Comment faire annuler un acte de caution ?

Rédigé par Roxane Hidoux

Une personne qui s'est portée caution dispose de plusieurs moyens de défense pour tenter de réduire le montant à payer voire pour faire annuler le cautionnement.

Sommaire :

L'acte de caution n'est pas valable

La caution a été manipulée

Le consentement ne doit pas avoir été donné par erreur ; parce que des contraintes physiques ou morales ont été exercées ou parce que la caution a été manipulée par le créancier (être manipulé par le débiteur n'est pas suffisant pour annuler le cautionnement), ayant par exemple menti ou dissimulé des faits sur la situation du débiteur.

Ainsi, un créancier qui fait souscrire un engagement de caution, sans informer la future caution de ce que le débiteur est définitivement insolvable (une procédure de liquidation judiciaire a par exemple été engagée), commet un dol.

La caution a subi des violences économiques

La personne qui s'est portée caution peut obtenir la nullité de son engagement lorsque le créancier :

  • exploite une situation de faiblesse ou de dépendance économique,
  • et, que le cautionnement lui procure un avantage manifestement excessif.

L'annulation d'un acte de caution pour violences économiques est très rare en pratique. A ainsi été annulée la garantie souscrite par l'épouse du dirigeant d'une société qui avait d'abord refusé de signer l'acte de cautionnement, puis avait fini par s'y résoudre dans l'espoir que la société familiale, en situation très difficile, serait sauvée (Cass. com. 28-5-1991 n° 89-17.672).

En revanche, un dirigeant ou son époux ne peut pas invoquer uniquement l'état de nécessité ou la pression de circonstances économiques pour demander l'annulation du cautionnement.

En effet, les tribunaux estiment insuffisants :

  • le fait que l'entreprise fasse l'objet d'une procédure de redressement judiciaire ;
  • le fait que le dirigeant se trouve dans une impasse : accepter de se porter caution et engager son patrimoine personnel pour une entreprise qui se trouve dans une situation difficile ou refuser de se porter caution et ne pas obtenir le crédit qui permettrait de sauver l'entreprise ;
  • le fait que le cautionnement ait été souscrit au siège de l'entreprise.

Le cautionnement est disproportionné

Une caution, personne physique, peut être totalement déchargée de son engagement s'il apparaît que celui-ci était manifestement disproportionné à ses biens et revenus.

Cautionnements conclus après le 1er janvier 2022

Les cautionnements conclus après le 1er janvier 2022 se verront appliquer un nouveau régime.

Désormais, un cautionnement disproportionné conduira simplement à une simple réduction du cautionnement. Ainsi, l'engagement de la caution sera limité au montant à hauteur duquel elle pouvait s'engager, au regard de son patrimoine et de ses revenus, lors de la conclusion du cautionnement.

Ensuite, la disproportion avec les revenus et le patrimoine de la caution s’appréciera uniquement lors de la conclusion de l’engagement de caution. Il n’y aura donc plus à ménager le cas dans lequel la caution serait à même de faire face à son obligation à l’heure où elle est appelée (retour à meilleure fortune).

La banque est tenue à un devoir de mise en garde à l’égard de la caution non avertie (qu'elle soit avertie ou non, pour les cautionnements conclus à compter du 1er janvier 2022) lorsque, au jour de son engagement :

  • le cautionnement n’est pas adapté aux capacités financières de la caution ;
  • ou, l’opération financée par l'emprunt est vouée à l’échec dès son lancement.

La caution non avertie peut être considérée comme une personne ne disposant pas des compétences pour évaluer les risques liés à l’acte de cautionnement au regard de sa capacité financière. Ainsi peut être considéré comme non averti un particulier mais également un professionnel.

En pratique, les banques sont rarement en mesure de rapporter la preuve que la caution peut faire face financièrement à sa dette.

