Comment sectoriser les activités lucratives d'une association ?

Rédigé par Roxane Hidoux

La sectorisation permet à l'association de regrouper et d'isoler les activités commerciales dans un secteur distinct qui sera seul assujetti aux impôts commerciaux.

Sommaire :

En quoi consiste la sectorisation des activités lucratives d'une association ?

Dans certains cas, l'association ne peut bénéficier de la franchise des activités lucratives accessoires, soit parce que ses activités lucratives sont prépondérantes, soit parce que les recettes en provenant dépassent 76 679 € (montant 2023).

Pour éviter que l'ensemble de ses ressources ne soient soumises à l'impôt sur les sociétés et à la TVA, l'association a intérêt à sectoriser ses activités lucratives accessoires.

La création d'un secteur au sein duquel sont regroupées toutes les activités lucratives permet de limiter l'application de la TVA et de l'impôt sur les sociétés au seul secteur lucratif.

Dans les faits, la sectorisation va consister à créer un secteur avec les activités non lucratives et un secteur avec les activités lucratives.

Étant donné que les 2 secteurs vont coexister au sein de la même structure juridique, la sectorisation va se faire principalement au niveau comptable.

En matière de contribution économique territoriale (CET), la sectorisation n'a aucune incidence puisque les activités non lucratives ne sont jamais taxables. Pour des raisons pratiques, l'association peut néanmoins décider d'appliquer la sectorisation à la CET.

Quelles conditions la sectorisation des activités lucratives nécessite-t-elle de respecter ?

2 conditions doivent être respectées pour que la sectorisation soit possible :

  • les activités non commerciales sont prépondérantes ;
  • les activités commerciales doivent être dissociables des activités non commerciales, c'est-à-dire qu'elles doivent correspondre à des prestations différentes.

L'association exerce des activités dissociables

Sont considérées comme dissociables de l'activité principale non lucrative, les activités qui correspondent à des prestations de nature différente.

Par exemple :

  • l'exploitation d'un bar ou d'une buvette,
  • la vente d'un journal, même si son thème correspond à l'objet social de l'association,
  • la location de salles,
  • la vente d'articles divers, même illustrés du logo de l'association.

La seule complémentarité des 2 activités ne remet pas en cause la non-lucrativité de l'activité non lucrative, dès lors que les 2 activités sont effectivement distinctes.

Ce n'est plus le cas lorsque l'activité non lucrative a pour objet principal le développement d'une clientèle ou l'accroissement des résultats de l'activité lucrative.

Lorsque l'objet social de l'association justifie que les activités non lucratives et les activités lucratives soient réalisées en employant simultanément les mêmes moyens, l'administration admet que la condition de dissociabilité se limite à l'aspect comptable. Dans ce cas, l'association doit prendre soin de dissocier comptablement les produits et charges se rattachant à chaque activité.

L'association exerce une activité non lucrative prépondérante

Cette notion de prépondérance doit s'apprécier de la manière qui rende le mieux compte du poids réel de l'activité non lucrative de l'association.

A cet égard, le critère comptable du rapport des recettes commerciales sur l'ensemble des ressources (recettes, dons, legs, subventions...) de l'association apparaît comme le plus objectif.

Il est préférable d'apprécier la prépondérance par rapport à une moyenne pluriannuelle, de façon à éviter que le résultat ne soit biaisé par une situation exceptionnelle.

Toutefois, lorsque le mode de fonctionnement des activités non lucratives fait appel de façon importante à des soutiens non financiers (dons en nature, activité bénévole...), il est préférable de privilégier d'autres critères, par exemple la part respective des effectifs ou des moyens consacrés à l'activité lucrative et à l'activité non lucrative.

Comment sectoriser les activités d'une association concrètement ?

1. Affectation des moyens d'exploitation

Les moyens d'exploitation propres à chacun des secteurs créés par l'association doivent être affectés au secteur concerné (salariés, locaux, matériel).

Lorsque les moyens d'exploitation sont communs à l'activité lucrative et à l'activité non lucrative, ils doivent être répartis au prorata du temps d'utilisation dans le cadre de l'activité lucrative.

2. Établissement d'un bilan fiscal de départ

L'association doit établir un bilan fiscal de départ à compter du premier jour du premier exercice soumis aux impôts commerciaux (tableaux annexes joints à la déclaration de résultats).

Doivent figurer dans ce bilan :

  • l'ensemble des éléments d'actif et de passif affectés aux opérations lucratives. Tout retrait ultérieur de l'un des éléments d'actif aura les conséquences fiscales d'une cession d'actif,
  • des comptes de régularisation et de provisions (produits constatés d'avance, produits à recevoir, provisions pour charge...) destinés à permettre un rattachement correct des produits et des charges entre période exonérée et période taxable. Les provisions analysées comme déductibles fiscalement sont ensuite traitées dans les conditions de droit commun.

