peut s'effectuer sur le site de l'INPI (www.inpi.fr) et nécessite le paiement d'une redevance variant en fonction de l'étendue de la recherche.

Enregistrement du titre en tant que marque

Seul le dépôt du titre en tant que marque commerciale permet à l'association de s'opposer à ce que la même dénomination soit reprise et utilisée par des associations concurrentes.

Le titre se trouve protégé contre une éventuelle contrefaçon ou une imitation, sanctionnable par les tribunaux. La protection dure à vie, sous réserve d'un renouvellement tous les 10 ans et de l'utilisation du titre pour les produits et services visés dans l'enregistrement.

A défaut, l'association encourt la déchéance de ses droits, déchéance qui peut être demandée en justice par toute personne intéressée.

Toute association, déclarée ou non, peut déposer un titre. Le dépôt peut s'effectuer à tout moment, même avant les opérations de lancement de la publication.

Conditions de protection d'un titre

Le titre déposé doit respecter certaines conditions :

  • être distinctif. Cela signifie que le titre ne doit pas être composé de mots communément ou naturellement employés pour désigner un produit ou service (par exemple, " chansons ", pour le titre d'un journal d'une association artistique). Il ne peut pas non plus indiquer la nature du produit (par exemple, " le journal ") ;
  • ne pas être interdit par la loi. La loi interdit les appellations susceptibles de tromper le public sur la nature ou l'origine du produit ou contraires aux bonnes mœurs et à l'ordre public (reproduction d'emblèmes, drapeaux, armoiries, poinçons officiels...) ;
  • et, être disponible. 2 appellations identiques ou similaires peuvent coexister, dès lors qu'elles concernent des produits totalement différents et qu'il n'existe aucun risque de confusion dans l'esprit du public. En particulier, le titre de la publication ne doit pas reproduire un nom patronymique rare ou célèbre, un nom commercial désignant une entreprise qui exerce une activité dans le même secteur économique ou ayant un rayonnement national.

En dehors de ces conditions, la nature du titre choisi peut être de nature variable : nom patronymique commun, pseudonyme, nom géographique, devise, lettres, chiffres ou initiales...

Il est possible d'y ajouter un dessin, un logo, un emblème ou des couleurs du moment qu'ils respectent les conditions ci-dessus.

Procédure à suivre

Le dépôt du titre de la publication s'effectue par le représentant statutaire de l'association sur le site internet de l'INPI. Le coût du dépôt varie selon le nombre de classes de produit sélectionnées.

L'INPI va vérifier que la marque choisie est distinctive et autorisée par la loi mais pas sa disponibilité, d'où l'importance des recherches d'antériorité.

C'est aussi pourquoi, parallèlement à l'examen de l'INPI, le dépôt du titre ouvre une période de 2 mois pendant laquelle la marque peut faire l'objet d'une opposition ou d'une observation par n'importe quelle personne ayant pris connaissance du dépôt.

Plus précisément :

  • l'opposition est une procédure qui permet au propriétaire d'une marque antérieure de s'opposer à l'enregistrement de la marque, s'il estime que celle-ci porte atteinte à ses droits ;
  • l'observation permet d'attirer l'attention de l'INPI sur le fait que la marque ne serait pas valable, au regard, par exemple, d'autres réglementations, comme les Appellations d'origine contrôlée. Toute personne concernée peut faire des observations.

En cas d'opposition ou d'observation de la marque choisie, l'association sera informée par l'INPI.

5. Déclarations à déposer avec les publications de l'association

Une déclaration spécifique doit être effectuée avec le premier numéro de la publication (déclaration initiale), puis une fois par an pour l'ensemble des numéros parus et déposés dans l'année (déclaration annuelle).

Lors de chaque parution d'une publication à diffusion nationale, un exemplaire doit également être déposé à la BNF au plus tard le jour de sa mise en circulation.

Déclaration initiale de la publication associative

Une déclaration initiale, appelée dépôt légal, doit être effectuée avec le premier numéro de la publication.

Le dépôt légal est obligatoire pour les périodiques (revues, magazines, bulletins...), quel que soit leur procédé technique de production, d'édition ou de diffusion, dès lors qu'ils sont mis à la disposition d'un public qui excède le cercle de famille, à titre gratuit ou onéreux.

Ne sont pas soumis au dépôt légal :

  • les cahiers d'écriture et de découpage ;
  • les documents électoraux mentionnés aux articles R26, R29 et R30 du code électoral ;
  • les documents importés à moins de cent exemplaires ;
  • les recueils de photocopies et de reproductions d'articles de presse ou d'autres textes ;
  • les réimpressions à l'identique ;
  • les thèses et autres travaux universitaires non édités ;
  • les travaux d'impression dits de ville (faire-part, cartes de visite...), de commerce (factures, bons de commande...) ou administratifs (modèles, bordereaux...).