Si les revenus escomptés de l'opération garantie ne peuvent pas être pris en considération pour apprécier la disproportion du cautionnement au moment où il a été souscrit, il doit, en revanche, être tenu compte des revenus réguliers perçus par la caution jusqu'à la date de son engagement, quand bien même ceux-ci proviendraient de la société dont les engagements sont garantis par le cautionnement (Cass. com. 5-9-2018 n°16-25.185 FS-PB). Encore faut-il qu'ils soient réguliers ; ainsi, un revenu exceptionnel (par exemple provenant de la vente d'un bien) ne doit pas être pris en considération.

La disproportion du cautionnement doit être appréciée par rapport au patrimoine « net » de la caution. Ainsi, dans le cas où la caution détient des parts sociales de la société pour laquelle elle s’engage, l’évaluation de ces parts doit tenir compte du « passif social », c’est-à-dire des dettes de la société.

Le délai de 5 ans dont dispose la caution pour engager la responsabilité de la banque qui a manqué à son obligation de mise en garde est décompté à compter du jour où elle a su, par le biais d’une mise en demeure qui lui était adressée, que son engagement allait être exécuté.

Le cautionnement retrouve toutefois ses effets si, au jour où il est appelé, la situation financière de la caution s'est améliorée et lui permet de faire face à ses obligations.

Actifs à prendre en compte

Les biens communs doivent être pris en compte pour apprécier la proportionnalité du cautionnement donné par un époux commun en biens, même si le conjoint n'y a pas consenti (Cass. com. 15-11-2017 n° 16-10.504 F-PBI).

Il en va de même des biens grevés de sûretés, leur valeur étant appréciée en en déduisant le montant de la dette dont le paiement est garanti par ces sûretés (Cass. 1e civ. 24-3-2021 n° 19-21.254 FS-P, CRCAM d'Aquitaine c/ M).

Le contrat de cautionnement ne comporte pas les mentions manuscrites

Le contrat de cautionnement doit comporter la mention manuscrite prévue par l'article L 341-2 du Code de commerce (pour un contrat de prêt) ou la mention prévue par la loi du 6 juillet 1989 + reproduction manuelle de l'article 22-1 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 (alinéa 1) qui précise les conditions dans lesquelles la caution peut résilier son engagement (pour un contrat de bail) ou la signature manuscrite de la caution.

Mention manuscrite rédigée par un secrétaire

Un cautionnement dont la mention manuscrite est rédigée par le secrétaire de la caution est considéré valable, dès lors que la caution a conscience de la portée de son engagement et a été informée de ses conséquences (Cass. com. 20-9-2017 n° 12-18.364 F-D).

Dans cette affaire, une caution sachant mal écrire avait prié sa secrétaire, chargée habituellement de le faire à sa place, de l'accompagner lors de la souscription du cautionnement. La caution avait signé après que sa secrétaire eût inscrit la mention manuscrite.

Les mentions manuscrites ne sont pas correctement rédigées

La lettre X de la formule manuscrite prévue par le Code de la consommation doit être remplacée, lors de son apposition par la caution, par le nom ou la dénomination sociale du débiteur garanti.

A défaut, le cautionnement est nul, peu important que le bénéficiaire soit parfaitement identifié dans le reste du texte de l'acte de cautionnement, que la caution ne puisse pas en ignorer l'identité (dirigeant de la société cautionnée, notamment) ou encore que celle-ci ait signé le contrat garanti ou l’ait paraphé.

Cautionnements conclus après le 1er janvier 2022

Les cautionnements conclus après le 1er janvier 2022 se verront appliquer un nouveau régime.

Ainsi, la caution ne sera plus tenue de recopier une mention manuscrite, mot pour mot à la virgule près, pour que son engagement soit valable.

Elle devra simplement simplement exprimer, selon une formule choisie, mais dépourvue de toute ambiguïté, la nature et la portée de son engagement, en particulier s’il s’agit d’un cautionnement solidaire.

En cas de contestation, il incombera au juge d’apprécier si la mention est suffisante pour assurer l’information de la caution.

La signature de la caution ne figure pas au bon endroit

La caution est tenue d'apposer sa signature à la suite des mentions manuscrites.

