Saisie-attribution d'un compte bancaire : les comptes saisissables

La saisie-attribution est une procédure de recouvrement forcé qui permet à un créancier de faire procéder à une saisie sur le compte bancaire de son débiteur.

Qu'est-ce qu'une procédure de saisie-attribution ?

La saisie-attribution est une procédure par laquelle un commissaire de justice saisit une somme d'argent se trouvant sur le compte bancaire d'un débiteur.

Pour procéder à une saisie-attribution, le créancier doit détenir un titre exécutoire, c'est-à-dire un document l'autorisant à procéder au recouvrement forcé de sa créance (exemples : ordonnance d'injonction de payer, assignation en paiement).

Une fois en possession d'un titre exécutoire, le créancier doit contacter un commissaire de justice qui va ensuite se charger de la suite de la procédure.

Lors d'une procédure de recouvrement, le commissaire de justice a le choix entre plusieurs types de saisie : la saisie-attribution, la saisie-vente, la saisie d'un véhicule, la saisie immobiliÚre...

Quels sont les comptes saisissables dans le cadre d'une saisie-attribution ?

Comptes de dépÎt

Tous les comptes de dépÎt sont saisissables (mais certaines sommes sont insaisissables) : compte chÚque, livrets d'épargne, livret A, PEL... (article L. 162-1 du Code des procédures civiles d'exécution).

Le cas du compte joint

En présence d'un compte-joint, les possibilités du créancier dépendent du régime matrimonial des époux.

Dans le cas d'un régime de communauté, chaque co-titulaire est prévenu (mais le défaut d'information n'entraßne pas la caducité de la saisie) et tous les avoirs sont bloqués, sauf exceptions.

Celui des 2 co-titulaires qui n'est pas concerné par la créance à l'origine de la saisie-attribution peut demander la mainlevée de la saisie à hauteur d'une somme équivalant, à son choix :

  • au montant des gains et salaires versĂ©s au cours du mois prĂ©cĂ©dant la saisie,
  • ou, au montant moyen mensuel des gains et salaires versĂ©s dans les 12 mois prĂ©cĂ©dant la saisie.

Dans le cas d'un régime de séparation de biens, le créancier doit démontrer que les fonds déposés sur le compte joint sont personnels à son débiteur. Les sommes versées sur ce compte sont présumées appartenir pour moitié aux co-titulaires (sauf à prouver la part de chacun d'entre eux).

Comptes de titres

Les valeurs mobiliĂšres et les droits d'associĂ©s ne peuvent ĂȘtre saisis que par le biais d'une saisie spĂ©cifique, en l'occurrence la saisie des droits d'associĂ©s et des valeurs mobiliĂšres.

Ouverture de crédit en compte courant

L'ouverture de crĂ©dit est analysĂ©e comme une « promesse de prĂȘt », ne donnant naissance Ă  un prĂȘt qu'Ă  concurrence des fonds utilisĂ©s.

Tant que ces fonds ne sont pas utilisĂ©s, le prĂȘt ne se rĂ©alise pas et l'Ă©tablissement bancaire n'est dĂ©biteur Ă  l'Ă©gard du dĂ©tenteur du compte d'aucune somme pouvant servir d'assiette Ă  la saisie.

Il s'ensuit que la fraction inutilisée de l'ouverture de crédit n'est pas saisissable.

Assurance-vie

Le débiteur doit de l'argent à l'administration fiscale

Si c'est à l'administration fiscale que le débiteur doit de l'argent, la loi l'autorise expressément à saisir les contrats d'assurance-vie.

Tous les contrats d'assurance-vie rachetables sont saisissables par le fisc, peu important qu'ils soient individuels ou collectifs, qu'il s'agisse de contrats en euros ou en unités de compte et que la possibilité de rachat soit ou non limitée (contrats groupes).

Sont en revanche insaisissables tous les contrats non rachetables :

  • les assurances temporaires en cas de dĂ©cĂšs,
  • les rentes viagĂšres immĂ©diates ou en cours de service,
  • les assurances de capitaux de survie et de rente de survie,
  • les assurances en cas de vie sans contre-assurance,
  • les rentes viagĂšres diffĂ©rĂ©es sans contre-assurance.

Le débiteur doit de l'argent à une autre personne

Si le créancier n'est pas l'administration fiscale, l'assurance-vie est considérée juridiquement comme une "stipulation pour autrui".

DÚs lors que le débiteur verse les sommes à l'assurance, ces sommes appartiennent à l'assureur, et débiteur ne dispose que d'un droit de créance à l'égard de l'assurance.

Une fois les sommes versées, elles sont considérées comme n'ayant jamais fait partie du patrimoine du débiteur, ce qui explique pourquoi le contrat d'assurance-vie est en principe insaisissable.

