Licenciement pendant un arrêt maladie : interdit ou pas ?

Rédigé par Roxane Hidoux

Le licenciement d'un salarié en arrêt maladie est interdit, sauf dans certaines circonstances (par exemple, perturbation de l'entreprise, faute du salarié).

Sommaire :

Licenciement d'un salarié en arrêt maladie pour perturbation de l'entreprise

Le licenciement prononcé en raison de l'état de santé ou du handicap d'un salarié est discriminatoire et est donc nul.

Les conséquences de la maladie peuvent cependant constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement. Il en est ainsi lorsque l'absence répétée ou prolongée du salarié :

  • perturbe la bonne marche de l'entreprise,
  • rend indispensable son remplacement définitif par un salarié en CDI,
  • et, n'est pas liée au manquement de l'employeur à son obligation de sécurité (par exemple, harcèlement moral).

L'employeur doit respecter la procédure de licenciement pour motif personnel. La lettre de licenciement doit impérativement faire état du dysfonctionnement causé à l'entreprise (ou à un service essentiel à son fonctionnement) comme motif de licenciement et de la nécessité de remplacer le salarié définitivement, faute de quoi le licenciement n'a pas de cause réelle et sérieuse.

De nombreuses conventions collectives comportent une clause de garantie d'emploi interdisant le licenciement d'un salarié en arrêt maladie avant une certaine période. Une fois ce délai passé, le licenciement pour perturbation de l'entreprise redevient possible.

1. Perturbation de la bonne marche de l'entreprise

La réalité de la désorganisation de l'entreprise s'analyse au cas par cas. Mais les critères sont les mêmes en cas d'absences répétées ou d'absences prolongées.

Les tribunaux tiennent le plus souvent compte des critères suivants :

  • la taille de l'entreprise. Une entreprise de petite taille, dont l'effectif est faible et dont les délais d'exécution du travail sont réduits pourra plus facilement invoquer sa désorganisation. Le licenciement apparaîtra injustifié si les autres salariés de l'entreprise parviennent à se partager les tâches du salarié malade, même si cela leur occasionne un surcroît de travail et les rend moins disponibles pour la clientèle ;
  • l'emploi et la qualification du salarié. Un salarié dépourvu de qualification ou de qualification peu élevée peut facilement être remplacé par un intérimaire ou par un CDD de remplacement à terme imprécis ;
  • la durée de l'absence. Plus la taille de l'entreprise est importante, plus la durée de l'absence doit être longue pour qu'un licenciement apparaisse justifié. Par ailleurs, si le retour du salarié malade est imminent, le licenciement apparaîtra toujours injustifié.

2. Nécessité de remplacer le salarié définitivement

Le remplacement devient nécessaire lorsque l'employeur ne peut plus recourir à des mutations internes, à des CDD et des intérimaires ou en répartissant les tâches du salarié absent entre les autres salariés.

L'employeur doit procéder rapidement à l'embauche d'un nouveau salarié, avant ou après le licenciement du salarié absent. Les juges tiennent compte des démarches effectuées par l'employeur en vue du recrutement, des spécificités de l'entreprise et de l'emploi concerné.

Le caractère définitif du remplacement suppose que le nouveau salarié soit embauché en CDI. L'employeur ne peut donc faire appel à un CDD, à un intérimaire, à un prestataire de services, à un salarié à temps partiel (si le salarié absent était à temps complet) ou à un autre salarié de l'entreprise.

3. Pas de lien avec un manquement à l'obligation de sécurité de l'employeur

L'origine de l'absence répétée ou prolongée du salarié ne doit pas être liée à un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité.

Ainsi, lorsque la maladie du salarié résulte du harcèlement moral qu'il a subi dans l'entreprise, l'employeur ne peut le licencier au motif que ses absences prolongées nuisent au bon fonctionnement de l'entreprise.

Un tel licenciement serait nul et ouvrirait droit à la réintégration du salarié.

Licenciement pour faute d'un salarié en arrêt maladie

Un salarié en arrêt maladie peut être licencié pour faute simple, grave ou lourde.