Ainsi, le cautionnement doit être annulé si la signature de la caution figure avant les mentions ou en marge de celles-ci.

Il doit également l'être lorsque les mentions manuscrites sont incurvées de sorte qu'elles ne précèdent pas la signature de la caution mais qu'elles l'entourent (Cass. com. 26-6-2019 n° 18-14.633 F-D).

Cependant, en présence d'un cautionnement solidaire, il n'est pas nécessaire que la caution signe sous chacune des mentions ; elle peut valablement apposer une seule signature à la suite des 2 mentions (Cass. com. 27-3-2012 n° 10-24.698 F-D).

En revanche, une signature apposée sur la mention de la solidarité en annule les effets. Dans une telle situation, le cautionnement n'est pas nul mais vaut uniquement cautionnement simple (Cass. com. 14-11-2019 n° 18-15.468).

Cautionnements conclus après le 1er janvier 2022

Les cautionnements conclus après le 1er janvier 2022 se verront appliquer un nouveau régime.

Ainsi, le nouvel article 2297 du Code civil ne comporte aucune prescription en ce qui concerne l’emplacement de la signature de la caution par rapport à la mention.

Un cautionnement ne risquera donc plus l'annulation si la signature ne suit plus la mention de l'engagement de la caution.

Le contrat cautionné a été renouvelé mais pas la caution

Cette hypothèse vise la novation du contrat, c'est-à-dire son renouvellement par tacite reconduction ou le renouvellement d'un bail arrivé à expiration. Le renouvellement du contrat libère automatiquement la caution qui ne pourra être tenue que du paiement des dettes intervenues avant.

Par exception, le renouvellement ne libère pas la caution lorsque le contrat de cautionnement prévoit une clause couvrant le renouvellement.

La dette cautionnée est prescrite

La caution peut opposer au créancier « toutes les exceptions, personnelles ou inhérentes à la dette, qui appartiennent au débiteur » (article 2298 du Code civil), y compris la prescription de la dette cautionnée.

Elle peut donc refuser de payer une dette prescrite. Pour un loyer d'habitation, le délai de prescription est de 3 ans. Pour le remboursement d'un prêt, le délai de prescription est de 2 ans.

Le cautionnement a été donné par un dirigeant qui a cessé ses fonctions

Un dirigeant reste en principe tenu de payer les dettes dont il s'est porté caution, même après la cessation de ses fonctions (notamment, par révocation, démission, ou par décision de justice dans le cadre d'un redressement judiciaire).

Lorsque l'acte de caution indique que sa caution est liée à l'exercice de ses fonctions, il lui suffit de démissionner pour que la caution cesse de produire ses effets.

A défaut, il faut examiner si le cautionnement a été donné pour une durée déterminée ou indéterminée.

Le cautionnement à durée déterminée

Lorsqu'une durée précise est indiquée dans l'acte de cautionnement, l'ancien dirigeant ne peut résilier unilatéralement son engagement.

Il est ainsi tenu jusqu’à la date indiquée dans l'acte de caution (en général, il s’agit de la durée du prêt de la société + 24 mois) et ne pourra se rétracter que si l’acte fait mention d’une résiliation éventuelle liée à la survenance d’évènements personnels prédéterminés (retraite, divorce, perte d’emploi...).

Mais même une fois cette date atteinte, le dirigeant reste tenu des dettes nées avant.

Le cautionnement à durée indéterminée

Le cautionnement à durée indéterminée a l'avantage de donner au dirigeant une faculté de résiliation unilatérale (article 2302 du Code civil).

Cette faculté est une conséquence de la prohibition des engagements perpétuels. Elle reste peu pratiquée, soit parce que la caution l'ignore (c'est sans doute pourquoi les textes récents imposent aux créanciers ayant accordé un crédit à une entreprise, garanti par un cautionnement, de rappeler à la caution l'existence de cette prérogative), soit parce que le créancier en tire immédiatement argument pour mettre un terme au crédit consenti.

