Une association à but non lucratif peut-elle réaliser des bénéfices ?

Rédigé par Roxane Hidoux

Une association à but non lucratif peut parfaitement réaliser des bénéfices via l'exercice d'activités commerciales ou économiques lucratives. En revanche, elle ne peut pas les distribuer à ses membres.

Sommaire :

Une association à but non lucratif peut-elle avoir une activité commerciale ?

Une association peut parfaitement vendre des produits ou des services et donc réaliser des bénéfices.

En effet, le terme " à but non lucratif " ne signifie pas qu'une association loi 1901 ne peut pas réaliser des bénéfices mais qu'ils ne peuvent pas être partagés entre ses membres (fondateurs, dirigeants et membres actifs), à la différence d'une association loi 1908.

L'exercice d'une activité économique lucrative par une association à but non lucratif est donc possible et va avoir des conséquences fiscales variables, selon que cette activité est accessoire ou non.

L'exercice d'une activité économique non lucrative est toujours exonérée d'impôts commerciaux (article 261, 7 b du Code général des impôts).

Quelles sont les conséquences fiscales de l'exercice d'une activité commerciale ?

L'association exerce une activité commerciale prépondérante

Lorsque l'activité commerciale est prépondérante, l'association doit :

  • indiquer dans ses statuts la nature de ses activités,
  • s'acquitter des impôts commerciaux (TVA, impôt sur les sociétés, cotisation foncière des entreprises).

A défaut de paiement des impôts commerciaux, l'activité peut être qualifiée de pratique para-commerciale et encourt ainsi diverses sanctions. Les critères de qualification sont décrits dans la circulaire du 12 août 1987 relative à la lutte contre les pratiques para-commerciales.

La circulaire présume le caractère para-commercial de l'activité lorsque l'association :

  • n'est pas assujettie à l'ensemble des obligations des commerçants (impôts commerciaux et cotisations sociales, notamment) ;
  • s'adresse de manière habituelle à des tiers, c'est-à-dire à des personnes extérieures à l'association ;
  • a pour but de réaliser un profit ou de rentabiliser la prestation offerte aux membres de l'association ;
  • concurrence directement des activités commerciales similaires, dès lors que le chiffre d'affaire réalisé avec les tiers n'est pas marginal.

L'association exerce une activité commerciale accessoire

Lorsque l'activité commerciale est accessoire et qu'elle génère des recettes inférieures à 76 679 €, l'association bénéficie d'une exonération de l'ensemble des impôts commerciaux, à la double condition que :

  • la gestion soit totalement désintéressée,
  • les activités non lucratives soient significativement prépondérantes. C'est le cas lorsque l'association organise des manifestations isolées à caractère commercial (bal annuel, spectacles vivants, vente de produits confectionnés par des tiers, vente de cartes de voeux, tombolas, ventes aux enchères, lotos...) ou exploite un bar-restaurant dans ses locaux où s'exercent des activités culturelles, de sport et de loisirs.

Au-delà des 76 679 € de recettes d'activités commerciales accessoires, l'association est soumise comme n'importe quel commerçant aux différents impôts commerciaux.

L'association peut parfaitement vendre des produits et des services similaires aux produits distribués, par ailleurs, par des commerçants, dès lors que cette activité commerciale est accessoire au projet d'utilité sociale qui doit rester principal.

Seules 6 manifestations isolées à caractère commerciale sont exonérées de fiscalité chaque année (mais pas, s'il y a lieu, de redevance SACEM).

L'association exerce une activité économique non lucrative

Une association à but non lucratif qui exerce une activité économique, de manière régulière ou occasionnelle, peut être exonérée d'impôts commerciaux si elle n'exerce pas son activité dans des conditions analogues à celles d'une entreprise commerciale.

Conditions à respecter :

  • l'association exerce une activité sociale ou ayant une utilité sociale, en assurant notamment la couverture de besoins non couverts ou insuffisamment pris en compte par le marché local. C'est pourquoi le financement des activités associatives est le plus généralement le produit des adhésions (cotisations), de dons ou de financements publics ;
  • l'activité de l'association entre directement dans le cadre de l'objet désintéressé ou contribue, par sa nature et non simplement financièrement, à la réalisation de cet objet ;
  • la gestion de l'association est désintéressée ;
  • la réalisation d'excédents de recettes n'est pas systématiquement recherchée ;
  • les excédents de recettes sont réinvestis dans l'association ;
  • l'association exerce une activité sociale ou ayant une utilité sociale, en assurant notamment la couverture de besoins non couverts ou insuffisamment pris en compte par le marché local.

Une association loi 1901 à but non lucratif peut-elle distribuer ses bénéfices ?

Une association loi 1901 est créée en vue d'un but collectif poursuivi par ses membres, pour qui la " non-lucrativité " est fondamentale, à la différence des associés d'une société commerciale, qui exercent leurs activités à des fins lucratives dans le but de leur enrichissement personnel.