Le dépôt légal doit être effectué au moyen du formulaire cerfa n° 10068*05 ou en utilisant le téléservice.

Il permet à la publication d'obtenir un numéro ISSN. Il s'agit d'un code international qui permet d'identifier un périodique, quels que soient le pays où il est édité ou mis en ligne, la langue dans laquelle il est publié, son alphabet, sa fréquence de parution et son support. Il est composé des 4 lettres « ISSN », suivies de 2 séquences de 4 chiffres séparées par un tiret.

Dépôt de chaque exemplaire (périodiques diffusés sur l'ensemble du territoire national)

A la différence des publications locales et régionales, les périodiques à diffusion nationale (c'est-à-dire diffusés sur l'ensemble du territoire), vendus au numéro ou par abonnement, doivent faire l'objet d'une formalité supplémentaire auprès de la DGMIC.

Le dépôt administratif doit être effectué par le directeur de la publication au moment de la parution ou de la mise en vente des exemplaires, à raison de :

  • 10 exemplaires pour les quotidiens (4 à 6 parutions par semaine) ;
  • 6 exemplaires pour les hebdomadaires (1 à 3 parutions par semaine) ;
  • 4 exemplaires pour les autres périodicités.

Par ailleurs, les publications destinées à la jeunesse doivent faire l'objet d'une déclaration avant parution et d'un dépôt de 2 exemplaires auprès de la Commission de surveillance et de contrôle des publications destinées à l'enfance et à l'adolescence (CSCPJ), qui dépend du ministère de la justice.

Déclaration annuelle de la publication associative

Une déclaration doit être envoyée à la Bibliothèque Nationale de France, à la fin de chaque année avec le dernier numéro paru.

Elle s'effectue via le téléservice dépôt en ligne ou au moyen du formulaire cerfa n°12381*03.

6. Demander à bénéficier du régime économique de la presse

L'édition de journaux et revues ne constitue une activité lucrative que si elle est exercée dans des conditions similaires à celles d'une société commerciale, notamment au regard du produit proposé et du public bénéficiaire

Sous réserve de remplir certaines conditions, une association fiscalisée peut bénéficier du régime économique de la presse, c'est-à-dire de tarifs postaux privilégiés, d'une exonération de la contribution économique territoriale (CET), d'exonérations de cotisations sociales, du taux réduit à 2,1 % de la TVA, etc.

Conditions à remplir

Les conditions d’application du régime de la presse ont été modifiées depuis le 24 juin 2022.

Désormais, il faut remplir les conditions suivantes :

  • la publication doit avoir une régularité au moins trimestrielle ;
  • la publication doit présenter un lien avec l’actualité ainsi qu'un contenu original composé d’informations ayant fait l’objet d’un traitement à caractère journalistique (notamment dans la recherche, la collecte, la vérification et la mise en forme de ces informations) réalisé par une équipe rédactionnelle composée de journalistes professionnels ;
  • la part de contenu dit d'intérêt général doit être au minimum de 50 % de la pagination. De facto, la place réservée aux informations relatives à la vie interne de l'organisme et à la publicité ne doit pas être supérieure à 50 % de la publication ;
  • la publication doit faire l’objet d’une vente effective au public (au moins 50 % des tirages) à un prix ayant un lien réel avec les coûts, non compris dans une cotisation. Trois offres doivent être proposées à l'abonné : l'abonnement à la revue seule, la cotisation d'adhésion à l'association éditrice seule, l'abonnement à la revue avec le versement de la cotisation ;
  • tout article de publicité à présentation rédactionnelle doit ainsi être précédé de la mention « publicité » ou « communiqué ».

Procédure à suivre

Le dossier d'inscription doit être adressé au secrétariat de la Commission paritaire des publications et agences de presse.

Il doit comporter :

  • une demande d'inscription établie sur papier libre ;
  • le formulaire cerfa n°12352*05, signé par le directeur de la publication et par le commissaire aux comptes de l'association ou à défaut son trésorier ;
  • un exemplaire des derniers numéros parus (la publication doit être mise en vente, l'examen ne pouvant porter sur une maquette ou un numéro zéro).

Une fois en possession d'un numéro de CPPAP (à renouveler tous les 5 ans), l'association doit adresser une demande aux services fiscaux pour pouvoir bénéficier des allégements fiscaux.

Elle doit être accompagnée d'une photocopie du certificat d'inscription de la CPPAP et d'au moins 2 numéros différents de la publication.

Une demande d'agrément doit également être effectuée auprès de La Poste pour bénéficier de tarifs préférentiels.

L'accès à ces tarifs est conditionné à la signature d'un « contrat presse » et d'un « plan contractuel de dépôt » précisant, en particulier, les modalités de dépôt du titre, le niveau de service et éventuellement les options tarifaires choisies.