Par exception, un contrat d'assurance-vie redevient saisissable :

  • lorsque les versements rĂ©alisĂ©s dans le contrat ont Ă©tĂ© "manifestement exagĂ©rĂ©s" par rapport aux facultĂ©s du dĂ©biteur ou Ă  son patrimoine,
  • lorsque le dĂ©biteur a sciemment utilisĂ© l'assurance-vie pour organiser son insolvabilitĂ© et Ă©chapper Ă  ses crĂ©anciers. Une personne endettĂ©e qui place tout son argent en assurance-vie court le risque de voir ces mĂȘmes crĂ©anciers attaquer le contrat pour rĂ©cupĂ©rer leur dĂ»,
  • lorsqu'une dĂ©cision dĂ©finitive de confiscation des sommes versĂ©es sur un contrat d'assurance vie intervient, prononcĂ©e par un tribunal pĂ©nal, le contrat est rĂ©solu de plein droit et les fonds correspondants transfĂ©rĂ©s Ă  l'État.

Fonds versés sur les comptes de certains professionnels

Du fait mĂȘme de leur activitĂ©, certains professionnels, au rang desquels figurent les avocats, les notaires, les commissaire de justices de justice ou encore les agents immobiliers, sont amenĂ©s Ă  recevoir des fonds versĂ©s par leurs clients.

De tels fonds ne sont pas la propriété du titulaire du compte, qui n'en n'a d'ailleurs pas la libre disposition. Ils sont simplement déposés à titre précaire sur un compte spécialement destiné à les recevoir, et ne font donc pas partie de son patrimoine.

En conséquence, ils ne peuvent dÚs lors faire l'objet d'une saisie-attribution.

Comment effectuer une saisie-attribution ?

1. Remise de l'acte de saisie-attribution au banquier

Une fois qu'il dispose d'un titre exécutoire, le créancier doit demander à un commissaire de justice du lieu de résidence de son débiteur de rédiger un acte de saisie.

L'acte de saisie-attribution a pour effet :

  • d'interrompre le dĂ©lai de prescription de la dette qui donne lieu Ă  la saisie du compte bancaire,
  • d'attribuer au crĂ©ancier les sommes qui lui sont dues. En principe, malgrĂ© l'effet attributif immĂ©diat, le paiement de la crĂ©ance est repoussĂ© Ă  l'issue de la saisie, exceptĂ© si le dĂ©tenteur du compte bancaire accepte par Ă©crit le paiement immĂ©diat du crĂ©ancier. Il pourra alors disposer des fonds bloquĂ©s,
  • de rendre indisponible le montant saisi. Ainsi, aucun retrait, transaction ou virement ne peut ĂȘtre effectuĂ© sur cette somme.

L'acte de saisie-attribution qui ne comporte pas les mentions obligatoires peut ĂȘtre annulĂ©, ainsi que toute la procĂ©dure subsĂ©quente.

2. Information du détenteur du compte bancaire

Le dĂ©tenteur du compte bancaire doit ĂȘtre informĂ© de la procĂ©dure engagĂ©e Ă  son encontre par acte de commissaire de justice dans les 8 jours qui suivent la signification de l'acte de saisie Ă  sa banque. À dĂ©faut, la procĂ©dure n'est pas valable.

L'acte de commissaire de justice doit contenir :

  • la copie du procĂšs-verbal de saisie-attribution ;
  • la mention que toute contestation doit ĂȘtre soulevĂ©e dans un dĂ©lai de 1 mois et la date Ă  laquelle expire ce dĂ©lai ;
  • la juridiction devant laquelle les contestations pourront ĂȘtre portĂ©es (c'est-Ă -dire le Juge de l'exĂ©cution du lieu du domicile du dĂ©tenteur du compte bancaire) ;
  • l'indication, en cas de saisie de comptes bancaires, que le dĂ©tenteur du compte bancaire peut demander Ă  sa banque, dans les 15 jours suivant la saisie, la mise Ă  disposition d'une somme d'un montant au plus Ă©gal au RSA pour un allocataire, dans la limite du solde crĂ©diteur du compte au jour de la rĂ©ception de la demande.

En l'absence de l'une de ces mentions, l'acte de commissaire de justice encourt la nullité.

Enfin, bien que son omission ne soit pas sanctionnée, une derniÚre mention apparaßt généralement : le rappel que le client peut autoriser son créancier à se faire remettre par la banque les sommes qui lui sont dues, sans attendre la fin du délai de contestation (1 mois).

3. Saisie du compte bancaire

Si, dans un délai de 1 mois aprÚs avoir été informé de la saisie sur son compte bancaire, le détenteur du compte bancaire ne forme aucune contestation, son créancier pourra obtenir le paiement des sommes attribuées par l'acte de saisie. Une quittance de paiement sera ensuite remise à son établissement bancaire.

Si le détenteur du compte bancaire conteste la saisie-attribution dans le délai prévu, le paiement des sommes saisies sera suspendu jusqu'au rÚglement de sa contestation.