Situation des immobilisations

En ce qui concerne les immeubles affectés à l'activité lucrative dont l'association est propriétaire, il existe 2 possibilités :

  • l'association peut inscrire à l'actif de son bilan la seule fraction de l'immeuble affectée à l'activité lucrative. Elle peut alors déduire les charges de propriété afférente à cette fraction d'immeuble, dont l'amortissement,
  • l'association peut ne pas l'inscrire à l'actif de son bilan. Dans ce cas, elle ne peut déduire de l'impôt sur les sociétés aucune charge de propriété, notamment d'amortissement au titre de cet immeuble.

En ce qui concerne les autres immobilisations, l'association doit en principe retenir la fraction du bien qui correspond à son utilisation lucrative.

Mais lorsque la répartition varie d'un exercice à l'autre (véhicules ou ordinateurs, notamment), l'association peut inscrire la valeur totale de ces biens au bilan du secteur lucratif, l'amortissement seul étant réparti, exercice par exercice, entre les 2 secteurs.

De plus, les comptes de capitaux propres doivent comporter un compte de liaison retraçant les transferts entre les 2 secteurs.

3. Valorisation des éléments inscrits au bilan fiscal de départ

Les éléments d'actif et de passif sont inscrits pour leur valeur réelle à la date d'établissement du bilan fiscal de départ. Une réévaluation des actifs sera ensuite nécessaire.

Cependant, lorsque la réévaluation est impossible, l'association doit fournir un tableau, joint à la déclaration, précisant pour chaque bien concerné :

  • la valeur d'inscription au bilan comptable,
  • la valeur réelle d'inscription au bilan fiscal,
  • l'amortissement pratiqué au plan comptable,
  • l'amortissement fiscal calculé sur la valeur réelle.

Imposition du secteur lucratif

Sectorisation et impôt sur les sociétés

Les résultats imposables du secteur lucratif sont imposés à l'impôt sur les sociétés au taux de droit commun et, exceptionnellement, aux contributions additionnelles à l'impôt sur les sociétés.

Ces impôts donnent normalement lieu au paiement d'acomptes. Toutefois, l'association en est dispensée :

  • au cours de la première année d'assujettissement à l'impôt sur les sociétés,
  • et toutes les fois où le chiffre d'affaires du dernier exercice clos est inférieur à 84 000 € (article 1668 du Code général des impôts).

Prélèvements de fonds sur le secteur lucratif

Les valeurs financières peuvent être transférées du secteur lucratif vers le secteur non lucratif. Ces transferts sont enregistrés dans le compte de liaison.

Ces sommes n'ouvrent pas droit à la réduction d'impôt en faveur du mécénat et ne sont pas déductibles du résultat imposable du secteur lucratif. Leur retrait d'actif a les conséquences fiscales d'une cession d'actif.

Les revenus patrimoniaux (revenus fonciers, agricoles et mobiliers) sont normalement soumis à l'impôt sur les sociétés au taux réduit de 10 %, 15 % ou 24 %.

Cependant, s'ils se rattachent aux activités lucratives sectorisées, ils devront être intégrés au résultat imposable au taux de droit commun.

L'association devra déposer 2 déclarations, l'une (2065) pour ce qui concerne son secteur lucratif, et l'autre (2070), pour ce qui concerne ses revenus patrimoniaux.

Sectorisation et contribution économique territoriale

Une association qui exerce une activité lucrative est assujettie à la CFE sur cette seule activité, que son activité principale soit lucrative ou non.

Néanmoins, si elle le souhaite, l'association peut sectoriser ses activités lucratives. Cette opération s'analyse en une création d'établissement si les activités lucratives sont exercées dans de nouveaux locaux ou si la sectorisation coïncide avec la création de l'activité lucrative imposable.

L'association devient imposable sur l'activité lucrative à compter de l'année suivant celle au cours de laquelle l'activité lucrative est créée. Ses bases sont alors éventuellement ajustées et elle bénéficie de la réduction de moitié des bases de la première année d'imposition.

En revanche, si l'association était déjà assujettie à la CFE avant la sectorisation de ses activités lucratives, il n'y a pas lieu d'appliquer la réduction pour création d'établissement.

Sectorisation et TVA

Contrairement à l'impôt sur les sociétés, le non-assujettissement à la TVA n'est pas subordonné à la sectorisation fiscale des activités.

En effet, pour la TVA, l'assujettissement se fait en fonction de la nature de chaque recette et la déduction selon le coefficient de déduction propre à chaque dépense.

La sectorisation empêche-t-elle l'association de délivrer les reçus fiscaux ouvrant droit à réduction d'impôt ?

L'existence d'un secteur lucratif ne remet pas en cause la qualification d'intérêt général d'une association.

Toutefois, les versements effectués n'ouvrent droit à réduction d'impôt que si les dons restent affectés directement et exclusivement au secteur non lucratif.

De même des valeurs financières transférées du secteur lucratif vers le secteur non lucratif n'ouvrent pas droit à réduction d'impôt en faveur du mécénat.

A défaut, l'association encourt une amende fiscale égale au montant de la réduction d'impôt.