Contrairement à une société qui distribue une partie de ses bénéfices sous forme de dividendes à ses actionnaires, les bénéfices d'une association loi 190 à but non lucratif sont impartageables et restent dans la structure.

La non-redistribution des bénéfices est la traduction du principe de gestion désintéressée et prévaut toute la vie durant de l'association, même à sa mort : si l'association est dissoute, tous ses biens sont dévolus à une association dont l'objet est le plus proche du sien.

A la différence de l'association loi 1901, l'association loi 1908 peut avoir un but lucratif, c'est-à-dire partager les bénéfices réalisés entre ses membres, mais uniquement lors de sa dissolution.

Définition de la distribution de bénéfices dans une association

La notion de distribution de bénéfices est très large et vise tous les prélèvements effectués sur les ressources qui ne s'inscrivent pas dans la logique de l'objet social de l'association :

  • rémunération des dirigeants,
  • distribution directe des résultats,
  • avantages injustifiés : rémunérations exagérées ou injustifiées, prise en charge de dépenses personnelles, prélèvements en nature, rémunération de comptes courants, prêts financiers à des taux préférentiels...

Mais il y a aussi distribution de bénéfices lorsque les excédents de l'association n'ont pas pour but la réalisation de l'objet social de l'association, et notamment lorsque :

  • une partie des bénéfices a été utilisée à des fins ne correspondant pas à l'objet social de l'association,
  • le bénéfice a servi à effectuer des avances à des associations ou à des entreprises, sans que ces avances ne présentent un intérêt quelconque pour l'association prêteuse,
  • l'essentiel du bénéfice est utilisé pour effectuer des travaux immobiliers ou des investissements financiers.

En revanche, n'est pas assimilé à une distribution de bénéfices le fait de mettre en réserve les excédents et de les placer en attente de leur utilisation ainsi que le remboursement des frais engagés par les dirigeants pour le compte de l'association à but non lucratif.

Conséquences de la distribution de bénéfices dans une association

Toute association à but non lucratif qui répartie les bénéfices qu'elle a réalisés entre ses membres, sous quelque forme que ce soit, s'expose à une requalification par les tribunaux en société créée de fait, civile ou commerciale selon la nature de son activité.

Cette condamnation entraîne des conséquences très importantes :

  • l'association perd sa personnalité morale car elle ne peut pas être transformée en société ;
  • les membres deviennent associés de fait et sont donc tenus personnellement à l'égard des tiers.

Une association à but non lucratif peut-elle constituer des réserves ?

Une association à but non lucratif peut mettre en réserve une partie de ses bénéfices en vue de réaliser un ou plusieurs projets répondant à son objet social.

Constitution de réserves pour couvrir des besoins actuels

Le fonds de roulement de l'association, c'est-à-dire l'excédent de ses ressources durables (fonds propres de toute nature, report à nouveau excédentaire) sur ses emplois durables (immobilisations), doit être structurellement positif afin de lui éviter d'avoir à rechercher en permanence le remplacement d'un financement temporaire qui viendrait à échéance.

L'association doit assurer le financement de son besoin d'exploitation (besoin en fonds de roulement), qui provient de l'obligation de payer régulièrement la plupart de ses charges, alors que le rythme d'encaissement des produits n'est pas toujours identique, et même parfois aléatoire (subventions, dons).

Ces raisons expliquent pourquoi toute association à but non lucratif doit disposer d'une trésorerie lui permettant :

  • d'attendre les encaissements à venir,
  • et/ou de supporter quelques exercices déficitaires, par exemple consécutifs à une diminution de ses subventions de fonctionnement ou à un accroissement ponctuel de ses charges.

Lorsque les fonds propres ne sont pas suffisants pour couvrir les besoins financiers de l'association (apports, legs, dons...), il faut constituer une couverture du financement par des résultats excédentaires successifs, générant la trésorerie nécessaire.

Les associations ont la particularité de disposer de ressources (apports, libéralités) parfois assorties d'un droit de reprise qui leur confère un caractère temporaire.

Constitution de réserves pour couvrir des besoins futurs

Toute croissance d'activité engendre des besoins supplémentaires en termes d'immobilisations (création de nouveaux investissements ou simples renouvellements) et d'exploitation (embauche, augmentation des achats et charges externes, frais financiers).

L'association à but non lucratif peut aussi avoir comme projet associatif la réalisation d'une opération ou d'un investissement exceptionnel à venir. Les résultats excédentaires successifs sont alors affectés dans un compte de réserve spécifique, permettant de contrôler, au fil des exercices, le degré d'atteinte de l'autofinancement décidé pour l'opération future.

La couverture des besoins futurs requiert donc une anticipation de la constitution de réserves par le biais de résultats excédentaires.