En effet, un salarié en arrêt maladie peut très bien faire l'objet d'une procédure disciplinaire et être licencié :

  • pour ne pas avoir respecté ses obligations au cours de l'arrêt maladie : envoi tardif du certificat médical malgré les mises en demeure de justifier de l'absence, exercice d'une activité professionnelle durant l'arrêt maladie...
  • pour avoir commis une faute antérieurement à son arrêt maladie : la procédure disciplinaire peut avoir été déclenchée avant l'arrêt maladie ou la faute avoir été découverte durant l'arrêt maladie.

L'employeur doit respecter la procédure de licenciement pour motif personnel.

Licenciement pour motif économique d'un salarié en arrêt maladie

Un salarié en arrêt maladie peut être licencié pour motif économique, dans les conditions habituelles.

L'employeur peut ainsi décider de procéder à un licenciement économique :

  • s'il n'est pas lié à la personne du salarié,
  • s'il est motivé par des difficultés économiques, par des mutations technologiques, par une réorganisation de l’entreprise destinée à sauvegarder sa compétitivité ou par une cessation totale d’activité ;
  • et qu’il a pour effet de supprimer ou de transformer l’emploi du salarié ou de modifier un élément essentiel du contrat de travail.

L'employeur doit respecter la procédure de licenciement pour motif économique.

Licenciement pour inaptitude d'un salarié en arrêt maladie

Une visite médicale de reprise est obligatoire après une maladie ayant entraîné un arrêt d'au moins 30 jours (quelle que soit sa durée pour une maladie professionnelle). C'est à l'employeur de prendre rendez-vous et de transmettre la convocation au salarié.

La visite médicale de reprise peut aboutir à un avis d'inaptitude par le médecin du travail lorsque le salarié n'est pas en capacité physique et/ou mentale de reprendre son emploi.

L'inaptitude en tant que telle peut constituer une cause de licenciement dans la mesure où le salarié déclaré inapte ne peut plus exercer les tâches pour lesquelles il a été embauché, sans que soit portée une atteinte à son intégrité physique ou à sa santé.

Mais l'employeur doit justifier avoir recherché de manière sérieuse le reclassement du salarié au besoin par mutations ou transformations de poste de travail y compris lorsque le médecin du travail a déclaré le salarié inapte à tous postes dans l'entreprise.

Le licenciement du salarié inapte est possible dans 2 cas :

  • L'employeur justifie de son impossibilité de proposer un emploi tenant compte des indications du médecin du travail.
  • L'employeur a proposé un reclassement, que le salarié a refusé.

L'employeur doit respecter la procédure de licenciement pour motif personnel. La lettre de licenciement doit mentionner l'inaptitude du salarié et le refus du poste de reclassement proposé par l'employeur au salarié, faute de quoi le licenciement n'a pas de cause réelle et sérieuse.

Conséquences de l'absence de visite de reprise

Lorsque l’employeur n’organise pas la visite de reprise, le contrat de travail reste suspendu. L'employeur ne peut pas donc sanctionner le salarié qui ne se présente pas à son poste de travail.

La visite doit être organisée même si l'aptitude du salarié ne fait pas de doute et même si la sécurité sociale a reconnu que le salarié était invalide ou a estimé que son état était consolidé.

Le refus du salarié de s'y présenter constitue une faute justifiant le licenciement.

Licenciement pour insuffisance professionnelle d'un salarié en arrêt maladie

Un arrêt maladie n'interdit pas de licencier pour insuffisance professionnelle un salarié qui n'a pas réalisé les objectifs fixés dans son contrat de travail.

C'est notamment le cas lorsque les griefs mentionnés dans la lettre de licenciement sont relatifs à une période antérieure à l'arrêt maladie (Cass. soc., 2 octobre 2019, n° 18-14.546).

L’incompétence alléguée doit reposer sur des éléments concrets et suffisamment pertinents pour justifier la rupture du contrat de travail en ce qu’elle perturbe la bonne marche de l’entreprise ou le fonctionnement du service, sans qu’il soit pour autant nécessaire d’établir l’existence d’un préjudice chiffrable pour l’entreprise.

Attention, certaines conventions collectives alignent les conditions de licenciement du salarié en arrêt maladie sur celles du licenciement du salarié en arrêt de travail pour maladie professionnelle ou accident de travail.

Dans ces cas, le licenciement d'un salarié en arrêt maladie n'est possible qu’en cas de faute grave ou lourde de ce dernier, ou en cas d’impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif non lié à l’accident ou à la maladie. Ce qui interdit le licenciement pour insuffisance professionnelle.