Pour être exercée valablement, la résiliation doit respecter les conditions posées par l'acte de cautionnement, s'il en existe, et manifester clairement l'intention du dirigeant de suspendre sa garantie à la date de la cessation de ses fonctions. La simple notification de la fin de ses fonctions ne suffit pas à le délier de son engagement.

Cela ne suffit pas nécessairement à lui faire échapper à tout paiement. La Cour de cassation a en effet décidé que la caution qui s'est engagée à garantir, sans détermination d'objet ni de durée, les obligations contractées ou qui viendraient à l'être du débiteur envers le créancier, doit la garantie de toutes les obligations à durée déterminée convenues antérieurement à la résiliation unilatérale du cautionnement, quand bien même l'exécution de ces obligations se poursuivrait, en vertu des stipulations contractuelles, après la date de cette résiliation.

Cependant, le dirigeant qui cesse ses fonctions et dont le cautionnement n'a pas vocation à disparaître peut obtenir de son successeur qu'il se porte caution et obtenir du créancier qu'il accepte une substitution de cautions.

A noter que si l'organisme fait l'objet d'une procédure collective, les cautions font l'objet de dispositions spécifiques.

La dette est éteinte

La caution est libérée :

  • par le paiement de la dette par le débiteur principal au créancier ;
  • si le débiteur rembourse le créancier au moyen d'un bien lui appartement, à condition que ce bien corresponde à la valeur de la dette et que le créancier accepte ce bien en paiement ;
  • par le biais d'une transaction entre le débiteur et le créancier mettant fin à la dette (remise de dette) ;
  • s'il y a compensation entre la dette du débiteur et une dette que le créancier doit au débiteur ;
  • si une décision de justice libère le débiteur du paiement de la dette (par exemple, lorsqu'une créance est refusée sur la liste des créances en cas de redressement judiciaire) ;
  • si le créancier n'a pas rempli ses obligations envers le débiteur principal ;
  • si le créancier a causé l'extinction de la dette en ne déclarant pas sa créance au redressement judiciaire du débiteur.

Le créancier a commis une faute

La caution est déchargée de son obligation, proportionnellement à son préjudice, lorsqu'elle ne peut plus agir contre le débiteur en remboursement des sommes versées du fait du créancier. Toute clause contraire est nulle.

Cela vise les cas suivants :

  • le créancier a perdu par sa faute une sûreté qu'il avait sur le débiteur (hypothèque sur un bien, autre caution, gage...) et que cette sûreté aurait pu être utilisée par la caution ;
  • la sûreté a perdu son efficacité du fait du créancier (par exemple, en cas de dégradation d'une sûreté du fait de l'inaction du créancier) ;
  • elle ne peut plus agir contre le débiteur ou une autre caution du fait du créancier (par exemple, s'il décharge le débiteur d'une réserve de propriété sur un bien).

La caution n'est pas déchargée si :

  • le créancier prouve que sa faute ou sa négligence ne lui est pas entièrement imputable ;
  • ou, le créancier établit que le droit perdu n'aurait eu aucun intérêt pour la caution : le débiteur est insolvable, il a consenti une prorogation de terme au débiteur principal sans perte de sûreté, il a retiré son concours financier au débiteur dans les règles...

Des informations n'ont pas été communiquées à la caution

Dans cette hypothèse, la caution ne pourra pas obtenir l'annulation de son engagement mais seulement une diminution du montant qu'elle doit.

  • le créancier professionnel est tenu d'informer gratuitement la caution, personne physique, une fois par an, de l'évolution du montant de la créance garantie et des frais et pénalités. Si l'engagement est à durée indéterminé, il doit en plus rappeler à la caution la possibilité dont elle dispose de résilier le contrat de cautionnement. Si le créancier oublie de le faire, la caution n'est pas tenue de payer les frais et pénalités liés à la dette ;
  • le créancier professionnel doit avertir la caution, dès le premier impayé non régularisé, et ce dans le mois qui suit. Sinon, la caution n'a pas à payer les pénalités de retard concernant la période comprise entre le premier impayé et la date à laquelle elle en a été informée.